La reprise des activités scolaires au Burkina a été repoussée au 1er juin 2020, après plusieurs reports. S’il y a une catégorie d’enseignants dont le sort n’est certainement pas des plus enviables en ce moment, c’est bien celui des « vacataires » des lycées et collèges du public et surtout du privé. Pour eux, chaque jour qui passe en rajoute à leur désespoir et à leurs angoisses.

Enseignants vacataires ( EV). Pour eux, la fermeture des classes décidée par le gouvernement à la mi-mars 2020 pour cause de covid-19 les met dans une situation très inconfortable. Ils sont les victimes collatérales de la crise du COVID-19 dans le secteur de l’enseignement privé. Déjà en temps normal, de nombreux promoteurs privés d’établissements passent le plus clair de leur temps à jouer au chat et à la souris avec les salaires des vacataires. Là, ils profitent carrément de la crise sanitaire pour faire un black-out total sur la situation de leurs collaborateurs, arguant de « service non effectué », les livrant à eux-mêmes.
Pour les vacataires, le quotidien reste compliqué ; ils ont du mal à joindre les deux bouts et à prendre correctement en charge leurs familles.

Exploitation et misère

Etre enseignant vacataire, c’est être rémunéré à la tâche, donc en fonction du nombre d’heures de cours dispensés dans le mois. Le ministère de l’Education serait au fait de la situation des vacataires et aurait même décidé de la mise en place d’un fond de soutien à leur profit. Sauf que les conditions pour pouvoir en bénéficier disqualifieraient de nombreux prétendants à cette manne.
Au cours d’une conférence de presse organisée fin avril, la coordination des enseignants du privé affirme avoir approché les promoteurs d’établissements pour en savoir davantage au sujet de cet argent. Mais pour l’instant, aucune nouvelle rassurante ne filtre.
L’autre problème qui complique amplement la situation des vacataires, c’est l’ambiance chaotique qui règne dans le secteur marqué par des pratiques contestables. Des individus qui se font appeler abusivement professeurs alors qu’ils n’ont ni la qualité ni l’expérience, se livrent à de la concurrence déloyale.
Cupides, ils portent des coups-bas aux autres enseignants en vendant leurs services à moindre coût. En effet, alors que le taux moyen horaire est fixé 2500 FCFA, on assiste à des tarifs pouvant parfois descendre jusqu’à 1500 F CFA, voir, parfois 750 F CFA. La stratégie pour ces derniers consiste à accepter de basses rémunérations, avec l’espoir de se rattraper par la suite, en multipliant à l’excès le nombre de disciplines et de cours à dispenser dans plusieurs établissements à la fois. Ou parfois, dans le même établissement.
Tout ce qui intéresse ces gens-là qui viennent parfois de pays voisins, confie un vacataire, ce n’est pas l’enseignement, mais gagner de l’argent à tout prix, peu importe les conséquences sur le niveau des élèves.
Avec un corps professoral livré à lui-même comme c’est le cas actuellement, il ne faut pas s’attendre à des résultats extraordinaires. Les résultats se font déjà sentir d’ailleurs depuis quelques années. En 2019, le taux national de réussite au BEPC a été de 26,62%, soit une baisse de 16,32 points comparativement à 2018. Quant aux taux de succès national du baccalauréat, session 2019, il a été de 36, 66%, soit le plus faible résultat enregistré au cours des cinq dernières années au Burkina Faso.
En tout état de cause, ceux des enseignants vacataires que nous avons pu rencontrer, se disent impatients de reprendre le chemin des classes. Ils se disent pressés d’aller en découdre avec leurs directeurs afin de récupérer leur dû. Faute de quoi, préviennent-ils, ils trouveront les moyens adéquats pour bien se faire entendre.

Juvénal Somé
Kaceto.net