Le premier ministre burkinabè, Me Apollinaire Kyelem de Tambéla a prononcé ce matin devant l’Assemblée législative de Transition son discours sur l’état de la nation.
Un discours qui a duré une cinquantaine de minutes dans lequel il s’est exprimé sur la situation nationale marquée par la crise sécuritaire.
Tous les secteurs de la vie politique, économique été sociale ont été passés au peigne, de la Santé à l’éducation en passant par les infrastructures, la sécurité, la prise en charge des Personnes déplacées internes et la transformation de l’économie, rien n’a été oublié.
Le gouvernement sera à présent interpellé par les députés avant qu’il n’apporte les réponses.
Discours sur la situation de la nation
Excellence, monsieur le président
Honorables députés
1- Il y a de cela six mois, j’étais ici-même, devant vous pour vous présenter
mon Discours de politique générale. Six mois dans la gestion d’un État, ce n’est
pas grand-chose. Mais six mois dans la gestion d’un État en crise sont très
exigeants. À un moment où l’existence même de l’État, de la nation, du pays est
menacée, au moment où nos cultures, nos croyances, nos espérances, notre
identité sont ébranlées, chaque jour peut paraître une éternité.
2- Chaque jour est un champ de bataille, et à chaque crépuscule on compte les
victoires et on dénombre les défaites. Quand on est au milieu du combat, dans un
champ de bataille très mouvant, où l’ennemi peut aussi bien être celui qui est en
face que celui qui est à côté ou juste derrière, on peut ne pas avoir le temps de
philosopher ou de se préoccuper du train-train quotidien des sans-soucis.
Excellence, monsieur le président !
3- Vous avez souvent été à nos côtés. Vous êtes un témoin privilégié de
l’engagement du président de la Transition et du Gouvernement dans ce combat
que nous menons pour que le Burkina retrouve son intégrité, pour que les
Burkinabè retrouvent, non seulement la paix, mais aussi la joie de vivre dans la
prospérité, dans un pays sécurisé, envié et enviable.
4- Nous avons passé des nuits sans sommeil, secoués par les multiples
soubresauts qui nous parviennent des quatre coins du pays. Dans le même temps,
il nous a fallu revisiter tous les secteurs de l’État, frapper à beaucoup de portes
pour, dans un premier temps, trouver une esquisse de solution à l’insécurité (I),
faire face à la crise humanitaire (II) et ensuite jeter les bases pour une
réconciliation et une refondation consensuelle de la société (IV), sans oublier les
autres secteurs de l’État (III).
I- De la lutte contre l’insécurité et pour l’intégrité territoriale
5- La victoire contre les bandits armés qui infestent le pays ne pouvait se faire
sans une réorganisation des forces de défense et de sécurité, et sans l’acquisition
des équipements adéquats, non seulement contre les bandits armés, mais aussi
contre tous ceux qui s’avèreraient être leurs soutiens, à quelque niveau que ce soit.
6- Dans la réorganisation des forces de défense et de sécurité, pour un meilleur
maillage du territoire, il a été créé trois autres régions militaires, portant le nombre
à six régions militaires. Il a été créé six bataillons d’intervention rapide (B.I.R.),
six légions de gendarmerie, deux nouvelles bases aériennes. Nous avons procédé
au recrutement de six mille (6 000) soldats, et de cinq mille (5 000) autres en cours
actuellement. Il a enfin été procédé au recrutement de cinquante mille (50 000)
volontaires pour la défense de la patrie (V.D.P.) Le nombre des VDP est appelé à
croître de sorte à être en mesure d’assurer la sécurité, même dans les coins les plus
reculés du pays.
7- Pour l’acquisition des équipements militaires, nous avons été confrontés à
la réalité des faits. Des partenaires qui, pourtant, font des affaires au Burkina Faso,
ont refusé de nous vendre des armes, pire, certains partenaires ont même dissuadé
d’autres de le faire. Alors nous avons été confrontés à cette douloureuse question :
que vaut une amitié quand, au moment le plus critique de votre existence, le
prétendu ami refuse de vous tendre une main secourable, alors même que ladite
main secourable est censée être rétribuée ?
8- Sous d’autres cieux, ces mêmes partenaires qui nous ont tourné le dos ont,
du jour au lendemain, convoyé des quantités considérables d’armes, pour voler au
secours de certains pays. Voudrait-on alors sacrifier les Burkinabè, pour ensuite
se répartir le territoire et ses richesses avec les bandits armés ? C’est là une
question légitime. Ne sommes-nous pas des humains comme les autres ? En tout
cas pas à leurs yeux, tel qu’on le constate. Au-delà du Burkina Faso, les Africains
doivent apprendre à se poser les vraies questions quant à leurs relations avec le
reste du monde.
9- Pour notre part, très vite nous avons compris que le salut du pays réside
dans la diversification des partenariats. Nous avons compris qu’il fallait aller, au
besoin au-delà de l’horizon, pour explorer de nouvelles pistes, non seulement pour
la survie du pays, mais aussi pour l’émancipation de nos populations. Cela nous a
conduits au renforcement de nos relations avec la Russie, la Chine, la Turquie,
l’Iran, la Corée du Nord, le Venezuela.
10- Les discussions se poursuivent avec d’autres pays. Il nous faut avoir une
diplomatie à la fois réaliste et conquérante. Je saisis cette opportunité pour traduire
toute ma reconnaissance aux autorités de la Fédération de Russie qui nous ont
réservé un accueil chaleureux lors de notre passage à Moscou. Je salue également
la République populaire de Chine pour son engagement à nos côtés en ces
moments difficiles. Je salue la Turquie qui ne ménage aucun effort pour nous
soutenir. Bien que ce pays ait connu récemment des catastrophes naturelles sans
précédent.
11- Observons une minute de silence et de prière pour les victimes du
terrorisme au Burkina Faso, au Mali, au Niger, et pour les victimes des séismes
en Turquie et en Syrie.
12- Ma reconnaissance va également à l’endroit du Guide suprême de la
République islamique d’Iran, et au président iranien, pour l’intérêt qu’ils portent
au Burkina Faso. Je reviens du Venezuela où les autorités du pays ont réservé un
accueil exceptionnel à moi-même et à ma délégation, au nom du pays que nous
représentons, et de l’engagement de ses dirigeants. De nouvelles pistes de
coopération, dans pratiquement tous les domaines, s’ouvrent à nous, pour nos
populations, pour nos hommes et femmes d’affaires. À nous de savoir être à la
hauteur des nouveaux défis.
13- Avec les nouveaux partenariats, et la redéfinition souveraine de notre
diplomatie, nous avons pu, sans complexe, non seulement acquérir les
équipements nécessaires pour nos armées et nos V.D.P., mais trouver des
solutions pour nos débouchés et nos approvisionnements. Désormais, les relations
entre le Burkina Faso et ses partenaires se font dans un climat de confiance et de
respect mutuel. Rien ne peut nous être imposé. L’histoire étant faite de
vicissitudes, peut-être qu’un jour le Burkina Faso se soumettra encore au dictat de
quelque puissance étrangère. Mais, ce sera après nous. Pas avec nous. Nous
pouvons nous tromper, mais nous agirons toujours en toute souveraineté, à l’aune
des intérêts du Burkina Faso.
14- Une précision est nécessaire. Quand le capitaine Ibrahim Traoré est arrivé
au pouvoir, il s’est trouvé confronté à la réalité. Il n’est pas exagéré de dire que le
pays n’avait pas une armée digne des défis du moment. Non seulement les
effectifs étaient réduits par rapport aux défis à relever, mais la motivation des
forces combattantes était affaiblie par manque de leadership.
15- En outre, les éléments qu’on envoyait sur les champs de bataille, parfois ne
se connaissaient même pas. Dans la même unité, personne ne savait de quoi l’autre
était capable. Il était donc difficile de parler de complicité et de coordination pour
des objectifs déterminés. De surcroît, l’armement faisait défaut, et le stock
disponible était mal entretenu et mal géré. La situation était telle qu’il n’y avait
qu’une arme individuelle pour trois, parfois pour cinq dans l’armée, et pire au
niveau des forces de sécurité intérieure. Les soldats se passaient les armes, parfois
défectueuses, à tour de rôle, pour aller au front. Comment dans ses conditions être
efficace ?
16- Il a fallu donc rapidement trouver une solution au manque d’équipement.
Actuellement, grâce à l’entregent du président Traoré, chaque soldat peut avoir
son arme et ses munitions, de même que chacun des V.D.P. et les forces de
sécurité intérieure. Les dotations ont commencé et se poursuivent. Non seulement
des équipements ont été acquis, mais ils ont été acquis à des coûts relativement
faibles.
17- Alors que les factures d’achat d’armes que nous avons trouvées étaient
excessivement chères, nous avons pu, avec nos nouveaux partenariats, acquérir
en toute transparence, des armes performantes cinq à dix fois moins chères. Ce
qui nous permet d’avoir une plus grande quantité d’armes efficaces avec moins
d’argent. Et surtout de mieux utiliser l’argent du contribuable.
18- Il s’agit maintenant de constituer une vraie armée avec des unités
combattantes organisées, composées d’éléments qui se connaissent, qui
connaissent les forces et les faiblesses des uns et des autres, qui savent à quel
moment on peut avoir recours à un tel plutôt qu’à tel autre. Des unités qui vont
fonctionner en parfaite complicité pour des objectifs partagés.
19- La machine est déjà en marche. De ce fait, personne aujourd’hui, à moins
d’avoir perdu le sens des réalités, ne peut nier l’évidence. La peur a changé de
camp. Les bandits armés reculent partout sur le territoire où nos forces
combattantes mettent le pied. Qu’ils se le tiennent pour dit, la puissance de feu de
notre armée va encore croitre, et même de façon exponentielle, une fois que toutes
les commandes auront été livrées. Il faudra qu’à l’avenir, le Burkina devienne une
citadelle imprenable pour tous ceux qui rêveraient de porter atteinte à son
intégrité, à sa sécurité et à sa souveraineté. Il reviendra aussi aux Burkinabè de
savoir protéger et défendre leur armée. De ne plus permettre qu’un autre régime,
sous quelque prétexte que ce soit, procède au démantèlement de leur armée.
20- Ce sont les épreuves qui fortifient les nations. Toutes les grandes nations
sont passées par des épreuves qui ont renforcé en eux le désir de rester ensemble.
Ces épreuves que nous vivons ne doivent pas être perçues comme une fatalité.
Elles doivent plutôt nous fortifier et faire de nous une grande nation. Le terrorisme
qui nous a été imposé, a fait comprendre à tous les Burkinabè, qu’ils soient du
Nord ou du Sud, de l’Ouest ou de l’Est, qu’ils ont un même destin et un même
territoire à défendre.
21- Quand les bandits font irruption dans une localité, tout le monde subit le
même sort, que l’on y soit venu du Nord ou du Sud, de l’Ouest ou de l’Est. Que
l’on soit musulman, traditionnaliste ou chrétien. Que l’on soit alphabétisé ou
analphabète. C’est le même destin pour tous face à ce terrorisme. Bientôt il sera
vaincu et notre nation, j’en suis certain, en sortira renforcée. Ceux qui nous l’ont
imposé s’apercevront, malgré eux, qu’ils auront abouti à l’effet inverse.
22- Il y en a qui parlent de négocier avec ces hordes terroristes. Je suis tenté de
dire que ce qui se ressemble s’assemble. Ils ont sans doute des intérêts communs.
Chacun peut négocier avec qui il veut, au nom des intérêts qu’il défend. Pour
nous, il n’y a pas de négociation possible avec l’immoralité. La seule négociation
qui vaille avec les bandits armés est celle qui se fait actuellement sur le champ de
bataille. Nous ne négocierons jamais, ni l’intégrité territoriale du Burkina Faso,
ni sa souveraineté. Nous défendrons notre territoire et nos populations coûte que
coûte. Qu’on se le tienne pour dit.
23- Notre ambition est de porter le nombre des V.D.P. à cent mille (100 000)
et même au-delàs, afin que les populations, en tout temps, soient en mesure
d’assurer elles-mêmes leur propre sécurité. À cet effet, il a été mis en place un
Fonds de soutien patriotique (F.S.P.) À ce jour, les sommes réunies dans ce fonds
s’élèvent à plus de dix milliards F CFA. Un état sera fait bientôt, en début juin, à
la prochaine rencontre du Comité de suivi. J’invite les Burkinabè à s’approprier
ce fonds qui peut être un des leviers de notre volonté de construire une économie
nationale indépendante.
24- C’est le lieu ici de saluer les autorités du Mali qui nous ont été d’un secours
inestimable dans la lutte contre le terrorisme. Dans l’épreuve, les deux armées ont
appris à coordonner leurs opérations pour plus d’efficacité. Cette expérience à
renforcer notre conviction que pris isolément, nos petits États sont très fragiles,
surtout face aux grands ensembles qui existent ou qui sont en formation.
25- Nous avons perçu notre communauté de destin à travers la lutte contre le
terrorisme. Nous pensons donc, qu’au-delàs de la simple coopération entre États,
qui est fonction des humeurs des chefs d’État et des régimes en place, il nous faut
oser inventer un autre avenir pour la postérité, en engageant un processus de
fédération avec le Mali, et la Guinée.
26- La plus ancienne fédération au monde, la Confédération helvétique, s’est
constituée à la suite de problèmes de sécurité. De même les États-Unis
d’Amérique ont vu le jour quand les treize États ont pris conscience que pris
isolément, ils ne pouvaient venir à bout de la puissante armée anglaise. Mais qu’en
conjuguant leurs efforts, ils pouvaient atteindre leurs objectifs. Et c’est ce qui fut,
donnant ainsi naissance aux États-Unis d’Amérique.
27- Nous entendons les sarcasmes des petits esprits incapables de grandeur, et
de tous ceux dont l’intérêt n’est pas dans la grandeur de nos peuples. Mais nous
sommes là pour oser inventer l’avenir. Pour être grand, il faut avoir des rêves de
grandeur. Nous invitons nos peuples à ces rêves. Il nous suffit de montrer la voie,
et il reviendra aux peuples d’écrire leur histoire.
Excellence ! Honorables députés !
28- Dès que nous avons émis l’idée d’une fédération avec le Mali, les forces
obscurantistes ont vite fait de susciter, aussi bien au Mali qu’au Burkina, des
éléments à leur solde pour étouffer l’idée dans l’œuf. Ainsi le projet a-t-il été traité
de tous les noms, et surtout d’échappatoire pour cacher un manque de programme
du Premier ministre burkinabè. Les petits esprits, je le répète, sont incapables de
rêver grand. Ils ont même peur de ce qui est grand, car cela les fait trembler sur
leur fragile base.
29- Quant à nous, nous sommes des conquérants de l’impossible. Nous sommes
des bâtisseurs de l’avenir. Comme disait Thomas Sankara, il faut oser inventer
l’avenir. Nous ne sommes pas sûrs de réussir, car les obstacles sont nombreux, et
des puissances étrangères, avec leurs complices à l’intérieur, intriguent dans
l’ombre pour nous faire échouer. Mais, on ne pourra pas nous reprocher de n’avoir
pas essayé. Nous refusons le fatalisme. Ce que nous n’aurons pas réussi, d’autres
reprendront le flambeau.
Excellence ! Honorables députés !
30- Vous êtes témoins que le 19 novembre 2022, j’ai présenté devant vous, ici
même, mon Discours de politique générale et d’engagement patriotique. Je
demande à la population de s’en approprier et de le transformer en réalité. En tout
cas, le Gouvernement s’y est engagé.
II- De la réponse à la crise humanitaire
Excellence ! Honorables députés !
31- Les bandits armés, dont les soutiens extérieurs et les complices s’évertuent
à trouver d’autres qualificatifs, en vue de l’atteinte de leurs funestes entreprises,
ont contraint des milliers de personnes à l’exil dans leur propre pays. Des centres
de santés, des écoles, des récoltes ont été brûlés, saccagés, pillés. Ces exilés sont
connus sous le nom de personnes déplacées internes (P.D.I.) et sont pris en charge
progressivement, du mieux que l’on puisse, par le Gouvernement et ses
partenaires, mais aussi, il faut le souligner, avec l’appui des fils et filles du pays
qui ne cessent de faire des dons pour leurs frères et sœurs déplacés. Il convient
cependant de noter que des salariés ont même été enregistrés dans le rang des
P.D.I., de même que des personnes ne répondant en rien aux critères de P.D.I.
C’est par exemple le cas de ceux qui ont vendu leur terre et qui, n’ayant plus rien,
se font enregistrer comme P.D.I.
32- Pour prévenir des abus, des comités mixtes de veille, composés de
représentants de P.D.I. et de la communauté hôte, sont mis en place pour assister
les équipes d’enregistrement. Grâce aux efforts consentis, selon un décompte non
exhaustif, à la date du 23 mai 2023, plus de 20 457 ménages, comprenant plus de
125 227 personnes, sont retournés dans leur localité d’origine. Des instructions
ont été données de tenir compte des imperfections dans les enregistrements, pour
établir un décompte plus réaliste du nombre des P.D.I.
Chacun est témoin de ce que des personnes déplacées internes se trouvant
dans des localités difficiles d’accès ont été ravitaillées en produit de première
nécessité, par des opérations spéciales terrestres et aériennes. On peut citer entre
autres Djibo, Solhan, Sébba, Seytenga, Sollé, Kalsaka, Kelbo, Bourzanga et j’en
passe. À ce titre, 21 494 tonnes de vivres ont ainsi été livrées. Pour la saison
pluvieuse qui s’annonce, des projets sont initiés pour procurer de meilleurs abris
aux déplacés et assurer leur insertion dans l’agriculture et l’élevage.
Excellence, monsieur le président
34- C’est dans ce cadre que dans le but d’accompagner l’Exécutif, vous-même
avez initié un projet de construction d’urgence d’abris pour les P.D.I. de la Boucle
du Mouhoun, du Centre-Nord, de l’Est et du Sahel. Et cela se fait de concert avec
le Gouvernement.
35- Il convient d’ailleurs de noter que la mise en œuvre du plan opérationnel
d’appui à la campagne sèche 2022-2023, d’un coût global de plus de Onze
milliards F CFA a permis d’occuper certains déplacés internes et aussi
d’approvisionner les marchés en produits de contre-saison.
36- Il a également été lancé, à partir de cette saison humide, l’Initiative
présidentielle pour la production agricole. Elle englobe plusieurs projets qui vont
impliquer, non seulement les forces de défense et de sécurité et les volontaires
pour la défense de la patrie, pour la production et la sécurisation des sites, mais
aussi les P.D.I., les populations hôtes, et le milieu carcéral. À ce titre, plusieurs
sites ont été identifiés, et les travaux ont déjà commencé pour la mise en valeur
de plus de onze mille (11 000) hectares. Les aménagements sont prévus pour
assurer également la production irriguée en saison sèche.
37- Dans le cadre de l’exécution du plan de réponse et de soutien aux personnes
vulnérables à l’insécurité alimentaire et à la malnutrition, d’un coût de Deux cent
trente-huit (238) milliards F CFA, le Gouvernement a apporté assistance à plus de
Trois millions de personnes grâce à un financement cumulé de l’État et des
partenaires humanitaires.
38- En ce qui concerne les élèves affectés par le terrorisme, l’exécution de la
stratégie d’éducation en situation d’urgence a permis la rescolarisation de
nombreux élèves déplacés internes, et leur accompagnement par des bourses, des
kits et la prise en charge des frais de scolarité.
39- La mise en œuvre de certains projets de stabilisation comme le Programme
d’urgence et de développement territorial (PUDTR), le Projet communautaire de
relèvement et de stabilisation du Sahel (PCRSS), et le plan de stabilisation de
l’axe Ouaga-Kaya-Dori ont permis de doter les communautés d’ouvrage
d’adduction d’eau potable, d’assainissement, de formations sanitaires, et de
financer des micro-projets agro-pastoraux des jeunes et femmes déplacés internes.
Avec l’opérationnalisation du Centre opérationnel de veille, d’alerte et de
coordination des opérations de secours (COVACOS), et la poursuite de la mise
en place des Plans ORSEC dans les provinces, les actions en matière de protection
civile vont se poursuivre.
III- Les autres secteurs de l’État
Excellence ! Honorables députés !
40- L’action de mon Gouvernement a aussi porté sur d’autres secteurs. La
réforme du système éducatif est ainsi engagée pour le conformer à nos valeurs, à
nos aspirations, et au modèle de société qui nous convient. Et ce, dans l’esprit du
Discours de politique générale, d’orientation et d’engagement patriotique. C’est
actuellement le cheval de bataille des ministres de l’Éducation nationale en charge
de la formation professionnelle, et de celui en charge de l’Enseignement
supérieur. Vous n’ignorez pas l’ampleur de la tâche. Il faut former du personnel,
recycler certains, concevoir des ouvrages, réadapter l’existant. Mais la volonté y
est, malgré la rareté des moyens financiers dont l’essentiel est orienté vers la
formation du personnel de combat et l’acquisition de matériels de combat.
41- Pour ce qui est de la Justice, le palais de justice de Bobo-Dioulasso qui avait
été saccagé lors de l’insurrection populaire de 2014 est en réfection, et nous
pensons le remettre bientôt à la disposition des justiciables. Des locaux ont été
trouvés pour le fonctionnement de la cour administrative d’appel de
Ouagadougou, et un nouveau bâtiment est en chantier pour accroître les capacités
de la cour d’appel de Ouagadougou. Nous étudions la possibilité de la mise en
place d’une forme de justice communautaire, pour désengorger les tribunaux, et
rendre la justice plus accessible.
42- La lutte pour la bonne gouvernance et contre la corruption est engagée. Il
est difficile de contester la volonté du Gouvernement sur ce point. Ceux qui
pensent que la lutte contre la corruption n’est pas engagée, ou qu’il y a des
corrompus en liberté sont vivement invités à apporter leur concours. Ils peuvent
saisir les institutions de l’État, et même la Primature qui fera suivre, si elle estime
les éléments assez sérieux.
43- Nous recevons des plaintes et des dénonciations, souvent anonymes. Ce qui
ne permet pas de contacter les auteurs pour d’éventuels éclaircissements. Il ne
s’agit pas d’imaginer ou de supposer des faits de corruption, mais d’apporter les
preuves pouvant permettre à la justice de faire son travail. Chacun sait que seules
des preuves ou des indices sérieux et concordants permettent de mettre quelqu’un
en cause sans tomber dans l’arbitraire. Dans ce domaine nous attendons donc la
contribution de tous.
44- Dans le cadre de la réduction du train de vie de l’État, nous avons voulu
commencer par le sommet de l’État pour donner l’exemple. Ainsi, le chef de l’État
a renoncé à son traitement mensuel pour ne conserver que son traitement de
capitaine. Cette décision il la prise avant même la formation du premier
Gouvernement. Les ministres ont renoncé à la moitié de leur traitement en
revenant sur la rémunération antérieure à l’augmentation opérée sous le régime
du président Damiba. En outre, sur le premier mois, 50% du traitement de chaque
ministre a été reversé au Fonds de soutien à la patrie. En outre, tout au long de
cette année, chaque ministre a décidé librement de reverser un pourcentage de son
traitement au Fonds de soutien patriotique. L’ensemble des mesures préconisées
dans le cadre de la réduction du train de vie de l’État ont permis jusque-là une
économie d’environ vingt-deux milliards de francs.
45- Dans le domaine de la santé, il faut souligner la réouverture du centre de
radiothérapie qui avait été fermé pour des motifs qui nous échappent. Il y est prévu
la gratuité des soins pour une catégorie de malades. La construction de l’hôpital
de référence de Bobo-Dioulasso est entamée avec les partenaires chinois et assez
avancée. Le financement de la construction de l’hôpital de Gaoua est acquis, et
celui de Fada N’Gourma est en phase d’être bouclé. Le recrutement de quinze
mille agents de santé communautaire contribuera à l’amélioration de la santé à la
base.
46- Au niveau des infrastructures routières, outre les travaux de réhabilitation
ou de bitumage en cours ou déjà réalisés, un maillage du territoire en routes
bitumées est en projet avancé. L’objectif est de rendre tous les centres importants
accessibles pour faciliter la circulation des biens et des personnes. Il sera question
pour nous de faire du bitume en multicouches capables de résister au temps.
47- Nous avons ainsi en vue la route Gounghê-Fada-frontière du Niger qui,
pour faciliter le trafic, sera sans doute d’abord réhabilitée, avant d’être
entièrement reprise de façon définitive. Il y a aussi, entre autres, les routes FadaBogandé, Tougan-Lanfiéra, Koudougou-Solenzo, Dori-Gorom, Zorgho-Mégué,
Gaoua-Batié, Ouahigouya-Djibo, Kalwartenga-Boulsa, Dandé-Kourouma qui
devront être bitumées. Les négociations sont en cours avec nos partenaires chinois
pour le financement du tronçon Banfora-Gaoua. La route Dori-Sébba est aussi à
l’étude. Nous avons également en vue la réhabilitation des tronçons Pâ-DanoDiébougou et Bobo-Orodara dont les travaux sont déjà en cours.
48- Des travaux sont prévus à Ouagadougou et à Bobo-Dioulasso pour
fluidifier le trafic. À titre d’exemple, toutes les voies de sortie de Ouagadougou
sont concernées et seront élargies en deux fois deux voies là où ce n’est pas le cas.
Les travaux ont déjà commencé sur la sortie Est de Ouagadougou. De miniéchangeurs dans les principaux carrefours de Ouagadougou sont à l’étude.
Plusieurs infrastructures du même type sont en étude à Bobo-Dioulasso pour
soulager les usagers.
49- Dans le domaine des transports, l’étude du projet de chemin de fer BoboDioulasso-Sikasso est engagée, ainsi que d’autres lignes à travers le pays. Nous
ne perdons pas de vue la ligne Accra-Ouagadougou, de même que celle de Lomé
Ouagadougou. Les Ghanéens et les Togolais y sont aussi intéressés.
50- L’aéroport de Bobo-Dioulasso est maintenant fonctionnel 24h/24, et
répond aux normes internationales. Des études sont en cours pour en faire un
grand aéroport de référence en Afrique de l’Ouest. Nous cherchons aussi à trouver
une solution durable pour Air Burkina. Nous sommes également en pourparlers
avec d’autres compagnies aériennes. Nous explorons toutes les possibilités pour
un meilleur désenclavement et un meilleur rayonnement du Burkina Faso.
51- Pour l’affirmation de notre identité, et pour encourager la production locale,
les artisans et les créateurs, un décret portant sur le port du Faso dan fani et le
Kokodonda a été adopté lors du Conseil des ministres de Bobo-Dioulasso le 28
avril dernier. Il encadre et stimule l’usage de la cotonnade locale dans la
confection des vêtements. Tous les corps de la société sont concernés. Un forum
sur la « Problématique de l’accessibilité financière du Faso dan fani » s’est tenu
le 19 mai dernier pour envisager les pistes possibles de vulgarisation de ce produit
national.
52- À partir des conclusions du Forum, un groupe de travail proposera un plan
d’action opérationnel engageant toutes les parties prenantes à trouver des
solutions à la contrainte d’accessibilité financière du Faso dan fani. À terme, il
s’agira de voir les toges des enseignants d’université et des agents du monde
judiciaire, de même que les blouses des médecins et du personnel soignant, et les
tenues de cérémonies des F.D.S. en Faso dan fani.
53- Nous avons en projet la labellisation des produits locaux. Ce qui
contribuera à établir un label de qualité et rendra nos produits compétitifs. De ce
fait, les produits étrangers similaires qui ne correspondraient pas à ce label de
qualité ne seront pas acceptés. Nos produits seront ainsi mieux protégés.
54- En matière immobilière, une loi sur la promotion immobilière est en
discussion au niveau de votre Assemblée. Elle vise à réorganiser le secteur en y
mettant de l’ordre, en redéfinissant sa mission. Nul ne peut contester que nos
villes, surtout les plus grandes comme Ouagadougou et Bobo-Dioulasso
s’étendent à l’infini. Ce qui rend difficile toute maîtrise de leur développement,
de leur assainissement, et de leur encadrement. Si l’extension des villes n’est pas
maîtrisée, bientôt il n’y aura plus d’espace pour l’agriculture, pour l’élevage, pour
l’environnement. Il est temps de comprendre qu’il faut construire en hauteur et
contribuer ainsi à l’amélioration du cadre de vie en rendant plus accessibles les
commodités essentielles comme l’eau courante, l’électricité et la voirie.
55- Dans les ressources minières, le Gouvernement a déjà facilité
l’implantation d’une unité de transformation sur place des déchets miniers,
appelés charbon fin. L’objectif à court terme est de construire une raffinerie d’or
afin que l’or extrait puisse être traité sur place. Un contrôle effectif doit être
effectué afin que l’on sache la quantité exacte d’or produite par an. Nous étudions
des mesures contre la contrebande de l’or. Les produits de l’orpaillage ont souvent
tendance à traverser les frontières pour se retrouver dans l’escarcelle de pays
voisins.
56- En ce qui concerne l’entreprenariat des jeunes et l’emploi, plusieurs
mesures sont prises. L’un des faits marquants est la création de l’Agence pour la
promotion de l’entreprenariat communautaire (A.P.E.C.) qui propose un
mécanisme de financement basé sur l’actionnariat populaire, pour pallier les
défaillances du système financier, et contribuer à développer des unités de
transformation des produits locaux.
57- Des réformes portant mesures d’incitations fiscales et douanières, au profit
des petites et moyennes entreprises (P.M.E.), sont également en cours. Ces
mesures permettront, entre autres, d’inciter à la création d’entreprises, à la
formalisation des entreprises, à l’auto-emploi des jeunes et la création d’emploi.
Et aussi de renforcer la compétitivité et la capacité de production des P.M.E.
burkinabè, et d’améliorer la viabilité de ces P.M.E.
58- Le président de la Transition, chef de l’État, a profité de son récent passage
à Fada N’Gourma pour lancer l’initiative bureaux Bilan de compétence et
accompagnement (B.C.A.) au sein des institutions d’enseignement supérieur et de
recherche.
59- En fin avril à Bobo-Dioulasso, le chef de l’État a lancé une initiative
présidentielle de soutien à l’emploi des jeunes et des femmes par la promotion de
l’entreprenariat agro-sylvo-pastoral. L’objectif est d’inciter la jeunesse à
s’investir dans l’entreprenariat agricole dans toutes les régions du pays.
IV- De la réconciliation nationale et de la refondation de l’État
Honorables députés
60- Comme l’on dit, quand on a un bon général, on a de bons soldats. Le bon
général, nous l’avons enfin trouvé, c’est notre président. Avec lui, l’espoir renaît,
et nous sommes convaincus que bientôt, le grand banditisme et l’insécurité ne
seront plus qu’un mauvais souvenir au Burkina. Pour ce qui est de la refondation
de la société, elle consistera d’abord à doter le pays d’une Constitution qui soit le
reflet des aspirations de nos populations. Nul ne peut réellement s’émanciper à
partir des valeurs et des références d’autrui. Sans tomber dans le chauvinisme,
nous devons éviter le mimétisme culturel irréfléchi. Prenons conscience des forces
de nos cultures pour mieux nous projeter sur les autres en toute responsabilité.
61- La réconciliation nationale se fera dans le cadre de cette refondation. D’ores
et déjà, un Comité interministériel a été mis en place le 16 mai dernier pour
examiner spécifiquement le problème de la réconciliation sous l’angle strictement
politique. Une certaine somme a été dégagée pour l’indemnisation des victimes
des violences politiques. Le Comité devra veiller à éviter le cumul des
indemnisations pour les mêmes faits. Car, bon nombre de victimes ont déjà été
indemnisés par le passé. Ne pas tenir compte de cela, créera d’autres injustices.
62- Toutefois, la vraie réconciliation est celle qui consiste à réconcilier la
société avec elle-même, avec son passé et son histoire. La réconciliation entre la
société, son Administration et ses dirigeants. C’est ce à quoi devra s’atteler le
processus de refondation.
Honorables députés !
63- Dans le cadre de la refondation de la société, vous avez bien voulu voter à
l’unanimité la loi sur les Comités de veille et de développement (COVED). Le
décret d’application et le règlement intérieur-type viennent d’être adoptés au
Conseil des ministres de Bobo-Dioulasso le 28 avril dernier. Les COVED seront
des instruments d’organisation et d’encadrement des populations qui se prendront
ainsi en charge à la base. Les COVED contribueront à l’élaboration d’un avantprojet de Constitution. Ils seront des artisans de la lutte contre la corruption, contre
la délinquance et le banditisme, pour l’éducation à la citoyenneté, pour
l’assainissement et pour le développement local. Les COVED seront le reflet de
la société, et la société sera le reflet des COVED.
64- Ayons le courage de tourner le dos au mimétisme servile et aliénant pour
faire face à nous-mêmes et à nos réalités. Les COVED qui sont les moyens
d’expression de la base seront un maillon essentiel dans cette entreprise.
Le Burkina Faso de demain sera-t-il une monarchie, si oui, laquelle ? Sera-t-il une
république, si oui, sous quelle forme ? Ce sera au peuple de décider.
65- Le mimétisme constitutionnel, que je dénonce publiquement depuis plus
d’une vingtaine d’année, a pour corollaire, non seulement le déficit démocratique,
mais aussi le mimétisme de gouvernance qui entraine un dysfonctionnement entre
le peuple et son Administration. Le tout constituant un incubateur de troubles
sociaux qui, tôt ou tard éclateront avec d’autant plus de violence que les réalités
auront été occultées. Dans ce chantier gigantesque de la refondation de la société
qui s’ouvre à nous, tout le monde y est convié. Les COVED seront ainsi les
moyens de la refondation en profondeur de la nation et de l’État burkinabè.
66- La société actuelle est gangrénée par l’affairisme, pour ne pas dire la
cupidité. Depuis la fin de la Révolution démocratique et populaire avec le
président Thomas Sankara, On s’est évertué à inoculer dans les esprits que pour
avoir de la considération, il faut avoir de l’argent. Ainsi, chacun, à quelque poste
qu’il se trouve, fait tout pour capter à son profit le moindre sou dans son
entourage. On passe des nuits à concevoir des stratagèmes pour soutirer l’argent
de l’État, parfois à l’aide de faux projets ou de fausses propositions. L’essentiel
étant de grapiller de l’argent pour pouvoir se parer des oripeaux de l’avoir, et
prétendre à la considération.
67- L’argent est futile et volatile. Il est un moyen et non un socle. Aucune
nation dans l’histoire ne s’est construite et perdurer sur la base de l’argent et de
l’affairisme. Ce sont plutôt les valeurs d’éthique, d’intégrité et de courage qui
unissent les Hommes et créent des nations. Les nations se reconnaissent dans des
héros qui ont illuminé leur époque par leur détermination, leur courage, leur
intégrité.
Excellence ! Honorables députés !
68- On n’a pas besoin d’être riche pour être respecté. La dignité n’est pas un
produit négociable sur le marché de l’insouciance. Elle se vit et se fonde sur des
valeurs humaines et sociales. C’est pourquoi je ne cesse de répéter que même si
le Burkina n’est pas particulièrement riche en ressources naturelles, nous pouvons
faire en sorte qu’il soit respecté et respectable, envié et enviable. Nous pouvons
faire en sorte que le Burkinabè soit digne et fier de lui-même et de sa patrie, avec
le minimum de richesses que regorge notre sol et notre sous-sol. Nous aurons alors
réussi la vraie refondation. C’est vers ce destin que je vous confie.
La Patrie ou la mort, nous vaincrons !
Dr Apollinaire Joachimson KYÉLEM de TAMBÈLA
Premier ministre
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