Bravant l’interdiction, des associations regroupant des Peulhs et d’autres organisations de défense des droits de l’homme ont battu le pavé dans les rues de Fada N’Gourma le 13 juin 2020 pour dénoncer l’insécurité dont ils sont victime et la stigmatisation qui frappe particulièrement les Peulhs.

"Peul est différent de terroriste", "droit à la vie, droit à la sécurité", "non à la stigmatisation", "Non aux milices dans un état de droit", etc. Ces slogans ont été scandés le 13 juin dernier par une impressionnante foule qui a défilé dans les rue de Fada N’Gourma, dans l’Est du Burkina. Bravant l’interdiction de la mairie, les Peuls de la région, regroupés dans des associations ainsi que des défenseurs de droits de l’homme ont manifesté bruyamment dans les artères de la ville pour exprimer leur colère contre l’injustice et la stigmatisation dont ils s’estiment victimes.
Partis du marché à bétail, à la sortie Est de Fada, les manifestants ont rallié la Place des Martyrs, à quelques pas de la mairie et du haut commissariat pour un meeting.
Après avoir observé une minute de silence en mémoire "de toutes les victimes des attaques terroristes dans notre pays ", puis "une ovation à l’endroit de nos Forces de défense et de sécurité (FDS) et des Volontaires pour la Défense de la Patrie (VDP), les organisateurs estiment que "c’est un truisme de dire que les communautés du Burkina, notamment la communauté Peulh, se trouvent aujourd’hui entre le marteau et l’enclume".

La région est minée par des groupes armés qui sèment la terreur, "en tuant, pillant, enlevant les citoyens, détruisant tout sur leur passage" à quoi s’ajoutent "les arrestations arbitraires suivies des décès sans explications et les multiples exécutions sommaires et extra-judiciaires constatées malheureusement au sein même de nos
Forces de Défense et de Sécurité (FDS) et des Volontaires pour la Défense de la Patrie (VDP)".
Bien sûr, aucune composant ethnique n’est épargnée par les barbares dans leur besogne, mais les organisateurs de la marche considèrent que " la stigmatisation
s’est développée et a atteint son paroxysme" aux yeux de certains pour qui, "désormais Peulh est synonyme de terroriste et par conséquent une menace pour la paix".
La manifestation pacifique dans laquelle s’exprimait la diversité ethnique de la région vise plusieurs objectifs :
 Dire non à la stigmatisation ;
 Rappeler à toutes et à tous que tous les Peulhs ne sont pas terroristes et tous les terroristes ne sont pas Peulhs et ces derniers n’ont d’ailleurs ni Ethnie ni Religion ;
 Dire non aux arrestations arbitraires, aux exécutions sommaires et extra-judiciaires dans le cadre des opérations de lutte contre le terrorisme ;
 Non aux enlèvements et disparitions forcées ;
 Non aux interdictions d’une tierce communauté l’accès à certains marchés, certains axes routiers dans certaines localités et même la santé ;
 Exiger une commission d’enquête indépendante et rigoureuse telle que l’a promis le président du Faso suite à la mort des douze détenus à la Gendarmerie de Tanwalbougou le 12 mai 2020, et aussi sanctionner avec toutes la rigueur de la loi des acteurs qui seront impliqués et des complices ;
 Exiger l’arrêt immédiat des assassinats de masse, assassinats ciblés et des crimes de guerre ;
 Exiger vérité et justice pour tous les crimes de masse dans la région de l’Est tels que Tawalbougou, Natiaboani, Kompienbiga, Mansila, Tambiga, Pendima, Paldoube, etc ;
 Exiger une réorganisation et un encadrement rigoureux des VDP tout en procédant à un recrutement impliquant toutes les communautés locales ;
 Exiger du gouvernement une prise en charge convenable des personnes déplacées internes incluant l’alimentation, les soins, le logement et l’éducation ;
 Exiger du gouvernement des mesures concrètes pour permettre le retour effectif des personnes déplacées dans leurs villages respectifs.

La marche n’ayant pas été autorisée, ses organisateurs n’ont pas trouvé d’autorité à qui remettre leur lettre de doléances. Mais aux dernières nouvelles, une délégation devrait être reçue aujourd’hui par le gouverneur de la région de l’Est.

Dominique Koné
kaceto.net