Il ne se passe plus une semaine sans que la presse n’allume ses projecteurs sur son ministère. Le ministre des Infrastructures puisque c’est de lui qu’il s’agit, fait actuellement le buzz. Il est cité par les syndicalistes de son département comme la tête de proue d’un système mafieux de prédation des deniers publics profitant à quelques proches. En tout cas, c’est ce qui ressort de leur dernier mouvement où ils réclament sa tête au Premier ministre. Comment on est arrivé à cela ?

Et pourtant, c’était l’un des ministres les plus visibles sur le terrain de la communication, non pas seulement par rapport au vaste chantier des routes et pistes rurales promises par le président Roch, mais aussi par la défense des positions de son parti, le MPP.

On l’a vu participer avec brio à certains débats où son calme et sa connaissance des dossiers le mettaient au-dessus du lot. Et même dans l’opinion, il a eu plus de baraka que certains de ses collègues qui ont dû affronter des dossiers « cailloux » et dont la gestion n’a pas toujours été bien appréciée des populations. Il n’y a qu’à écouter les émissions interactives pour prendre le pouls des préoccupations des Burkinabè. Eric Bougouma était considéré par certains même comme l’un des meilleurs ministres du gouvernement Thiéba I.

Alors peut-on dire qu’il est victime de son succès et des sillons qu’il trace avec assurance ? D’où peuvent venir, au-delà des revendications légitimes du syndicat, les oukases contre ce jeune banquier à l’avenir politique certain au Faso ?

La première hypothèse pourrait être les luttes d’influence à l’intérieur du parti au pouvoir, le MPP. Comme tout parti traversé par des courants (ce qui est normal ; c’est le cas partout), il ne faut pas s’étonner que des peaux de banane soient glissés sur le parcours d’un ministre qui monte et dont le leadership peut déranger. On sait que dans les ministères tout comme dans les autres structures qui rassemblent du monde, il y a des appartenances mais également des pions qui se tiennent à disposition de certains puissants.

Et les mouvements syndicaux n’échappent pas à cette règle. Alors là, ce n’est pas du tout étonnant au regard des éléments cités plus haut. Seulement, doit-on arriver à des méthodes détestables, notamment jeter le doute sur son action à la tête du ministère, l’un des plus importants de ce gouvernement quand on considère son budget et les attentes des populations ?

En plus d’être détestables, ces méthodes sont contre-productives pour tout le monde, y compris ceux qui en seraient à la base à l’intérieur du parti. Sur le plan interne, on peut aussi considérer que la gouvernance du ministre Eric Bougouma ne fait pas seulement des émules.

Il semble que les audits internes demandés par le ministre des Infrastructures dans lesquels il ressort bien d’anomalies affolent certaines têtes qui se sont vu subitement pousser des ailes syndicalistes. Evidemment, si les nouvelles procédures mises en place ont mis fin aux haricots, il faut en attendre l’adversité à l’intérieur du ministère. Le changement est difficile chez les hommes parce qu’en plus d’avoir peur de l’inconnu, ils souhaitent que cela commence par les autres.

Autrement, une nouvelle gouvernance serait mieux ailleurs, dans un autre département ministériel qui dit-on, aurait besoin d’un coup de balai ! Rien que des subterfuges pour masquer le mal-être des avantages coupés ou redistribués de façon plus large. Mais peut-être bien dans l’un ou l’autre cas, il existe des connexions. Il faut souhaiter surtout que les attentes légitimes des populations (dont certaines à l’Est ont trop souffert des fausses promesses) ne soient pas utilisées aussi pour démontrer une certaine inefficacité dans le ministère.

Quid de l’hypothèse de la cause externe ? Les éléments développés plus haut nous semblent suffisamment révélateurs que d’autres actions venant d’ailleurs trouveraient du pain bénit.

En état de cause, même si le ministre Bougouma présente plutôt un profil de technocrate, il demeure un homme politique qui fait certainement attention à ses arrières et aux menaces qui peuvent entraîner sa chute. Peut-être bien qu’il est au début de son ascension politique et comme tout décollage, le risque zéro n’existe pas…

Ousséni Tinga Kaboré

Observateur de la vie politique