Dans la nuit du 31 décembre 2018 au 1er janvier 2019, l’assassinat de 6 personnes dont le chef de village par des individus armés non identifiés, dans le village de Yirgou, commune de Barsalgo, province de Sanmatenga au Centre nord, a conduit à des actions de représailles indiscriminées contre des personnes appartenant à la communauté peule, par des éléments du groupe d’autodéfense communément appelés « Koglewéogo » et appartenant à l’ethnie mossi sous le prétexte fallacieux que les peuls seraient les suspects dans le terrorisme. Tous les mossis ne sont pas mauvais.

Ces représailles indiscriminées d’une violence inouïe ont consisté en une chasse poursuite et des exécutions sommaires de plusieurs peuls tués à bout portant par des armes à feu ou carrément égorgés. Même les Peuls qui étaient membres de ces groupes Koglewéogo ont été tués et égorgés par leurs camarades Kogléweogos. N’est-ce pas un nettoyage ou génocide ethnique ?
De nombreux témoignages, récits et publications décrivent une situation d’horreur insoutenable.
Les chiffres officiels du gouvernement font état de 46 morts. D’autres sources estiment les morts à plus de 60 tués.
Dans la matinée du 2 janvier 2019, la situation restait encore très confuse. L’intervention des autorités publiques en charge de la sécurité et de l’ordre étant intervenue tard et de façon non déterminée à la hauteur de la menace explique le bilan effroyable de perte en vie humaine.
A la date du 3 janvier, malgré l’annonce d’un déploiement plus important des forces de l’ordre dans la zone de conflit, la situation restait volatile et très préoccupante. Plusieurs survivants, femmes, enfants et personnes âgées restaient introuvables, beaucoup errant dans les broussailles, exposés aux intempéries de cette période de l’harmattan.
S’il faut saluer ce déploiement, tardif, des forces de l’ordre qui a permis une accalmie, il faut regretter et déplorer l’absence de mesures déterminées de l’autorité publique pour retrouver, rassurer et sécuriser les survivants.
A la date du 3 janvier, aucune action de l’action sociale, des services de santé et de secours n’est engagée sur le terrain pour protéger et sécuriser les survivants.
Les peuls triple victimes du terrorisme !
De l’ensemble des burkinabè, les peuls sont ceux qui ont payé jusque-là un lourd tribut au terrorisme et à l’extrémisme violent.
Primo : Le sahel, leur région, est la plus sinistrée par le phénomène. Des villages ont cessé d’exister. Des populations ont été contraintes à l’exil. Les services sociaux de base ; école, santé et administrations publiques ont été fermés ou démantelés. Des milliers d’enfants sont privés d’école et d’avenir.
L’économie de la région est complètement sinistrée. Les marchés contraints de fermer ou de se transformer en tremplin de trafics illicites de toute sorte.
La vie sociale dans plusieurs communes du sahel est désormais ouvertement régie par les lois des terroristes transformant les femmes et les jeunes filles en être de second rang.
Secundo : Du point de vue des tueries, les peuls sont ceux qui enregistrent le plus de perte en vie humaine.
Tertio : ce sont aussi eux qui sont stigmatisés comme étant des terroristes : « peul égal terroriste » et traités comme tel. Pourtant il est établi que la radicalisation touche l’ensemble de nos communautés. Autant il y a des Dicko radicalisés, autant il y a des Sawadogo, des Sanogo, des Ouédraogo, des Konaté, des Maiga…radicalisés. L’extrémisme violent et le terrorisme ne sont pas circonscrits à une communauté spécifique.
Quand la pluie nous bat !
Les tragiques événements de Yirgou montrent que les terroristes ont enregistré une nouvelle victoire sur notre peuple. Le terrorisme nous tuait et sinistrait notre pays. Désormais, il nous pousse à nous entretuer, pour se porter en sauveur de ceux d’entre nous qui se sentiront abandonnés et mal aimés et fatalement basculer notre pays dans les abimes de la guerre civile. La situation géographique du village de Yirgou, le théâtre du drame, est très propice à l’effet de contagion recherché. Les Burkinabè doivent comprendre donc, que c’est inutile de se battre quand vous êtes déjà battu par la pluie.
Alors, l’heure est grave !
Mais elle le serait davantage si nous restions assis à ne rien faire. Ces dernières années, force est de constater que la manipulation des identités se banalise et menace gravement l’homogénéité sociale de notre pays. Fermer les yeux sur cette situation tragique que vivent actuellement les communautés peules et autres, c’est pour l’Etat burkinabè se tirer une balle dans le pied. Les populations ne se référent plus à la justice pour régler les litiges. Elles préfèrent se rendre justice elles-mêmes. Il suffit qu’un membre de la communauté peule soit suspecté d’un délit pour que le courroux s’abat sur toute la communauté. La communauté peule a payé un lourd tribut dans notre pays..
L’Etat doit s’assumer
Face à l’urgence et la gravité de la situation l’Association TPB, et la Coalition OSC du Pulaaku présentent ses sincères condoléances aux familles et à toutes les communautés endeuillées. Tout en condamnant l’assassinat barbare du chef et de 5 autres personnes, nous compatissons à la douleur des familles endeuillées et présentons nos sincères condoléances. Notre organisation lance un vibrant appel à la retenue et au calme à tous les habitants et à tous les acteurs.
Nos associations lancent un appel pressant à l’Etat, à assumer ses responsabilités et toutes ses responsabilités.
Il faut veiller à l’arrêt immédiat et sans délai de la perpétuation des crimes afin d’éviter tout embrasement.
Il faut protéger, sécuriser, rassurer et prendre en charge les survivants.
Une action d’envergure doit être immédiatement engagée pour réaffirmer l’obligation du vivre ensemble de tous les Burkinabès.
Les services compétents de la justice doivent se mettre en branle pour rechercher et documenter l’ensemble des preuves et poursuivre sans ménagement les auteurs et les commanditaires des meurtres. C’est l’impunité qui est en grande partie responsable du sentiment que les commissions des crimes en groupe et contre une certaine communauté nationale sont normales.
Face à la banalisation de la vie humaine, au droit à la vie de tout citoyen Burkinabè, et à la boucherie humaine de Yirgou, notre organisation appelle le peuple burkinabè sans distinction ethnique, les autorités, les forces démocratiques, les structures de droits humains, les OSC, les syndicats, les coutumiers et les religieux à se mobiliser pour dénoncer les manœuvres divisionnistes des terroristes et les groupes d’autodéfense Kogleweogo et exiger :
 L’arrêt immédiat des crimes odieux, et à l’arrestation des fautifs qui seront jugés et sanctionnés à la hauteur de la gravité de leurs crimes.
 Le désarmement de tous ceux qui détiennent illégalement des armes de guerre, les milices Kogleweogos.
 L’implication de l’armée burkinabè dans le respect des codes républicains ;
Notre organisation lance un vibrant appel à la communauté internationale pour son implication afin de protéger les vies humaines.
ENSEMBLES, ENRAYONS LE DÉLITEMENT DE LA COHÉSION SOCIALE !

Pour le Bureau, le PRESIDENT

Amadou SIDIBE