Les autorités ivoiriennes ont lancé mercredi à Abidjan une grande opération de destruction d’un marché vendant des faux médicaments, ont constaté des journalistes de l’AFP.

Quelque 150 policiers et gendarmes ont pris d’assaut au petit matin le quartier "Roxy" du grand marché d’Adjamé, un quartier populaire d’Abidjan, détruisant les échoppes en tôle pour en extraire de nombreux cartons de faux médicaments.

"Je salue cette opération qui s’est déroulée sur le plus grand marché de médicaments de rue d’Afrique de l’ouest" a déclaré à l’AFP le Dr Parfait Kouassi, ancien président de l’ordre des pharmaciens de Côte d’Ivoire.

Selon lui, ce marché représentait 30% des ventes de médicaments en Côte d’Ivoire. Le secteur pharmaceutique légal enregistre chaque année "une perte de 40 à 50 milliards de francs CFA (76 millions d’euros) dont plus de 5 milliards destinés à l’Etat, due à l’existence d’un marché de rue des médicaments", la +pharmacie par terre+, comme la surnomment les Ivoiriens (les vendeurs installent souvent les médicaments sur des couvertures posées sur le sol).

Ces médicaments "mal conservés" sont des "faux" et sont "un cocktail toxique" qui "attirait la population analphabète" en raison de prix très bas, a souligné le Dr Kouassi, également président des distributeurs ivoiriens en pharmacie.

Une des victimes de l’opération policière, la présidente des femmes de Roxy (le quartier Roxy connu pour les médicaments doit son nom à un ancien cinéma), a appelé ses camarades à "une reconversion pour éviter la prison".

"Nous demandons au gouvernement de nous aider pour une reconversion. De nombreuses femmes ont fait de la vente de ces médicaments leur activité principale" a affirmé à l’AFP Sita Koné dont la boutique vient d’être détruite.

Abidjan avait incinéré le 10 mars 50 tonnes de faux médicaments, pour une valeur estimée à plus d’un million d’euros.

Les faux médicaments représentent "probablement" 10% du marché pharmaceutique mondial, soit un chiffre d’affaires estimé à 85 milliards de dollars, selon l’Institut international de recherche anti-contrefaçon de médicaments (Iracm), basé à Paris.

Près d’un médicament sur trois utilisé en Afrique est illicite ou contrefait, ce qui en fait la région du monde la plus touchée par ce trafic contrôlé par le crime organisé.

Les criminels profitent du fait qu’à l’inverse du trafic de stupéfiants, le commerce de faux médicaments demeure largement impuni dans le monde, étant considéré comme un simple délit de violation de la propriété intellectuelle, alors qu’il est pourtant responsable de centaines de milliers de morts par an, déplore l’Iracm.

L’Inde est le premier pays d’origine des produits pharmaceutiques illicites - qui peuvent être des médicaments authentiques mais introduits en contrebande ou des médicaments mal conditionnés ou périmés - tandis que les médicaments contrefaits sont fabriqués le plus souvent en Chine, selon l’Organisation mondiale des Douanes.

AFP