L’impact de l’Accord de partenariat économique (APE) entre le Cameroun et l’Union européenne (UE), dont la phase du démantèlement tarifaire est effective depuis le 4 août dernier, induira des pertes de recettes douanières de l’ordre de 830 milliards FCFA en 2023 et 1907 milliards FCFA en 2030, selon le directeur général des Douanes Fongod Edwin Nuvaga.

Cette révélation est contenue dans le compte-rendu du Groupement interpatronal du pays (GICAM), au lendemain d’un dîner-débat organisé mercredi dernier dans la métropole économique, Douala, sous le thème : « Mise en œuvre de l’APE et lutte contre le commerce illicite : quels ressorts pour le partenariat douanes-entreprises ? »

Ces prévisions inquiétantes, note-t-on, interviennent alors que le pays prévoit une mobilisation des recettes assignées à l’administration douanière de 753 milliards FCFA en 2016, en hausse de 11% en valeur relative par rapport à l’exercice précédent.

Elles arrivent aussi au moment où ce service, selon Fongod Edwin Nuvaga, enregistre un nombre croissant de plaintes des importateurs en rapport avec la concurrence déloyale et la contrebande.

Selon le directeur commercial et marketing de la Cotonnière industrielle du Cameroun (CICAM), Nicolas Njoh, « l’espace économique national est aujourd’hui envahi à plus de 80% par les produits entrés en fraude ou en contrebande ».

Le commerce illicite, a-t-il constaté, prospère parce que favorisé en interne par un certain laisser-faire des pouvoirs publics, l’opportunisme d’opérateurs économiques véreux ainsi que la confusion entre libéralisme et libertinage économique.

Le commerce illicite, a ajouté Nicolas Njoh, est aussi favorisé par des facteurs externes tels que les politiques de subvention des exportations de certains pays occidentaux, les politiques agressives des pays émergents et les manipulations monétaires.

L’impact de l’APE est d’autant plus redouté, au Cameroun, et selon le patronat, que son entrée en vigueur coïncide avec la chute vertigineuse du naira, la monnaie du grand voisin nigérian, ainsi que le maintien à un taux de change élevé du dollar américain.

Le GICAM, rappelle-t-on, avait freiné des quatre fers sur ce démantèlement tarifaire exclusif, militant davantage « pour un APE régional complet et équilibré » et insistant pour la mise en place préalable de réformes règlementaires.

Aujourd’hui, les Douanes camerounaises préconisent la mise en œuvre de mesures de sauvegarde à l’instar des droits antidumping ou des mesures compensatoires, une bonne maîtrise du calendrier de démantèlement tarifaire, la rationalisation des exonérations et l’octroi des régimes économiques et suspensifs aux entreprises locales.

Elles prônent également le renforcement des contrôles sur l’origine des marchandises, l’application rigoureuse des normes locales rendues obligatoires à la faveur de l’instauration du programme dit d’évaluation de la conformité avant embarquement.

Interrogé voici quelques jours par APA, en rapport avec ce qu’il pouvait considérer comme étant les premiers écueils de l’APE le ministre de l’Economie, Louis Paul Motaze, avait déclaré qu’au stade actuel, il était « loisible de constater que l’application de l’Accord n’enregistre pas de problèmes majeurs », le Cameroun s’employant néanmoins « à accorder la plus grande attention à l’évolution de la situation ».

Pour lui, les opportunités qu’offre l’APE, dans le cadre de la lutte contre la pauvreté et le renforcement de la compétitivité de l’économie locale, ne doivent pas conduire à méconnaître les défis à relever dans le sens notamment de la sensibilisation et de l’information des groupes cibles et du grand public.

APA