L’accès à l’éducation est loin d’être une réalité pour tous les enfants, notamment ceux en situation de handicap. La politique de l’Etat en faveur de l’éducation inclusive se heurte à d’énormes difficultés. La directrice de la Promotion de l’éducation inclusive, de l’éducation des filles et du genre, Rasmata Ouédraogo, nous en donne les grandes lignes dans l’interview qui suit.

Kaceto.net : Quelles sont les missions dévolues à la direction Promotion de l’éducation inclusive, de l’éducation des filles et du genre ?

Ramata Ouédraogo : La direction de la promotion de l’éducation inclusive et de l’éducation des filles est une direction centrale du ministère de l’Education nationale et de l’alphabétisation (MENA). Elle a pour mission de contribuer à l’accès, au maintien et à la réussite des filles, des enfants en situation de handicap et/ou vulnérables. Elle a également pour mission de coordonner les activités entrant dans la promotion de l’éducation des filles, de l’éducation inclusive et du genre. Elle est née de la fusion de trois anciennes directions dont la direction de l’éducation inclusive (ancien MENA), direction de la promotion de l’Education des filles et du genre (ancien MENA), la direction de l’Education des filles et de la promotion du genre (ancien MESS).

Qu’entend-on par éducation inclusive ?

C’est une approche qui inclue tout le monde. C’est-à-dire que l’individu qui accède à l’école puisse s’y épanouir intégralement. Celui-ci doit se sentir intéressé par les activités menées. Par exemple, les moyens doivent être mis en œuvre pour que les enfants frappés de surdité ou de cécité puissent bénéficier des cours. C’est le langage de signes pour l’enfant sourd et le Braille pour celui qui est aveugle. On doit tenir compte de tout cela dans les pratiques et les contenus. L’éducation inclusive est une approche éducative qui s’intéresse à la valorisation de toutes les différences.

Quelle est la politique de l’Etat en matière d’éducation inclusive ?

L’Etat s’est bien positionné par la ratification de certaines conventions internationales. Ce qui lui impose de mettre en œuvre l’éducation inclusive. D’où la prise de dispositions. Il y a la loi d’orientation de l’éducation qui à son article 3 stipule que tout enfant a droit à l’éducation. Ensuite, vient le Plan décennal de développement de l’éducation de base (PDSEB) qui fixe les orientations pour développer l’éducation de base. L’éducation inclusive y occupe une bonne place. A cet effet, une stratégie de développement de cette éducation a été élaborée et validée le 15 décembre 2015. Même si elle n’a pas encore été soumise au conseil des ministres, dès lors que le document est écrit, validé, il est opérationnel. Aujourd’hui, ma direction en collaboration avec ses partenaires travaillent sur la base de cette stratégie nationale. Ce n’est pas un manque de volonté politique qui retarde son adoption, mais surtout le changement institutionnel. Le nouveau MENA prend en compte le préscolaire jusqu’au secondaire. Alors que la stratégie s’arrête au post primaire. Elle évoquait des documents qui sont aujourd’hui dépassés. La hiérarchie a souhaité que nous puissions prendre en compte les nouvelles réalités en vue de l’adoption du document final en conseil de ministres. Le travail a déjà été fait. Nous pouvons donc dire, qu’il existe une direction, une ligne budgétaire avec allocation budgétaire annuelle d’au moins 140 millions de FCFA.

Qu’est-ce qui est concrètement fait sur le terrain ?

D’abord, il y a le dispositif de l’inclusion qui est un schéma indicatif pour faire de l’éducation inclusive, une réalité. Le premier point repose sur la sensibilisation de toutes les communautés à travers des commissions intégrant des partenaires comme des enseignants, des élus locaux... On fait la sensibilisation pour dire que l’éducation est un droit fondamental. Ensuite, on identifie tous les enfants en âge d’aller à l’école qui d’ordinaire sont exclus. Il s’agit des enfants en situation de handicap. Puis vient le temps de la consultation pour déceler les handicaps. La formation et le suivi des enseignants en activité suivront. A cela il faut ajouter un dispositif important qui est la classe transitoire d’inclusion scolaire. Par exemple, si l’enfant est aveugle, il faut qu’il apprenne à maîtriser son outil de travail qu’est le Braille avant de rejoindre les autres.
Le dispositif qui doit le recevoir au post-primaire reposera sur des cellules d’appui à installer au niveau des Collèges d’enseignement général (CEG), des lycées. Ce sont des équipes chargées d’appuyer le corps enseignant afin de décrypter ce que l’enfant fait en Braille.

Quelles sont les difficultés que vous rencontrez ?

L’éducation inclusive est autorisée par l’Etat, mais reste le monopole des privés. Ce n’est pas facile de vouloir la développer dans cette situation. L’autre difficulté est relative aux moyens financiers pour l’achat du matériel didactyle. Cependant, le plus grand obstacle à franchir est la persistance des réticences des parents quant à l’éducation des enfants en situation de handicap. On a beau faire des actions de sensibilisation, de communication à travers des symposiums, il reste beaucoup à faire. Il faut également mettre l’accent sur la formation des enseignants, des acteurs impliqués.

Parlez-nous des perspectives qui se profilent pour améliorer l’éducation inclusive au Burkina Faso.

Elles sont déjà inscrites dans les différents plans d’action que la direction élabore annuellement. Elles le sont également dans le Plan d’action triennal de la stratégie nationale de développement de l’éducation inclusive. Cette stratégie a défini entre autres, la communication et le renforcement des capacités comme axes prioritaires. Elle se chiffre sur trois ans autour de 14 milliards de FCFA.

Propos recueillis par Dominique KONE
Kaceto.net