Cinquième (5è) pilier de l’islam, le pèlerinage à la Mecque ou le Hadj est une obligation pour tout musulman qui a les moyens de l’accomplir. Fouler les terres saintes de l’Arabie Saoudite et marcher sur les pas du prophète Mohamed est un rêve qu’accomplissent, au prix parfois d’énormes sacrifices, des millions de fidèles venus des quatre coins du monde. C’est le cas de Mariam Zerbo, épouse Hien, enseignante d’université et cadre du ministère de l’Economie et des finances, qui a bien voulu partager avec nos lecteurs "ces moments uniques dans la vie du musulman" qu’elle a vécus.

Mariam

De retour de la Mecque, il faut maintenant vous appeler Adja ?

Non, pas du tout. En Arabie Saoudite, Adja signifie étranger ; quand les pèlerins arrivent, on souhaite bonne arrivée aux Adja et aux Ladji. C’est chez nous en Afrique que les gens en ont fait un marqueur social, un prestige, un qualificatif qui donne de la valeur, qui singularise le musulman ayant effectué le pèlerinage. Dans le principe, appeler quelqu’un Adja ou Ladji, ça n’a pas de sens, mais en tenant compte du contexte social africain, oui, ça un sens.
Il faut savoir que dans le temps, des gens sont partis à la Mecque à pied et pour celui qui a effectué ce long voyage aller-retour, il faut un mot particulier pour reconnaître cela. Dans notre pays, on trouve des gens qui, non seulement réclament ce titre, mais exigent qu’il soit mentionné sur leurs documents officiels ! Ainsi, ils se sentent valorisés. Ils ont fait la Mecque et ce n’est pas rien !
En tant que musulmane, c’est une obligation d’accomplir le pèlerinage qui est le 5è pilier de l’islam. C’est prescrit comme une obligation pour tout musulman qui a les moyens de l’effectuer. Evidemment, ce n’est pas à la portée de tout le monde et il faut réunir les conditions financières, mais aussi physiques, car le pèlerinage demande d’être en bonne santé physiquement.

Pourquoi avez-vous éprouvé vraiment le besoin d’aller à la Mecque ?

Je n’y suis pas allée pour satisfaire une simple curiosité, mais pour quelque chose qui est à mes yeux très important moralement et spirituellement. Depuis un bout de temps, je sentais peser sur moi ce besoin d’effectuer le Hadj. Ayant plus de 50 ans, étant enseignante d’université avec un salaire relativement intéressant et étant mère d’enfants qui sont grands, c’était un devoir pour moi qui suis née musulmane, ai reçu une éducation musulmane et ai choisi l’islam comme religion, d’aller sur les pas du prophète Mohamed. C’est un évènement que j’ai préparé depuis trois ans en mettant un peu d’argent de côté. Je ne suis pas riche, mais je ne suis pas non plus dans la situation de quelqu’un qui n’a pas son repas quotidien. Il ne faut pas insulter Dieu.
Me sentant prête, je me suis inscrite cette année sur la liste et je suis partie. Je ne regrette pas ce voyage car aujourd’hui, je me sens comme libérée d’une charge qui pesait sur moi. Je suis à présent une musulmane très heureuse, de même que les membres de ma famille, particulièrement mon père qui a plus de 90 ans.

Pourquoi n’avez-vous pas voyagé avec les vols charters ?

Il y a deux options pour le transport : le charter et un vol régulier d’une compagnie. Pour le charter qui est le plus utilisé par les pèlerins burkinabè, il faut s’inscrire dans une agence. Ceux qui ont obtenu tous les documents de voyage partent tôt et sur place, ont le temps de faire la Oumra qui est la première étape du pèlerinage, puis se reposer avant d’attaquer le programme proprement dit du Hadj.
Etant cadre dans l’administration, je ne pouvais pas prendre le charter parce que je n’avais pas assez de temps ; j’ai donc programmé le voyage sur le restant de mes congés.
L’avion vous dépose à Médine, le lieu où le prophète repose avec deux de ses compagnons et où se trouve la mosquée dans laquelle il est inhumé. J’ai eu l’occasion d’y prier pendant trois jours avant de partir pour la Mecque. Dès cette étape, on découvre l’immensité du monde et la multiplicité des couleurs qui habitent la terre.

C’est-à-dire ?

Je vous le dis, entrer là où le prophète Mohamed est enterré, vous avez des émotions que vous n’aviez jamais eues dans votre vie. Une fois à l’intérieur, on n’a plus envie de sortir et la journée passe sans que vous vous en rendiez compte. En plus, le pèlerinage est assez agrémenté avec la visite de sites touristiques et lieux sacrés dans l’histoire de l’islam. C’est dire que l’étape de Médine est fondamentale. Les femmes n’ont pas accès à la partie de la Mosquée abritant la tombe du prophète. On les autorise juste à s’approcher de la porte et là, elles lèvent leur main pour saluer le prophète et formuler des intentions. Seuls les hommes y ont accès. Cher ami journaliste, ce sont des moments marqués par des frissons qu’on ne peut pas décrire.
Après cette étape, on met le cap sur la Mecque en bus. En cours de route, on fait une escale dans un village qui s’appelle Dhul-Hulayfa à environ 11 km de Médine et qui qui abrite une autre mosquée très importante pour le pèlerin. C’est en même temps une des entrées de la Mecque et c’est là que vous formulez les intentions pour signifier que vous êtes venus pour le pèlerinage. Dès cet instant, vous êtes désormais sacralisés ; vous faites vos ablutions dans cette mosquée et vous priez. Certains pleurent de bonheur en réalisant qu’ils sont bel et bien en train de rentrer effectivement à la Mecque, sur les pas du prophète. Ce sont des moments uniques dans la vie du musulman.

Une fois à la Mecque, étant sacralisés, on a juste le temps de déposer les affaires à l’hôtel et on se rend à la grande mosquée dénommée al-Harâm. C’est le lieu qui abrite la Kaaba. Vous imaginez quelle peut être la joie du pèlerin à ce moment, de se retrouver à côté de la Kaaba en train d’y faire 7 fois le tour et avoir l’occasion d’y porter la main en la touchant. C’est indescriptible. C’est le rêve que nourrit tout musulman parce que c’est un lieu unique au monde et je vous invite, cher journaliste à embrasser la religion musulmane et à s’y rendre. J’ignore comment est le paradis, mais franchement, on s’y sent tellement bien.
La Kaaba, maison de Dieu est faite de sorte qu’on peut accomplir les 7 tours (rite appelé Tawâf) à sa manière. On choisit d’être juste à côté, ou on choisit de monter à l’étage et dans ce cas, un seul tour vous fait un (1) km. C’est donc plus intéressant de faire le Tawâf par le bas où le cercle est réduit et où on a la chance de pouvoir toucher la Kaaba qui est la maison sacrée de Dieu. On ne sait pas qui l’a construite 

Elle est sortie de terre comme ça ?

Je ne saurais le dire vu mes connaissances limitées en la matière, mais d’après les enseignements qu’on a reçus, le prophète et ses compagnons ont reçu instruction de poursuivre sa construction même si on ne sait pas qui a posé la première pierre.
Le premier rite à accomplir en y arrivant s’appelle le Tawâf et consiste à faire sept (7) tours de la Kaaba en faisant des invocations. Dès le premier jour, j’ai eu la chance de toucher la Kaaba. Une grâce pour laquelle je ne finirai jamais de remercier Allah et le Prophète ! Juste après le Tawâf, on fait une prière de deux cycles (raka’ât), puis on va accomplir ce qu’on appelle le Sa’y composé de deux rites : Safâ et Marwa. Le Sa’y consiste à accomplir 7 fois le parcours entre les deux monticules (Safâ et Marwa) en commençant par Safâ. Ce rite rappelle l’origine de l’eau bénite qu’on appelle le zamzam. Il semble qu’au début, c’était deux monticules distantes l’une de l’autre d’environ 395 mètres. Après le Sa’y (Safâ - Marwa) c’est la désacralisation : les femmes coupent un morceau de leurs cheveux et les hommes se font complètement raser la tête. C’est la fin du pèlerinage pour ceux qui sont venus juste pour la Oumra.

Pouvez-vous expliquer l’origine de l’eau bénite appelée zamzam que les pèlerins ramènent ?

Sur ce sujet, mes connaissances sont très limitées vu que je n’ai ni fait l’école coranique, ni étudié le Coran. Ce que je sais vient de la pratique de l’islam que mon père nous a inculquée en tant que musulmans. Il nous a mis dans la pratique de l’islam avant d’aller à l’école française à sept (7) ans. Si je rapporte mal, que Dieu me pardonne.
Il semble que l’histoire ressemble un peu au sens donné au mouton à sacrifier pendant la fête de l’Aid Kébir, la fête du mouton comme on l’appelle ici. Pour tester sa foi, Dieu a ordonné à Abraham de sacrifier son fils et comme il a obtempéré, Dieu lui a envoyé un mouton à la place du fils.
Pour le zamzam, c’est à peu près la même histoire. Dieu voulait ici aussi tester la foi d’Abraham. Atteint par la vieillesse et n’ayant pas d’enfant, Abraham venait enfin d’avoir un fils, Ismaïl. Quel bonheur. Mais cette joie va s’écourter quand, un jour, Allah lui fit injonction d’aller déposer le bébé à un endroit loin de la cité. Il prend donc sa femme et l’enfant et va à l’endroit indiqué entre des montagnes où il n’y a pas de vies humaines et les y abandonne. Avant de partir, sa femme lui demande : "pourquoi tu nous laisses ici. Est-ce pour obéir à Allah ?" Abraham répond par l’affirmative. Après le départ d’Abraham, l’enfant a eu soif et criait. C’est alors que sa mère se mit à chercher l’eau. Elle monte sur une première montagne du nom de Safar dans l’espoir d’apercevoir une vie humaine, mais rien. Elle repart vers une autre montagne distante d’environ 395m, environ qui s’appelle Marwa. Là aussi, rien. Toute désespérée, elle fait sept allers-retours entre les deux montagnes et à la 7ème fois, elle aperçoit de l’eau qui jaillit de la terre qu’elle s’empressa de recueillir pour abreuver son bébé et le sauver. La source de cette eau n’a jamais tari parce que Dieu venait de réaliser encore un miracle : celui du zamzam pour sauver Ismaïl et que les pèlerins continuent toujours de boire à satiété. En fait, Dieu voulait tester la foi d’Abraham. Je n’ai pas vu la source, mais je ne doute pas de son existence car quand je bois le zamzam, je me sens grandir.

Où donc le pèlerin recueille t-il l’eau de zamzam qu’il ramène ?

Des canalisations ont été faites pour transporter l’eau jusqu’à la mosquée et c’est là que le pèlerin la recueille pour boire. En fait, on nous fait subir l’épreuve que la mère de Ismaïl a subie ; les femmes marchent normalement pendant que les hommes trottinent tout en faisant des invocations. Le zamzam se trouve un peu partout dans les mosquées sacrées où il y a des thermos qui en sont remplis. Certains se lavent avec parce qu’ils pensent que ça peut guérir leur maladie. En tout cas, c’est ce qu’on laisse croire.
En repartant chez lui, chaque pèlerin a le droit de ramener une quantité de zamzam soit (5) litres contenus dans des bidons bien conditionnés qu’il paie à l’aéroport et garde avec lui dans l’avion.
Après cette épreuve, on va à la Mecque où, l’intention étant déjà formulée, on entame une autre étape, celle de Arafat, le nom d’un autre village. Au-paravent, il faut payer le mouton qui sera sacrifié (au prix de 100 000 FCFA environ). Sans le mouton, tu ne peux pas aller à Arafat. On peut toutefois compenser le manque de mouton en observant trois (3) jours de jeûne et au retour, sept (7), soit au total dix (10) jours.
Le jour où le pèlerin se rend à Arafat, correspond à la veille de la Tabaski ici au Burkina. Selon les enseignements, c’est l’étape à ne pas rater, car on dit souvent que celui qui manque Arafat, c’est comme s’il avait raté son pèlerinage. Même les malades font tout pour y être, quitte à prendre des cars. C’est à Arafat, semble t-il, que le Coran a été descendu ! C’est donc un grand lieu de rassemblement pour tous les pèlerins. Certains montent sur la montagne pour y être pardonnés, d’autres se mettent tout autour, tous dans les prières et les invocations. Dieu a dit à ses anges : « vous êtes témoins que tous ces gens ici présents, je leur pardonne tous leurs péchés ». Pour le pèlerin, c’est le moment de demander, sans hésiter, tout ce qu’il veut à Dieu, sinon, c’est comme s’il était orgueilleux.
J’ai pu gravir jusqu’au sommet de la montagne et comme il ne faut pas rater une telle occasion, j’avais un carnet de doléances que j’ai pu égrener entièrement.
Ensuite, tous les pèlerins qui étaient à Arafat quittent la montagne et convergent vers un endroit qui s’appelle Muzdalifa. Sur un tout petit tapis, chacun sacrifie à la prière du Maghrib et on dort tous, côte à côte, dans un espace vide. Comme c’est impressionnant de voir toutes les couleurs du monde s’étaler sur une grande surface ! A vrai dire, nous ressemblons à des moutons dans un parc.

C’est enfin terminé ?

Non pas encore. De Muzdalifa, il faut se rendre à Mina après avoir sacrifié à la prière de l’aube (subb). Il est aussi recommandé de faire une petite escale à Mash’al-Haram, mais le temps ne le permet pas à tous les pèlerins. Mina est le dernier site du Hadj ou la dernière étape. C’est le lieu de la lapidation de Satan, distant d’environ 11 km de Arafat. C’est, semble t-il, un site spécialement aménagé pour le Hadj. Les pèlerins y arrivent le 10ème jour de Dhul-hijja appelé jour du sacrifice, qui correspond au jour de la fête de Tabaski dans le reste du monde. Précisons que les pèlerins n’accomplissent pas la prière de l’Aid Kebir le 10ème jour de dhul-hijja. Ils sont soit dans leur tentes à Mina, soit en train de lapider les stèles, soit sur la route pour accomplir le Tawaf al-ifada.
Il y a trois stèles (une petite, une moyenne et une grande) à lapider trois jours durant. Il faut préciser que seule la grande stèle (Jamara kubrâ) est lapidée le premier jour. A chaque séance de lapidation, il faut utiliser 7 pierres par stèle, des pierres de la grandeur d’une fève. Il faut donc avoir un bon stock de pierres et ne pas être chargé de bagages encombrant. Un long couloir (sous forme de tunnel) conduit le pèlerin jusqu’au lieu de lapidation et il faut faire des coudes pour y arriver tellement il y a du monde. Ceux qui ne supportent pas d’être dans une foule suffoquent et tombent parfois surtout qu’il fait très chaud. On était à plus de 50 degré cette année à Arafat !
Pour les personnes âgées qui ne tiennent pas physiquement, des pèlerins se portent volontiers pour jeter leurs pierres. C’est ce que j’ai fait pour une dame d’autant qu’on ne jette pas les pierres n’importe comment. Il faut viser et atteindre la cible, et que la pierre retombe au bon endroit.
L’enseignement qu’on peut retenir de Mina, c’est qu’il faut cultiver l’humilité et ne jamais oublier que l’homme n’est rien. A cette étape, que tu sois grand, court, milliardaire, fort ou faible, vous dormez dans les mêmes conditions ; un petit matelas dans un espace réduit et tu peux avoir un malade comme voisin immédiat.
Après les trois jours de lapidation, on repart à la Mecque, là où il y a la maison de Dieu et on fait le Tawaf obligatoire pour boucler la boucle en y ajoutant évidemment le Say ou Safar Marwa. Il ne reste plus qu’à faire les valises pour rentrer au pays et avant de sortir de la Mecque, on fait un Tawaf d’au revoir sans le Say.

Le candidat au pèlerinage sait-il dans le détail ce qui l’attend à la Mecque ou découvre t-il l’essentiel sur place ?

Il est préparé avant le départ et pour ma part, je l’ai été par le CERFI (Cercle d’études, de recherches et de formation islamiques), par des personnes ressources qui connaissent le sens des différentes étapes. Mais on ne peut pas tout savoir avant d’y être. Sur place, on découvre beaucoup de choses.

Sous un autre angle, le pèlerinage apparait comme un gros business touristique pour l’Arabie Saoudite...

C’est vrai, le pèlerinage draine du monde et c’est une bonne affaire pour l’Arabie Saoudite qui a d’ailleurs mis en place des infrastructures d’accueil qui correspondent à toutes les bourses. Chacun y va avec ses moyens et certains remplissent 4 à 5 valises d’achat de souvenirs.
Pour les Burkinabè, il faut reconnaitre que c’est quand même un peu difficile comparativement aux pèlerins ivoiriens par exemples. La Côte d’Ivoire a acquis une maison pour ses ressortissants qui vont à la Mecque et c’est plus simple pour eux alors que pour nous, ce sont des agences de voyage qui s’organisent pour prendre des hôtels qui ne peuvent pas être près de la maison sacrée, les prix étant élevés. Résultat, il faut beaucoup marcher pour accomplir les différents rites et c’est pour cette raison que je le déconseille ceux qui ne sont pas physiquement solides.

Quelle appréciation faites-vous de l’organisation du Hadj au Burkina ?

Personnellement, j’ai eu assez d’informations sur les différentes étapes du Hadj et après l’inscription, je n’ai pas eu de difficultés pour les vaccinations puisque cette année, on a créé plusieurs sites pour faciliter les choses, surtout pour ceux qui arrivent de la province. C’est dire que des efforts sont faits. Nous allons faire des observations en espérant qu’elles seront prises en compte pour l’avenir, mais je demande quand même qu’on améliore les conditions d’hébergement. Je suis consciente que compte tenu de nos modestes moyens, on ne peut pas avoir des hôtels près du al-Harâm et de la Kaaba qui sont de haut standing.
Il y a aussi la restauration qui n’est pas incluse dans le prix du billet, mais surtout des mets auxquels nous ne sommes pas habitués. Fort heureusement, il y avait une dame qui venait proposer des plats, comme le tô avec des sauces que nous aimons ici au Burkina. Il semble que c’est une Mossi, ce qui ne serait pas surprenant vu que ces gens ne reculent devant rien pour chercher l’argent ! [NDRL, propos d’une Samogo qui n’appellent pas de commentaire]

Quelle appréciation faites-vous de l’accueil que les Saoudiens réservent aux pèlerins africains ?

Sur ce plan, l’Arabe reste l’Arabe ! Silence... Mais comme nous sommes des pèlerins et qu’on porte des badges, notre statut de pèlerin fait que nous sommes respectés. En tout cas, sur les différents lieux où se déroulent les étapes du Hadj, il n’y pas de problème. On se rencontre dans les mosquées et tout se passe bien sans discrimination. On m’a même offert un exemplaire du Coran grand format que j’ai fait déposer dans la mosquée de mon village. C’est pour dire qu’ils nous considèrent comme des musulmans.

C’est pour quand la fête que chaque pèlerin organise à son retour ?

Rires. C’est déjà fait ! Il ne s’agit pas d’une fête, mais juste une cérémonie qu’on appelle le Walma consistant à sacrifier un mouton dans les trois jours après le retour pour rendre grâce à Dieu d’avoir permis que le Hadj se soit bien passé. L’imam de mon quartier m’a conseillée ce qu’il faut faire, pas plus qu’une cérémonie de baptême d’un enfant musulman. C’était une cérémonie sobre, symbolique mais forte en émotion surtout que mes parents qui sont au village, ont pu profiter d’un convoi militaire pour rallier Ouagadougou.

Comment expliquez-vous que des Ladji et Adja, soient parfois impliqués, voire auteurs d’actes malveillants ?

Vous savez, l’être humain reste l’être humain. Les Mossis disent au pèlerin ceci : « Dieu fasse que tu mérites ton titre de Hadj ou de Hadja ». C’est la meilleure salutation que j’ai rencontrée. Il faut mériter ce titre et malheureusement, tout le monde ne le mérite pas. Je prie Dieu pour mériter ce titre de Hadja jusqu’à mon dernier jour parce que c’est quelque chose de lourd à porter. Un musulman ne doit pas faire certaines choses, et on nous rappelle cela avant d’aller à la Mecque. Si tu as eu l’occasion d’aller dans la maison de Dieu comme moi qui ai posé mon front dessus, il faut tout faire pour mériter ce titre et que ton nom ne soit jamais associé à certaines choses.
Malheureusement, est-ce le contexte qui explique cela, certains ne méritent pas ce titre car ils ne mesurent pas sa portée. Des Ladji et Adja sont souvent associés à des choses qui ne devraient pas l’être du tout. Tu es Hadja mais c’est toi qui es entrain d’insulter ou critiquer les gens, à consulter des charlatans, à courrir derrière un homme ou accepter les avances d’un homme. Que Dieu m’éloigne de ces choses-là ! Un Ladji ne doit pas faire la cour à la femme d’autrui ; il doit rester avec la femme qu’il a choisie et a mariée. Une Hadja qu’on aperçoit à l’hôtel avec des hommes, que Dieu m’en garde. Quand on a bataillé pour aller à la Mecque et qu’on en revient en bonne santé, on rend énormément grâce à Allah et on le prie de faire en sorte que l’on mérite le titre toute sa vie.

Propos recueillis par Joachim Vokouma
Kaceto.net