Le président du Faso Roch Marc Christian Kaboré a regagné Ouagadougou cette nuit, de retour de Dakar au Sénégal, où il a pris part à une session extraordinaire de la Conférence des chefs d’Etat et de gouvernement de l’Union économique et monétaire ouest-africaine. La question du développement, et de la lutte contre le terrorisme, a été au centre de ce sommet, qui a été précédé, le 2 décembre, d’un panel sur le développement durable et la dette soutenable.
Au terme de ces rencontres, Roch Marc Christian Kaboré a fait le point à la presse burkinabè, qui l’a accompagné au Sénégal.

R. M. C. K : « Après le sommet de la CEDEAO qui s’est tenu à Ouagadougou (14 septembre 2019, NDLR) , nous avons, au niveau de l’UEMOA, demandé au président Macky Sall, qui s’occupe de la commission paix et sécurité, et au président Patrice Talon, de réfléchir aux moyens de financer la lutte contre le terrorisme. L’UEMOA s’était engagée à participer à hauteur de 500 millions de dollars US, étant entendu que la contribution globale avec la CEDEAO devait être de 1 milliard de dollars US.
Aujourd’hui, la rencontre nous a permis de faire le point de ces engagements, de pouvoir choisir comment nous allons mobiliser les ressources, mais également de prendre la décision d’apporter au Mali, au Burkina Faso et au Niger, un appui de 100 millions de dollars US, soit environ 55 milliards de FCFA pour aider ces pays du front à s’équiper, à organiser des activités communes, y compris avec le Tchad. Comme vous le savez, le président Déby, qui fait partie du G5 Sahel, est engagé à faire déplacer ses troupes sur les zones des trois frontières, Mali-Burkina-Niger, pour la lutte contre le terrorisme. Cet appui est une bonne action et c’est un bon début.
L’engagement a été pris, et nous allons poursuivre la mobilisation des ressources sur trois à cinq ans, le temps de pouvoir équiper, renforcer et consolider les actions communes sur les différentes frontières, afin de réduire l’action des terroristes au Burkina Faso, au Mali et au Niger, ainsi dans la sous-région en général. C’est l’essentiel de la rencontre que nous avons eue ce matin.
Auparavant, nous avons eu, avec différents chefs d’Etat, une réunion avec la Directrice générale du Fonds monétaire international (FMI) et la Banque mondiale autour de la question du développement durable et de la soutenabilité de la dette. Après avoir fait le constat que nous sommes tous engagés pour atteindre les Objectifs du Développement durable (ODD), il apparaît aujourd’hui que malgré le fait qu’en Afrique subsaharienne, le taux de croissance soit supérieur à 6%, donc supérieur au taux de croissance mondial, en 2030 on notera un accroissement de la pauvreté en Afrique.
Aujourd’hui, nous constatons que les ressources internes ne peuvent pas financer les ODD, et que l’aide publique au développement a largement baissé. Il ne reste plus que l’endettement qui permette de financer l’atteinte des ODD. Mais le problème est qu’en plus de cela, nous devons développer, d’une part, les infrastructures routières, sanitaires, scolaires... et, d’autre part financer le développement du capital humain. Pour ce faire, les pays en développement sont obligés de s’endetter. La dette n’est pas une mauvaise chose en soi, mais il faut un équilibre entre les choix économiques et sociaux que nous voulons atteindre, et la question de la soutenabilité de la dette.
Il apparaît que les dettes africaines pèsent aujourd’hui, parce qu’elles sont constituées de dette intérieure, de dette du secteur privé et les taux d’intérêt sont élevés. Nous payons donc beaucoup sur les budgets de nos différents Etats. De ce point de vue, il était important qu’avec les institutions de Brettons Woods, nous voyions comment améliorer cette situation. La solution passe par le renforcement des recouvrements des recettes fiscales intérieures, l’assouplissement des règles au niveau du FMI, surtout pour les pays qui sont en guerre contre le terrorisme et qui dépense 15 à 30% de leur budget pour l’équipement et l’entretien de leurs armées. Ces pays sont obligés de laisser tomber certains programmes dans les secteurs sociaux et les secteurs de développement. Il faut également attirer le secteur privé à investir pour pouvoir soutenir les projets structurants dans nos différents Etats. Ce sont des pistes de réflexion qui ont été dégagées, et nous devons continuer de mener ces réflexions à l’issue de cette rencontre avec le FMI. Je pense que nous avons été bien entendus par la Directrice générale du Fonds ».

Propos recueilli par Lassané Ouédraogo
Direction de la communication de la présidence du Faso