La salle Sabcé de Pacfic Hôtel a abrité hier une conférence internationale sur le thème : défis environnementaux et perspective de développement socio-économique" organisée par le Salon international du textile africain (SITA) dont la cinquième édition qui a débuté le 28 novembre s’achève ce soir avec la nuit du coton

"Le vrai défi auquel fait face l’Afrique, c’est celui de la productivité ; nous ne parvenons pas à produire en quantité et en qualité suffisante pour faire face à la demande intérieure ; même si nous transformons la totalité de la fibre produite sur le continent noir, cela ne suffira pas à habiller les Africains". Propos d’un acteur avisé de la filière cotonnière burkina, François Traoré, ancien président de l’Union nationale des producteurs de coton du Burkina. C’était hier à la faveur d’une conférence internationale qui a réuni hier 29 novembre dans la salle Sabcé de Pacific Hôtel, des chercheurs, des économistes et des acteurs de la filière cotonnière.

Selon Jean-Mari Ouadba, chercheur et qui intervenait au nom du Programme des nations unies pour le développement (PNUD), les pesticides et les engrais doivent être utilisés avec précaution car, note t-il, des espèces animales et végétales sont menacés de disparition par leur utilisation. "Avant, quand on circulait en voiture dans les campagnes, des papillons s’écrasaient contre les pare-brise ; ce n’est plus le cas actuellement" regrette t-il, signe que la biodiversité est menacée dans sa richesse par l’usage des produits chimiques dans les cultures. Sans proposer une alternative aux pesticides, les conférenciers ont recommandé le respect au moins de la notice et du mode d’emploi de ces produits qui contribuent à booster la production.

Sur la nécessité de protéger l’environnement sans pour autant renoncer à augmenter la productivité, Paul Loga Mahop, président de la Confédération camerounaise de la mode, du textile et de l’habillement appelle les Africains à ne pas se laisser induire en erreur par les Occidentaux : "La part de l’Afrique dans la pollution mondiale ne représente que 00,6% contre 86% pour l’Asie et l’Europe", argumente t-il. Pour lui, il faut mutualiser les moyens et mobiliser les financements africains pour aider les producteurs à se doter d’outils modernes et performants, conditions nécessaires pour que la marché africain soit alimenté par des produits africains et non par la friperie qui inonde le continent.
Intervenant sur l’autonomisation des femmes et l’industrialisation de l’Afrique, la zimbabwéenne Rumbiozayi Judith Kamba explique que les femmes dans son pays font face à des difficultés d’accès à la terre, aux financements et à la formation, toutes choses qui limitent leurs capacités de production.

Venue représenter le président de la Commission de l’Union africaine, Joséphine Mayuma Kala a rappelé la philosophie qui anime l’organisation continentale et a regretté que les décisions prises lors des sommets ne soient pas mises en application par les Etats. En vue d’atteindre l’autonomie financière, l’UA a décidé d’imposer un prélèvement de 0,2% des importations de chaque pays pour financer les activités de l’organisation dont les ressources proviennent pour l’instant en grande partie de soutiens extérieurs. En vue également de faciliter le commerce intra-africain, une zone de libre échange continentale (ZLEC) a été créée en mars 2018 lors du sommet de Kigali. L’objectif étant de créer aussi des chaines de valeur régionales dans des secteurs comme le textile et cela en droite ligne de l’Agenda 2063. Elle a déploré que l’Afrique ne représente que 0,55% du volume des exportations mondiales, ce qui fait dire à certains que si le continent noir disparaissait, il n’y aurait aucun impact sur le reste du monde.

S’exprimant au nom du ministère du Commerce, de l’industrie et de l’artisanat, Boubakar Bilgo s’est appesanti sur les accords de partenariat économique (APE) signés par les régions africaines et l’Union européenne.

En Afrique de l’Ouest, 13 pays sur 16 ont signé les APE avec l’Union européenne, mais à ce jour aucun ne l’a ratifié. Dans cet accord, le coton fibre figure sur la liste des matières devant être totalement libéralisées, tandis que les fils en sont exclus. "C’est pour nous inciter à créer de la valeur ajoutée à nos produits au lieu de les exporter brut", a t-il expliqué.

Il est également revenu sur l’AGOA, la loi américaine votée en 2000 qui permet l’accès des produits africains sur le marché américain sans droits de douanes.
Reste que toutes les facilités offertes par les APE et l’AGOA ne sont qu’apparentes, car, comme l’a souligné un participant, des normes de santé et de qualité ont été édictées par ces pays qui limitent l’accès des produits africains à ces marchés.

Tous les participants à la conférence d’hier s’accordent sur une chose : il y a un marché africain du textile qui reste à satisfaire et les dirigeants africains et les leaders d’opinion devraient faire la promotion des produits africains en portant fièrement les tenues confectionnés par nos couturiers.

Dominique Koné
Kaceto.net