Depuis quelques semaines, l’épidémie dite de dengue ou grippe tropicale sème la désolation dans les villes et campagnes burkinabè. Elle aurait fait déjà 13 morts et plus de 900 cas détectés. Comme l’Ebola il y a deux ans dans certains pays ouest-africains, cette épidémie montre à nouveau la fragilité du système sanitaire burkinabè et donc à contenir la propagation de la maladie.
C’est que dénonce l’Union pour le progrès et le changement (UPC) dans la déclaration ci-contre

La dengue ou « grippe tropicale » est une maladie infectieuse présente dans toutes les régions tropicales. Le nombre de cas de cette maladie progresse actuellement de manière très importante, et l’inscrit aujourd’hui aux rangs des maladies dites « ré-émergentes ».
Il est aussi connu qu’il n’existe ni vaccin ni traitement spécifique contre le virus. La prévention de la dengue passe donc par la lutte contre le moustique.
Dans notre pays, l’assainissement est à un stade embryonnaire, la promiscuité dans les quartiers périphériques urbains et en milieu rural, le manque d’éducation pour la santé sont autant de tares structurelles qui ne peuvent que faciliter une éventuelle propagation de l’épidémie de dengue.
Si l’on jette un regard critique sur cette épidémie on se rend compte que la dengue, quelle que soit sa forme, va entrainer des conséquences graves sur l’économie du pays en terme de temps de travail perdu, et de spoliation du budget des ménages.
Face à cette épidémie, l’UPC constate une fois encore les limites de notre système de santé. En 2014 déjà, sous le régime de la IV ème République et au temps fort de l’épidémie à virus Ebola, l’UPC avait déjà tiré la sonnette d’alarme. Elle s’inquiétait en son temps du manque de prospective et de réactivité de notre système de santé. La situation semble avoir empiré.
Certes, Monsieur le Ministre de la Santé est passé au journal télévisé de la RTB pour communiquer sur la question ; des actions de sensibilisation à travers les médias sont initiées depuis quelques temps, mais nous doutons fort de la portée de ces actes au moment où le cap des 900 cas et 13 décès a été franchi. S’il est vrai « qu’il n’est jamais tard pour bien faire », comme le dit un adage, il faut reconnaître que dans le domaine de la santé, ce dernier prend une connotation péjorative. En effet, toute vie humaine est sacrée et doit être préservée.
Nous avons toujours argué, à l’UPC, que pour un pays pauvre comme le nôtre qui ne dispose pas d’un plateau technique suffisant, de ressources humaines en santé suffisantes pour faire face à l’urgence, il fallait mettre l’accent sur les activités de prévention. En effet, nous sommes convaincus que la prévention devrait être le principal mot d’ordre, basée sur une éducation pour la santé de nos populations.
Sur le plan de la sécurité sanitaire, force est de reconnaître que notre système de santé est toujours faible et très peu résiliant. Il en résulte trop de décès évitables et une incapacité du pays à assurer une sécurité sanitaire optimale pour les populations. L’évaluation en 2015 de la mise en œuvre du Règlement sanitaire international (RSI 2015) révèle que le Burkina Faso ne dispose pas encore des capacités essentielles minimales requises aux termes de cet outil de sécurité sanitaire. Le pays devrait être doté des mécanismes à même de lui permettre de faire face aux chocs les plus extrêmes sur le plan sanitaire.
L’UPC constate par ailleurs qu’aucune structure de santé publique au Burkina Faso ne propose les tests pour le diagnostic biologique de la Dengue, et ce, faute de réactifs à en croire les autorités sanitaires du pays. Seules les structures privées de soins le font alors même qu’elles ne bénéficient pas de toute l’attention qui se devait de la part des autorités en charge de la santé. Le partenariat public-privé toujours prôné est toujours inopérant du fait du manque de volonté manifeste de nos autorités de faire du secteur privé de la santé un véritable soutien à l’action publique.
Les ressources humaines en santé au Burkina Faso étant largement en deçà des normes préconisées par l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS), la contractualisation avec les ONG et associations devraient être privilégiée afin de toucher les populations par des activités de sensibilisations. Le Burkina Faso est un pays qui dispose d’un monde communautaire expérimenté dans ce type d’approche.
L’UPC devant ces constats :
 Interpelle le gouvernement sur l’impérieuse nécessité de consacrer un budget plus conséquent à la santé en général et à la lutte contre les maladies vectorielles en particulier ;
 Interpelle le gouvernement sur la nécessité d’un financement conséquent des formations sanitaires publiques afin qu’elles puissent se doter des intrants nécessaires à la réalisation des examens biologiques courants en général, et comme celui de la Dengue en particulier ;
 Invite le gouvernement à mettre l’accent sur l’assainissement du cadre de vie (construction des caniveaux couverts, des latrines familiales et publiques, etc.), en luttant contre la prolifération à ciel ouvert des gîtes de moustiques et autres vecteurs de maladies infectieuses. Des actions comme des journées de salubrité devraient être régulièrement organisées mais surtout à l’orée de la saison hivernale ;
 Invite prestement le gouvernement à mettre à contribution le mode communautaire comme il en a été pour la lutte contre le Sida, afin d’assurer la sensibilisation des populations. Ces ONG et associations ont beaucoup d’expériences dans le domaine de la sensibilisation. Elles maîtrisent les techniques d’animation pouvant même aller jusqu’au porte à porte afin d’informer les populations et atténuer leurs peurs de cette maladie.
En tout état de cause, l’épidémie de Dengue qui sévit actuellement au Burkina Faso doit permettre à l’Etat, s’il tient compte de notre contribution, de remettre en cause ses approches dans le domaine sanitaire et d’apporter rapidement les mesures correctives qui s’imposent.
Pour un développement mieux partagé,
Améliorer ce qui est déjà fait,
Corriger ce qui est mal fait,
Réaliser ce qui n’est pas encore fait.

Ouagadougou, le 14 Novembre 2016

Pour le Bureau politique national de l’UPC,
Dr Steve Léonce ZOUNGRANA (MD, MPH, MSc)
Hépato-Gastroentérologue/ nutritionniste
Secrétaire national à la Santé et à la population