La Coalition Contre la Vie Chère (CCVC) a inscrit en bonne place dans sa plate-forme d’action la question de l’éducation. Elle ne peut rester donc silencieuse face au chaos dans lequel la politique criminelle du pouvoir plonge le système éducatif chaque jour un peu plus.

En cette rentrée scolaire , marquée par le désordre, l’improvisation et de graves déficits, la CCVC se propose de sensibiliser et de mobiliser le peuple à travers une grande campagne pour une école démocratique et populaire accessible aux enfants du peuple.
Faut-il le rappeler, les Programmes d’Ajustement Structurel (PAS) rebaptisés Cadre Stratégique de Lutte contre la Pauvreté (CSLP) puis Stratégie de Croissance Accélérée et de Développement Durable (SCADD) ainsi que les multiples réformes opérées dans le système éducatif (refondation, Réforme globale du système éducatif lancée en 1997, système LMD, continuum…) ont conduit le secteur de l’éducation à la ruine.

Au plan de la qualité de l’éducation

La qualité de l’éducation au Burkina Faso s’est dégradée et se dégrade de façon continue sous les effets conjugués de l’insuffisance des infrastructures et des enseignants, de l’accroissement des effectifs dans les classes, d’une politique de formation initiale et continue des enseignants très défectueuse.
La CCVC est pour que l’école soit rendue accessible au plus grand nombre. Cependant, elle ne peut cautionner la politique menée par les autorités politiques et administratives en la matière, politique guidée par le seul souci de gonfler les taux de scolarisation, plutôt que d’offrir une formation de base véritable aux élèves. C’est bien ce qui explique les mesures administratives telles que la limitation des renvois et redoublements au primaire ainsi que les passages en classe supérieure avec des moyennes en-dessous de 2 sur 10. C’est aussi cela qui explique les goulots d’étranglement entre le CM2 et la 6ème dans un système où la loi d’orientation scolaire adoptée depuis 1996 déclare l’éducation obligatoire jusqu’à 16 ans !

Une des manifestations de la piètre qualité de l’éducation, ce sont les résultats scolaires notamment au post primaire, au secondaire et au supérieur. Alors que les taux de réussite atteignent 70 et même 80% au CEP, ceux du BEPC et du Bac tournent généralement autour de 30%. En 2014, les taux de succès sont respectivement de 28,62% et de 37,04% pour le BEPC et le BAC. C’est dire que les enseignements post-primaire et secondaire sont plus orientés vers l’échec que vers la réussite.
A l’enseignement supérieur, avec le système LMD, les résultats sont franchement mauvais. En 2013, on a enregistré un taux d’échec dramatique d’environ 98% au premier semestre de la première année du département de Science et Technologie de l’université de Ouagadougou.

Au niveau du financement

L’Etat n’a consacré en 2013 à l’éducation (MESS et MENA), que 13% de son budget qui s’élève à 1 259 milliards de F CFA alors qu’il s’est engagé à porter ce taux à 20% conformément aux recommandations de l’UNESCO et au cadre d’action de Dakar 2000 sur l’Education pour Tous (EPT).
Ce faible engagement de l’Etat dans les dépenses d’éducation se traduit par une insuffisance d’infrastructures et de ressources au profit de l’école. La faiblesse de l’offre éducative oblige les parents d’élèves à se tourner vers l’enseignement privé. Ainsi, en délaissant l’enseignement public, les autorités assurent la promotion de l’enseignement privé au niveau de tous les ordres d’enseignement.
Ainsi, au préscolaire, le taux de scolarisation et la place du privé illustrent parfaitement la démission de l’Etat ; avec un taux qui tourne autour de 3%, les structures formelles et non formelles privées concentrent près de 65% des effectifs !
Au primaire, en dépit des centaines de milliards engloutis par le Plan Décennal de Développement de l’Education de Base (PDDEB) entre 2001 et 2010, l’enseignement primaire reste à un taux de scolarisation de 82%, dont 15% assuré par le privé. Le nombre d’écoles sous paillote a atteint 4341 en 2013-2014
Au niveau des post primaire et du secondaire, l’enseignement privé représentait en 2013, 57,3% des établissements. Il se développe d’année en année avec des frais de scolarité qui augmentent sans cesse.
Au niveau du supérieur, le nombre d’établissements d’enseignement supérieur est passé de 50 en 2008 à 87 en 2013 dont 67,8% d’établissements privés.
Les coûts de formation à l’enseignement supérieur se chiffrent en centaines de milliers de francs et dans certains cas en millions, aussi bien au privé qu’au public. Par exemple, le Master 2 à l’Unité de Formation et de Recherche en Sciences de la Vie et de la Terre (UFR/ SVT) coûte en moyenne 500 000 F CFA à l’université de Ouagadougou. A l’enseignement primaire et secondaire, différentes sommes sont exigées des parents, qui vont des frais de scolarité aux cotisations spéciales en passant par les frais pour payer les balais, la craie, les frais de vacation, etc. L’école primaire dite gratuite au public peut coûter aux parents jusqu’à 5000 F CFA/enfant. Les frais de scolarité des structures préscolaires, primaires, secondaires privées se chiffrent en dizaines voire des centaines de milliers de francs.

Au plan des conditions faites aux acteurs

Les acteurs de l’éducation vivent des conditions de travail, d’études et de vie désastreuses. Les mécanismes de soutien aux enfants du peuple sont quasi inexistants : les bourses et les internats ont totalement disparu au secondaire ; en 2012-2013 selon le tableau de bord de l’enseignement supérieur, ce sont seulement 4159 bourses (nationales, étrangères, grandes écoles et écoles privées, bourses de stage…) qui ont été octroyées par l’Etat burkinabè pour une population estudiantine de 74 276 étudiants dans la même période. Cela signifie que 70 117 étudiants ont été abandonnés à eux-mêmes ou sont laissés à la charge de leurs parents. De 1990 à nos jours, la proportion d’étudiants boursiers qui était de 96% est tombée à 16% en 1999-2000 et aujourd’hui, elle est à 5%. Les amphis, les restaurants et cités universitaires ont des capacités d’accueil très en deçà des besoins des dizaines de milliers d’étudiants. Les enseignants, les étudiants et les élèves évoluent dans des classes et amphis surpeuplés.

La gratuité et l’obligation scolaire de 6 à 16 ans instituées par la loi d’orientation scolaire de l’éducation en 2007 et élargie en 2013 de 3 à 16 ans, restent un slogan creux, au regard de l’expansion continue de l’enseignement privé et des hausses répétées des connaissant une croissance exponentielle chaque année et les coûts augmentant d’année en année, même au public.
Autre plan de la gestion, ce que l’on observe, c’est un pilotage à vue et une complaisance totale vis-à-vis des infractions et autres manquements.
Au moment où le gouvernement s’attèle à mettre en œuvre le continuum, il maintient la séparation au niveau des institutions chargées de gérer le système éducatif. Ainsi, du préscolaire au supérieur, ce sont quatre ministères qui sont chargés de gérer l’éducation. La logique qui s’impose et qui est appliquée dans de nombreux pays, c’est la création d’un ministère de l’Education Nationale pour gérer le système jusqu’au secondaire au moins. Cela résoudrait du coup plusieurs problèmes qui se posent actuellement, notamment ceux liés à la gestion du personnel.
Toujours concernant la gestion du système éducatif, on observe une complaisance scandaleuse vis-à-vis des établissements pirates et ce, dans les différents ordres d’enseignement : des fondateurs guidés uniquement par le souci du gain, procèdent à des ouvertures d’établissements sans se soucier, ni d’avoir une autorisation, ni de respecter les cahiers de charges régissant l’ouverture des écoles. Ainsi, des établissements se créent sans le minimum de conditions requises : emplacement inapproprié (par exemple à proximité de débits de boisson), salles mal aérées, absence de professeurs permanents, inexistence d’un terrain de sport, … Et sous prétexte de prendre en compte les intérêts des élèves inscrits dans ces établissements pirates, les autorités ferment les yeux chaque année sur ces manquements graves. Le résultat, c’est le foisonnement des établissements pirates surtout dans les quartiers périphériques où les populations se sentent abandonnées à elles-mêmes.

Au regard de cette situation catastrophique du système éducatif, la Coalition Nationale de lutte contre la Vie Chère, la Corruption, la fraude, l’impunité et pour les Libertés (CCVC) :

 dénonce la démission des autorités de la IVème république ;
 interpelle les autorités afin qu’elles se penchent diligemment et sérieusement sur les problèmes de l’éducation ;
 appelle les populations à s’organiser et à se battre pour une école accessible aux enfants du peuple et pour un changement en leur faveur ;
 appelle les parents d’élèves, les élèves, les étudiants et les enseignants à renforcer leurs cadres de lutte, à se mobiliser et à lutter pour une éducation de qualité répondant aux attentes du peuple.

Non à la privatisation de l’école !
En avant pour la satisfaction de la plateforme d’action de la CCVC !
En avant pour une école démocratique et populaire !

Coalition contre la vie chère
Kaceto.net