Deuxième étape de sa tournée européenne après Milan, la délégation de la Commission constitutionnelle a rencontré aujourd’hui 26 mars à Paris, les Burkinabè vivant en France. Objectif, recueillir leurs avis, objections, critiques et suggestions en vue d’enrichir l’avant-projet constitutionnel

Par lettre du 17 mars 2017, le Consulat Général du Burkina Faso à Paris a convié la communauté burkinabè de France à une rencontre avec une délégation de la commission Constitutionnelle venant de Ouagadougou. La délégation, conduite par le Professeur Ibriga Luc Marius, était composée de Bazié Jean Hubert, Sanou/Touré Fatimata, Ki/Thiombiano Colette et Pitroipa/Nassouri Germaine.
Avant l’arrivée de la délégation à Paris, deux publications dans la presse nationale en ligne avaient déjà indiqué le climat de tension autour cette visite. Le dimanche 20 mars, Désiré Tapsoba, délégué du Conseil supérieur des Burkinabè de l’extérieur pour la Région 2 (Pas de Calais- Normandie – Picardie) adressait au ministre Alpha Barry une lettre ouverte au titre éloquent « Je refuse de servir de commis ou de simple faire-valoir ». Ensuite, le 24 mars 2017 un collectif d’associations et d’organisations dans une lettre ouverte au Président du Faso, disait « sa consternation » devant l’impréparation de cette visite.

C’est pourquoi, après le Dinatyè chanté à pleins poumons, l’ambassadeur du Burkina Faso à Paris, Alain Gustave Ilboudo dans son mot de bienvenue a tenu à présenter des excuses pour les délais trop courts, qui expliquent ce sentiment d’impréparation. A son tour, dans un propos liminaire, le professeur Marius Ibriga, expliquera que ce calendrier était surtout dicté par des contingences budgétaires. L’idée de faire ces tournée a pour objectif premier de « poursuivre la réflexion avec vous, afin d’enrichir le texte d’avant-projet de constitution de la Ve République. Il s’agit de tenir ce genre de rencontre dans les 13 régions du Burkina Faso et partout où il y a des concentrations de Burkinabè à l’étranger. En Afrique cinq pays ont été retenus : Mali, Côte-d’Ivoire, Ghana, Gabon et Sénégal. En Europe trois pays : Italie, France et Belgique. Le 25 mars à Milan, le 26 à Paris, puis le week-end prochain en Belgique.
Il a poursuivi en indiquant que le texte est le résultat de consensus des 90 commissaires. Dans un premier temps, la règle de travail de la commission telle que envisagée était la majorité, puis on est passé à la règle du consensus. Les points sur lesquels on n’a pu parvenir à un consensus ont été mis de côté. Toutefois, le désir est de prendre l’avis du plus grand nombre possible de Burkinabé. Il s’agit, pour l’heure de recueillir les remarques, points de vue et objections pour, ensuite, les transmettre à la commission constitutionnelle qui poursuivra ses travaux.Mais on n’a pas toujours les moyens de faire ce qu’on souhaite.
Toutes ces explications n’ont pas semblé suffisantes. Édouard Sanou, au titre de la section France du parti UPC est intervenu avec deux questions : « Qu’est-ce que vous attendez de nous ? Et qu’est-ce que nous sommes censés faire ? Parce que tout cela n’apparaît pas clairement dans les invitations que nous avons reçues ». Réponse du Professeur Ibriga : « Je l’ai déjà dit dans mon propos liminaire. On attend de vous que vous ayez un regard critique sur le texte. Et c’est ce qui a été fait dans toutes les régions ». A son tour Delphine Compaoré est montée au créneau pour dire que « faire des observations suppose qu’il ya eu un travail préalable par les Burkinabè de France. Pour ma part, j’ai lu le texte. Mais je constate qu’il n’y pas eu ce travail. Alors, ça risque d’être compliqué ». Explications du professeur Ibriga : « l’ambassadeur l’a dit, il y a un problème de délai. Cela est vrai, mais le texte est public il y a déjà un certain temps. Il faut savoir que ce sont essentiellement les problèmes budgétaires qui expliquent ces délais ».

Aux termes de ces premières discussions, un consensus est trouvé là aussi. On recueille les avis de ceux qui sont là aujourd’hui, et on laisse le temps aux Burkinabè de France pour organiser une réunion de travail autour du texte d’avant-projet de constitution. « Si c’est votre modus operandi, vous nous enverrez vos points de vue ultérieurement », a conclu le professeur Ibriga, chef de la délégation. Étant entendu que que vos conclusions doivent nous parvenir avant la mi-avril.
C’était là un début de décrispation que l’intervention de madame Sanou Fatimata, membre de la délégation est venue conforter. « Vous devez savoir que la mission a été reportée à plusieurs reprises à cause des problèmes de budget ». Puis elle enchaîné avec une présentation Power Point situant le contexte de la rédaction de cet avant-projet de constitution. Entre autres causes : la banalisation de la constitution de la IVe République, le rejet du pouvoir monarchique, une fracture sociale, et le désir d’alternance et d’une nouvelle gouvernance.
Après quoi, il y a eu les discussions avec la salle. Une première liste d’interventions a enregistré 25 noms. Ce qui démontre que l’avant-projet de constitution ne laissait pas indifférente la communauté burkinabè de France. Commencés à 14h30, avec l’objectif de terminer à 17 heures, les débats « francs, directs et sans entourloupe » selon le mot du Professeur Ibriga, ont pris fin à 20 heures.
Dans son mot de remerciement, l’ambassadeur du Burkina Faso a Paris a indiqué qu’il était « disposé à examiner avec bienveillance la demande de la salle des fêtes de l’ambassade pour la réunion de travail envisagée. » A charge pour la pour la communauté de se concerter pour déterminer une date.

Sayouba Traoré ; Journaliste, écrivain
Kaceto.net