J’ai suivi, effectivement, comme beaucoup de Burkinabè le reportage sur la conférence de presse tenue par Marcel Tankoano et Pascal Zaïda sur la télévision BF1. Ce matin, dans une audio qui m’est parvenue, Marcel TANKOANO, libre de ses mouvements, affirme que le nommé Pascal ZAIDA a été arrêté ce matin même très tôt par les services de la police judiciaire,et ce, sur instruction de la hiérarchie.

Pascal Zaïda est loin d’être un ami. Je ne l’ai jamais rencontré, mais tous ceux qui ont lutté contre la dictature de Blaise COMPAORÉ connaissent bien Pascal ZAIDA. Dans les années 2013 et 2014, pendant que de nombreuses OSC luttaient contre la modification de l’article 37, Pascal Zaïda et ses amis menaient une autre lutte en faveur du régime de Blaise COMPAORE. Et cet homme n’a jamais changé sa position. Il ne jure que par le régime déchu de Blaise COMPAORE. Mais, est-ce une infraction pénale de se battre pour un homme politique ? Est-ce illégal d’être au service d’un homme politique ?

C’est en restant dans cette logique que Pascal ZAIDA et Marcel TANKOANO ont animé leur conférence de presse hier pour dénoncer les dérives du pouvoir KABORE. Si la position du petit TANKOANO semble me surprendre, celle de Zaïda est bien une suite logique qui ne devrait surprendre personne. Et Zaïda utilise ici la liberté d’expression que nous utilisons tous pour mener sa lutte. Cette liberté d’expression, nous l’utilisons tous au nom de la République. Ceux qui soutiennent le pouvoir en place utilisent la même liberté d’expression pour défendre tous les actes du pouvoir et il est normal que ceux qui sont contre le pouvoir utilisent la même liberté d’expression pour exprimer leurs désaccords. Soit nous sommes dans la République, soit nous sommes dans la dictature. Pourquoi alors un tel acharnement sur ceux qui dénoncent les dérives du pouvoir ?

Pour ceux qui me suivent, depuis octobre 2020, j’avais prévu la victoire possible du MPP ,mais, je ne me suis pas arrêté là. J’avais aussi dit que courant le second mandat de Roch KABORE, le pouvoir passera à une autre étape dans la répression de tous ceux qu’il considère comme des opposants. Et cela ne fait que commencer. Et c’est la preuve qu’il est facile d’avoir le pouvoir, mais il est difficile de le gérer. Aujourd’hui, le régime en place a le soutien de la grande majorité des intellectuels burkinabè. De nombreuses grandes voix qui avaient dénoncé les dérives du régime COMPAORE ont retourné leurs vestes pour apporter leurs soutiens conditionnels au régime actuel.
Il se trouve que, malgré tous ces soutiens, le régime peine à installer la bonne gouvernance et à donner un véritable espoir aux Burkinabè. Des marches contre le pouvoir se tiennent dans presque toutes les localités du pays.

Et c’est cela qui fait peur. Le régime entame, logiquement, sa deuxième manœuvre. Après avoir acheté d’une manière ou d’une autre les grandes voix qui ont combattu le régime COMPAORE, il doit réprimer et faire taire les irréductibles qui refusent tous les compromis. Et il en est ainsi pour tous les régimes incapables d,imprimer sur du marbre les marques du changement. N’allez pas loin. Même sur Facebook, ceux qui manquent d’arguments et qui n’aiment pas la contradiction utilisent la violence, les menaces, les injures, l’arrogance ou le mépris comme leurs armes de défense. Ils sont nombreux ceux qui vous ont bloqué parce que vous donnez des avis contraires à leurs points de vue. Moi, des gens se sont retirés de ma liste parce qu’ils ne peuvent plus me supporter tout en sachant qu’ils n’ont aucun bon argument pour défendre leur cause égoïste. Ils sont nombreux ceux qui refusent systematiquement la contradiction.

La violence est toujours l’expression de la faiblesse, de l’incapacité et de l’inintelligence quand il vient d’un dirigeant ou d’un leader. Le régime actuel n’a aucun autre choix que de recourir actuellement à la violence et aux menaces contre tous ceux qui refusent de chanter ses louanges. Et même dans la vie, c’est ainsi. Quand on manque de charisme, de l’aura et de leadership, et on veut s’imposer dans un groupe, on utilise soit la corruption soit la force d’une manière ou d’une autre.

Qu’est ce que les gens n’ont pas dit contre le pouvoir de Blaise COMPAORÉ ?.
Qu’est ce que ceux mêmes qui sont au pouvoir n’ont pas fait au régime de Blaise COMPAORÉ ? Et c’est au nom de la liberté qu’ils sont au pouvoir. Nous étions tous ici au Burkina. Nous avons tous écrits pour tenir de durs propos à l’encontre du pouvoir COMPAORÉ. Dans les journaux, lors des conférences de presse, des acteurs de la société civile, des activistes et des intellectuels ont utilisé tous les mots pour dénoncer les dérives du pouvoir COMPAORÉ. Aucun n’a été arrêté après une conférence de presse. Aujourd’hui, c’est un régime qui a profité des fruits de la liberté pour arriver au pouvoir qui se transforme en régime répressif et qui arrête un homme parce qu’il a animé une conférence de presse. Et ce n’est pas la première fois que Zaïda est victime de tels abus autoritaires.

Que ceux qui applaudissent continuent d’applaudir. Le destin des peuples africains semble être une malédiction. L’histoire n’enseigne personne. Chaque régime fabrique ses dieux. L’avenir nous dira la vérité.

Adama Siguire
Ecrivain