Un rapport liste 90 000 objets arrivés sous la colonisation et qui pourraient être restitués à leurs pays d’origine.

Comment rendre à l’Afrique des milliers d’œuvres d’art arrivées en France sous la colonisation ? Emmanuel Macron reçoit ce vendredi un rapport posant les jalons d’une telle restitution, considérée comme un acte de justice... mais aussi perçue par certains experts comme une boîte de Pandore.

Le rapport de Bénédicte Savoy et Felwine Sarr liste en effet au moins 90 000 objets d’art d’Afrique sub-sahariennes qui se trouvent dans les collections publiques françaises. Il propose également un plan de restitution en 46 000 d’entre eux, exposés au Musée du Quai Branly-Jacques Chirac à Paris mais "acquis" durant la période de colonisation française (1885-1960), donc susceptibles d’être restitués.

Plus de 20 000 autres se trouvent dispersés dans de nombreux musées, notamment dans les villes portuaires. Ce chiffre n’inclut pas plusieurs milliers d’objets hébergés par les musées des missions, qui rassemblent des objets collectés par les congrégations catholiques en Afrique.
Au Quai Branly, les pièces venant du Tchad sont les plus nombreuses (9296), car son territoire est au point de jonction entre l’Afrique du nord et l’Afrique sub-saharienne. Viennent ensuite Madagascar (7590), le Mali (6910), la Côte d’Ivoire (3951), le Bénin (3157), le Congo (2593), le Gabon (2448), le Sénégal (2281), Guinée (1997).
Des pièces proviennent de territoires qui n’ont pas été colonisés par la France : Ethiopie (3081), Ghana (1656), Nigeria (1148), RDCongo (1428). Celles d’Afrique australe (9282) et d’Afrique de l’Est (5343) sont bien moins nombreuses.

Le rapport Savoy-Sarr, que le président Macron peut accepter, rejeter, compléter, amender à sa guise, propose trois phases pour les restitutions : une première jusqu’au printemps 2019 pour l’inventaire, une deuxième jusqu’en novembre 2022 pour le "dialogue" avec les pays concernés, et une troisième pour l’acheminement éventuel. Mais ce sera au président de suivre ou non leurs propositions dont la mise en oeuvre risque d’être complexe.
"Comme tous les rapports, il a vocation à être enrichi par des consultations supplémentaires dans lesquelles le ministère de la Culture aura toute sa place", s’empresse de préciser l’entourage de la présidence française.
En attendant, au Bénin, où l’on avait lancé le dossier avec i,e réclamation des statues royales d’Abomey, on se félicite que "la France soit allée au bout du processus". "Nous ne sommes pas dans une démarche de réclamation brutale" mais "dans un processus d’accompagnement", a insisté le chargé de mission du président pour les projets culturels et touristiques. La présidente de la Fondation artistique Zinsou, la Franco-Béninoise Marie-Cécile Zinsou, qualifie d’"historique" ce rapport. "On a l’impression, dit-elle, d’être à un pas de récupérer notre histoire".

L’express.fr/AFP