Avant tout, qu’est-ce que le civisme ? La question ainsi posée renvoie aux livres et autres codes doctes. Aussi, il nous parait plus pratique d’entrer dans le concept par son antonyme : l’incivisme. Soyons encore plus pragmatique en inscrivant la démarche dans le contexte précis du Faso. L’incivisme, au Burkina Faso, est devenu un phénomène récurrent : les maîtres sont giflés ; les pères insultés ; l’officier est défié par le soldat ; la loi est violée et l’autorité de l’État est bafouée. Ce phénomène, tout le monde en parle : les médias, les enseignants, les familles, les associations de citoyens, les pouvoirs publics. Mais à quoi faut-il penser concrètement, au delà de la polémique qui oppose bien souvent les acteurs, quand on parle d’incivisme dans la nation ?

L’incivisme des petits.

Le petit, c’est nous citoyens lambda.C’est notre incivisme qui est le plus pointé du doigt par ceux qui définissent officiellement les concepts dans la nation dans leur prise de parole au nom des pouvoirs publics. On peut énumérer ici tout les comportements qui paraissent gauches, eut égard aux lois de la cité : les violations volontaires du code de la route ; les refus d’obtempérer et de répondre aux convocations de l’autorité ; les perturbations irrégulières de la vie communautaires que sont, les nuisances sonores, l’occupation anarchique des voies urbaines, le mépris des règles d’hygiène publique. Il faut joindre à tout cela, les débrayages du monde scolaire et estudiantin, les arrêts de travail sans préavis, les comportements de rejet de la hiérarchie.

*L’incivisme des grands
Il est le moins visible, mais le plus dangereux pour la nation. On peut y classer : la corruption dans le processus des marchés publics ; les fraudes fiscales ; les contrebandes de toutes sortes ; les détournements de deniers publics ; les pots de vin et autres dessous-de-tables ; les abus de pouvoir et toutes ces pratiques des représentants de l’État qui sont des entorses aux lois, à la réglementations, aux droits des citoyens

A partir de ces deux types d’incivisme, on pourrait alors définir le phénomène comme étant toute pratique contraire au contrat social et aux dispositions légales ou réglementaires qui en découlent. Au contraire, l’état d’esprit inverse, qui vise à agir en adéquation avec les grands principes de l’être-ensemble, peut être caractérisé d’attitude civique. Le civisme, ainsi défini, est certes, le résultat des efforts d’éducations effectués en amont de l’insertion sociale par de nombreux acteurs. Mais, tout n’est pas d’éduquer l’individu à l’acception de l’ordre et de réprimer éventuellement les comportements inciviques. Le civisme dans la nation n’est possible et durable que si tous ont le sentiment que le contrat social est juste et équitable pour chacun. Lorsque les petits ont le sentiment que l’ordre ne profite qu’aux grands, que la loi n’est faite que pour eux, qu’il existe dans la nation une justice à deux vitesses, qu’il ne sert à rien de chercher le bien public, il faut nécessairement s’attendre à des comportements inciviques dans la nation. Ainsi, La recrudescence des comportements inciviques dans une nation est bien souvent symptomatique d’un contrat social mal fondé, inadapté, contesté.
Rendez- vous dans notre réflexion prochaine consacrée aux causes de l’incivisme au Faso.

Zassi Goro ; Professeur de Lettres et philosophie, écrivain.
Kaceto.net