Intronisé fin juillet 2021, le nouveau chef de Ziniaré, Naba Saneem entend ouvrir une nouvelle page dans l’administration de son royaume en y associant toutes les couches socio-professionnelles, le tout dans une philosophie qui réconcilie modernité et tradition.

Absents du pays lors de son intronisation fin juillet 2021, mon ami et frère, Georges Guiella et moi, sommes allés hier 18 février 2022 rendre nos hommages au Naba Saneem (l’or) de Ziniaré alors que son premier Naba Basga bat son plein depuis le 14 février, le clou de cette fête coutumière étant prévu demain dimanche.
Dans la cour royale, on s’affaire à mettre la dernière main sur les installations devant accueillir les invités et la population. Le chef enchaine les audiences. A notre arrivée, il s’entretenait avec les représentants de la communauté musulmane, venue aussi lui rendre hommage dans un syncrétisme religieux qui réconcilie l’homme noir avec ses origines et la pratique des religions qui se sont imposées à lui dans l’histoire.
Naba Saneem est un chef décomplexé qui entend incarner à sa manière, la tradition et la modernité, faire le lien entre le particulier et l’universel dans une démarche d’ouverture et de tolérance. Si les religions importées ont leur place dans l’Oubritenga, c’est que, dit-il, le Mogho l’a voulu. Pas question donc d’ostracisme entre filles et fils de la terre d’Oubri pour divergence de croyances.
Après les musulmans, il rejoint les membres de la Communauté chrétienne de base (CCB) dont il fait partie pour une prière. Ses coreligionnaires sont venus prier et demander à Dieu de veiller sur lui afin qu’il accomplisse sa mission dans la justice, l’équité, la paix et qu’il protège sa population. Une démarche que Naba Saneem a appréciée et rappelé qu’il ne pourrait réussir sa mission sans le soutien de tous.
Il nous reçoit ensuite pour quelques minutes d’entretien. Nous lui expliquons les raisons de notre présence dans son palais, le félicitons pour son intronisation et lui souhaitons plein succès dans la mission qui est désormais a sienne. Nous lui avons aussi indiqué notre disponibilité à l’accompagner du mieux que nous pouvons dans l’exercice de ses fonctions.
En attendant de pouvoir s’entretenir plus longuement avec lui sur l’histoire de l’Oubritenga et les moyens dont il compte mobiliser pour une bonne administration de son royaume, nous lui demandons un rappel sur les trois noms de règne qu’il a choisis et qui donnent un sens à son intronisation en tant que chef. Car, le processus qui abouti à l’intronisation est tout sauf un fleuve tranquille. Les prétendants au règne ne se font pas cadeaux et il faut avoir assister à la cérémonie d’intronisation dans la cour du Mogho Naba à Ouagadougou pour comprendre que ne devient pas chef qui veut.
La règle veut que le nouveau chef choisisse trois noms sous lesquels il compte régner. Le premier, explique Naba Saneem, " c’est pour remercier celui qui t’a choisi pour être intronisé car, quand on va pour l’intronisation, c’est un combat, une rencontre de princes tous prétendants au trône. Et quand sa Majesté le Mogho Naba te choisit, il faut un nom pour le remercier". Pour son premier nom, il s’appelle Naba Simbdo, c’est à dire, des semis au flan d’une colline. Beaucoup n’y voient aucune chance qu’ils fleurissement et à la surprise générale, ils portent d’abondants fruits qui font plier les branches. Sus aux sceptiques !
Le deuxième nom, qui est en réalité un nom de guerre est une mise en garde contre les perdants qui seraient tentés se mettre en travers de sa route. Tiens, tiens ; ça rappelle quelque chose de déjà entendue depuis quelques semaines.
" Quand tu partais à la conquête du trône, des gens n’étaient pas d’accord avec toi, mais comme tu as atteint ton objectif, tu dois leur envoyer un message et leur dire de s’aligner désormais derrière toi. Attention, il n’y a plus de divergence et on ne joue pas avec le pouvoir" explique Nana Saneem. Son deuxième nom est "Guiguimpoolé", le jeune lion plein de force qui surveille son troupeau. "En considérant la population comme notre troupeau, je suis le jeune lion qui surveille son troupeau et gare à l’hyène qui va oser s’attaquer à ce troupeau", poursuit le chef.

Le troisième nom qui est le nom de baptême est en réalité le nom de règne. Le jeune chef de Ziniaré a pris le nom de Naba Saneem (or). "La canne en or qui est à l’abri des termites et de l’oxydation, mais il faut toujours compter sur Dieu car quelque soit ta force et ton rayonnement, il faut compter sur les notables, les personnes âgées. Sans eux, même si tu es de l’or, tu ne seras jamais à l’abri des termites et de l’oxydation", décrypte Naba Saneem, qui a placé son règne sous le signe de la cohésion sociale, du vivre ensemble et du retour à la source.
Naba Saneem n’a pas une idée précise sur la taille de la population dont il a désormais la charge pour la simple raison que, selon lui, quand on parle de l’Oubritenga, il y a des choses qu’il faut corriger car du point de vue de la coutume, Ouagadougou est dans l’Oubritenga. Et "ce qu’on oublie ou ne veut pas reconnaitre, c’est que Guilongou est la source de tout. Tout est parti de Guilongou et c’est là que le Mogho a commencé". Nous y reviendrons !

Joachim Vokouma
Kaceto.net