Alors que les députés frondeurs ont obtenu la reconnaissance de leur groupe parlementaire, dénommé UPC-Renouveau démocratique, les militants de base de l’UPC eux entendent augmenter la pression sur les "traitres" pour les obliger à rendre leur mandat

Les oreilles du ministre d’Etat, ministre de la Sécurité Simon ont dû siffler ce matin aux environs de 10 heures. Il doit en avoir l’habitude, conscient qu’il a peut-être autant d’amis que d’ennemies dans la capitale burkinabè. Et que dans le climat socio-politique délétère actuel, parmi ses compatriotes, certains payeraient volontiers très cher pour ne pas le voir, même en carton.
Premier flic du Burkina, l’homme le plus informé de la république a sans doute repéré d’où partaient les ondes négatives qui indisposaient ses oreilles, quelque part dans l’ouest de Ouagadougou, à Gounghin, le quartier qui abrite le siège de l’Union pour le progrès et le changement (UPC).
Face aux journalistes nationaux et aux correspondants de médias étrangers accrédités dans notre pays, les militants de base de l’UPC y animaient un point de presse sur la crise qui frappe leur parti depuis quelques semaines. Occasion pour eux de condamner à nouveaux la « forfaiture des 13 députés » qui ont démissionné du groupe parlementaire UPC pour créer dans la foulée, le groupe parlementaire UPC-Renouveau démocratique, finalement reconnu hier 25 octobre par les présidents des groupes parlementaires à l’Assemblée nationale.
Selon eux, les missions d’explications envoyées dans les provinces des démissionnaires « ont été une grande réussite, les structures ayant de façon unanime réaffirmé leur soutien ferme à l’UPC et au président Zéphirin Diabré ». Même si le nouveau groupe parlementaire a été reconnu, cela n’entame en rien leur détermination à faire monter un peu plus la pression sur les démissionnaires afin qu’ils rendent le mandat qu’ils ont obtenu grâce aux militants du parti.
D’ores et déjà, les comités de base dans toutes les localités du Burkina et à l’étranger sont invitées à monter la garde devant les domiciles des « 13 traitres dès ce soir », ces derniers étant para ailleurs relevés de leurs fonctions dans les instances du parti, interdits d’assister aux réunions et d’accéder au siège du parti. La consigne est claire : « même dans le 6 mètres qui passe devant le siège, on ne veut plus les voir ».
Les conférenciers du jour ont aussi nommément cité les coupables de la crise qui ébranle le premier parti de l’opposition, en l’occurrence le Mouvement du peuple pour le progrès (MPP), accusé d’avoir « acheté les 13 députés pour casser l’UPC et fragiliser l’opposition politique ». L’actualité politique aidant, les militants de base de l’UPC ne sont pas allés loin pour chercher les preuves de l’implication du MPP « dans la trahison la plus sotte du monde ». Ils ont convoqué le contenu d’une vidéo publié sur le réseau social Facebook qui crée un malaise dans l’exécutif burkinabè. On y voit le ministre d’Etat, ministre de la Sécurité, tenant de la main gauche une arme de guerre, en l’occurrence une Kalachnikov, habillé d’un tee-shirt qui cache à peine un gilet pare-balle, en train de discuter avec un député au domicile de ce dernier. Le ministre Compaoré s’y est rendu manifestement pour le rassurer, après que des jeunes de l’UPC aient manifesté devant les domiciles des démissionnaires.
Avec jubilation, les jeunes de l’UPC ont pris en grippe celui qui assure la présidence du MPP par intérim, brocardant le « chef suprême des Koglwéogos », celui qui « a perdu les pédales », dont le comportement « n’honore ni le chrétien, ni le fils de pasteur », qui n’est ni plus ni moins qu’un « malade mental non suivi » et sur lequel il faut « une expertise psychiatrique avant qu’on n’en arrive au pire ». Une description d’une froide et mordante ironie qui fait plier de rire les journalistes. Voici le tout puissant ministre d’Etat bien rhabillé pour le froid qui s’annonce sous peu !
Pour conclure, Jean Léonard Bouda et ses camarades demande au « chef de l’Etat et au premier ministre de prendre les mesures idoines pour que la sécurité du pays ne soit pas entre les mains d’un fou ».
On repart de cette conférence de presse pas du tout rassuré quant à l’amélioration du climat social. Les militants de base de l’UPC ont promis de harceler, tous les jours leurs anciens camardes jusqu’ à obtenir gain de cause. Ils ont donné rendez-vous dans la rue au ministre d’Etat, qui avait regretté dans la vidéo de ne les avoir pas croisés, car disent-ils « la kalach et les idées sournoises et démoniaques ne sauront nous intimider ».

Joachim Vokouma
Kaceto.net