On se doutait bien que le sommet extraordinaire des chefs d’Etat des pays membres de la Communauté économique des Etats d’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) tenu hier 9 janvier à Accra au Ghana, n’avait pas été convoqué dans le but de féliciter les autorités maliennes quant à la conduite du processus de retrour à l’ordre constutitionnel.
Déjà le 12 décembre dernier, cette organisation régionale avait sévèrement mis en garde les autorités de laTransition sur les mesures drasqtiques qu’elle pourrait prendre pour les contraindre à respecter le calendrier électoral avec la tenue des élections en février 2022.
Mais on était loin depenser que la CEDEAO aura la main si lourde contre le gouvernement Transition qui avait pourtant clairement indiqué que le délai de février 2022 n’était pas tenable en raison de la situation sécuritaire très préoccupante due aux attaques terroristes.
A l’issue de conclave d’Accra, une batterie de sanctions très sévères a été prises dont on se demande quel est réellement l’obectif visé par les chefs d’Etat : punir le peuple malien dans son ensemble ou accompagner le gouvernement transitoire pour un retour dans un délai raisonnable à l’ordre constitutionnel ?
Certes, le calendrier adopté à l’issue des Assises nationales et proposé pour la fin de la Transition en 2026 n’est pas acceptable, mais les décisions prises hier risquent de fragiliser davantage le gouvernement dans sa lutte contre les groupes terroristes, d’aggraver une situation humanitaire déjà dramatique et plomber un peu plus le pouvoir d’achat de la population.
Fermeture des frontières des pays membres de la CEDEAO avec le Mali, suspension des transactions commerciales, gel des avoirs du Mali à la BCEAO, etc., sont entre autres, les sanctions décidées hier contre le Mali en attendant que le gouvernement propose calendrier plus raisonnabl. (Ci-contre le communiqué final).
Peu après la publication du communiqué final, le gouvernement malien a regretté ces mesures, y voyant la main d’une puissance étrangère hostile aux intérêts du pays.

Communiqué final du sommet des chefs d’Etat et de gouvernement dela CEDEAO sur la situation au Mali tenu à Accra auGhana le dimanche 9 janvier 2022

La Communauté Economique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) s’est réunie en Session Extraordinaire à Accra, République du Ghana, le 9 janvier 2022, sous la présidence de S.E. Nana Addo Dankwa Akufo-Addo, Président de la République du Ghana La Session devait examiner les développements politiques en République du Mali, dans le contexte de la transition en cours dans le pays depuis le dernier Sommet tenu le 12 décembre 2021.

Etaient présents au Sommet les Chefs d’Etat et de Gouvernement de la CEDEAO ci-dessous ou leurs représentants dûment mandatés :

S.E. Patrice Talon, Président de la République du Bénin ;

S.E. Roch Marc Christian Kabore, Président du Burkina Faso ;

S.E. Alassane Ouattara, Président de la République de Côte d’Ivoire ;

S.E. Adama Barrow, Président de la République de Gambie ;

S.E. Nana Addo Dankwa Akufo-Addo, Président de la République du Ghana ;

S.E. Umaro Sissoco Embalo, Président de la République de Guinée Bissau ;

S.E. Georges Manneh Weah, Président de la République du Liberia ;

S.E. Mohamed Bazoum, Président de la République du Niger ;

S.E. Macky Sall, Président de la République du Sénégal ;

S.E. Julius Maada Bio, Président de la République de Sierra Leone ;

S.E.Faure Essozimna Gnassingbe, Président de la République togolaise,

S.E. Yemi Osibanjo, vice-président de la République fédérale du Nigeria ;

S.E. Belarmino Monteiro Silva, Ambassadeur du Cabo Verde auprès de la République fédérale du Nigeria

République fédérale du Nigeria,

Ont également participé à la session

S.E. Dr Goodluck Jonathan, ancien Président de la République Fédérale du Nigeria et Médiateur de la CEDEAO pour le Mali ;

S.E. Jean-Claude Kassi Brou, Président de la Commission de la CEDEAO ; l’Ambassadeur Bankole Adeoye, Commissaire aux affaires politiques, Commission de l’Union africaine ;

S.E. Mahamat Saleh Annadif, Représentant spécial du Secrétaire général des Nations Unies pour l’Afrique de l’Ouest et le Sahel (UNOWAS) ;

El-Ghassim Wane, chef de la MINUSMA au Mali.

Les Chefs d’Etat et de Gouvernement ont pris note du rapport de S.E. Dr Goodluck Jonathan, ancien Président de la République Fédérale du Nigeria et Médiateur de la CEDEAO pour le Mali et du Mémorandum sur la situation politique au Mali présenté par S.E. Jean-Claude Kassi Brou, Président de la Commission de la CEDEAO. La conférence a salué la qualité des rapports et des recommandations qu’ils contiennent.

La conférence , après délibérations, a constaté avec regret l’incapacité des autorités de la Transition au Mali à organiser les élections présidentielles avant le 27 février 2022, contrairement à l’accord conclu avec la CEDEAO le 15 septembre 2021 et à l’engagement pris dans la Charte de la Transition. La conférence déplore profondément le manque évident et flagrant de volonté politique des autorités de la Transition qui a conduit à l’absence de tout progrès tangible dans la préparation des élections, malgré la volonté de la CEDEAO et de tous les partenaires régionaux et internationaux d’accompagner le Mali dans ce processus.

La conférence prend note des conclusions des Assises Nationales de la Refondation (ANR) du 13 décembre 2021, ayant conduit à l’adoption d’un Chronogramme sur la Transition au Mali. La conférence a noté que plusieurs acteurs importants n’ont pas participé à ces ANR. Le chronogramme soumis le 31 décembre 2021 par les autorités de la transition au Président de la Conférence des Chefs d’Etat et de Gouvernement de la CEDEAO, prévoit la tenue d’élections présidentielles d’ici fin décembre 2026. Cela impliquera une période de transition de six ans et demi (6,5).

La conférence estime que le chronogramme proposé pour une transition est totalement inacceptable. Ce chronogramme signifie simplement qu’un Gouvernement de transition militaire illégitime prendra le peuple malien en otage pendant les cinq prochaines années. La conférence réitère son appel aux autorités de la transition pour qu’elles se concentrent sur les activités visant à un retour rapide à l’ordre constitutionnel et reporter les réformes clés aux institutions légitimes élues qui seront établies après les élections.

Compte tenu de ce qui précède, la conférence décide de maintenir les sanctions initiales déjà imposées au Mali et aux autorités de transition. La conférence décide également d’imposer des sanctions économiques et financières supplémentaires, conformément à ses délibérations lors de la soixantième session ordinaire tenue le 12 décembre 2021 à Abuja, République fédérale du Nigeria.

Ces sanctions supplémentaires comprennent :

a) La fermeture des frontières terrestres et aériennes entre les pays de la CEDEAO et le Mali ;

b) La suspension de toute transaction commerciale entre les pays de la CEDEAO et le Mali, à l’exception des produits suivants : les biens de consommation essentiels ; les produits pharmaceutiques ; les fournitures et équipements médicaux, y compris les matériaux pour le contrôle du COVID-19 ; les produits pétroliers et l’électricité ;

c) Gel des avoirs de la République du Mali dans les banques centrales et commerciales de la CEDEAO ;

d) La suspension du Mali de toute assistance financière des institutions financières de la CEDEAO (BIDC et BOAD).

Ces sanctions seront mises en œuvre immédiatement et resteront en vigueur. Les sanctions seront progressivement levées seulement après la finalisation d’un chronogramme acceptable et convenu et le suivi des progrès satisfaisants réalisés dans la mise en œuvre du chronogramme pour les élections.

Par ailleurs, compte tenu de l’impact potentiellement déstabilisant sur le Mali et sur la région, créé par cette transition au Mali, la Conférence décide d’activer immédiatement la Force en attente de la CEDEAO, qui devra être prête à toute éventualité.

La conférence appelle l’Union africaine, les Nations unies et les autres partenaires à soutenir le processus d’application de ces sanctions et à continuer à apporter leur soutien à une transition politique acceptable.

Malgré le démenti du gouvernement malien de transition, la reste profondément préoccupée par le rapport cohérent sur le déploiement d agents de sécurité privés au Mali avec son impact potentiellement déstabilisant sur la région de l’Afrique de l‘Ouest. La conférence note que cette situation est étroitement liée à l’enlisement de la transition politique dans le pays.

Les Chefs d’Etat et de Gouvernement expriment leur profonde gratitude à S.E. Nana Addo Dankwa Akufo-Addo, Président de la République du Ghana et Président de la Conférence des Chefs d’Etat et de Gouvernement de la CEDEAO, pour son leadership dans la réussite du Sommet.

Fait à Accra, le 9 janvier 2022

Dominique Koné
Kaceto.net