Un rapport édité par la Commission économique pour l’Afrique dresse un bilan alarmiste du secteur aéronautique africain. Lequel doit explorer toutes les voies – aides directes, indirectes, alliances, restructurations – pour faire face à ses obligations financières.

L’Association des compagnies aériennes africaines (AFRAA) et la CEA (Commission économique pour l’Afrique) renouvellent une série de recommandations pour sauver un secteur durement éprouvé par la crise sanitaire.

Elles sont rejointes par l’Association internationale du transport aérien (IATA), l’association des compagnies aériennes d’Afrique australe (AASA), l’organisation mondiale du tourisme et le Conseil mondial du voyage et du tourisme.

« Il est tentant de se tourner vers les institutions de financement du développement, en particulier parce que certaines d’entre elles ont créé des fonds pour financer les plans de survie et de redressement », souligne le rapport. Selon qui « il incombe donc aux États et aux compagnies aériennes d’optimiser leur utilisation de ces facilités ».

Elles s’accordent sur la nécessité d’une aide de 10 milliards de dollars pour soutenir les secteurs du tourisme et du voyage, en Afrique. Elles réclament un accès de l’industrie du voyage et du tourisme à un maximum de financements.

Que ceux-ci prennent la forme de dons ou d’aide à la trésorerie, pour injecter des liquidités et apporter un soutien ciblé aux pays gravement touchés. Les professionnels plaident en faveur de diverses mesures financières, tel le report des obligations financières existantes, ou des remboursements de prêts.

Les associations se réfèrent à une étude, récemment actualisée, qui examine, sous l’angle financier, l’impact de la pandémie sur les compagnies aériennes africaines. « L’Étude stratégique – Les compagnies aériennes africaines dans le contexte de la pandémie de Covid-19 », donne un aperçu des ressources financières dont ont besoin les compagnies aériennes pour survivre et se remettre de la crise de liquidités provoquée par l’arrêt de l’activité. Il recense les sources d’aide potentielles et propose des mesures pour les maintenir à flot.

Ce rapport constate que toutes les compagnies ne sont pas logées à la même enseigne et ne présentent pas le même besoin de financement. C’est pourquoi une solution unique ne serait peut-être pas appropriée pour résoudre leur problème de liquidité.

Les États et les institutions de financement du développement ont rarement étendu aux compagnies aériennes leurs programmes d’aide et de financement face à la pandémie. Les mesures qu’ils pourraient prendre à cet égard sont multiples, comme l’octroi de subventions, de prêts et de garanties de prêts, l’émission de capital et aussi le report ou l’annulation du remboursement des dettes, des loyers, des charges et des taxes des compagnies aériennes.

« Il est donc essentiel que les parties prenantes du secteur, notamment les organisations intergouvernementales et les organismes de transport aérien, plaident en faveur d’un soutien direct des États aux compagnies aériennes », soutient le rapport.

Ces aides pourraient se doubler d’une plateforme pour coordonner leurs efforts en vue de la survie du secteur, notamment en renforçant les liens entre les compagnies aériennes et les institutions financières et en facilitant l’accès aux fonds disponibles. L’accent doit également être mis sur la création de possibilités commerciales pour les compagnies aériennes.

Un secteur créateur de richesses

Bien sûr, les États africains, les institutions financières, les organisations intergouvernementales et les organismes sectoriels ont participé à l’élaboration de stratégies et de plans ou à la création de fonds en réponse à la pandémie.

Ce point de vue repose sur le fait que la crise de liquidité des compagnies aériennes a été déclenchée par les restrictions de voyage brutales qu’ont imposées les États pour freiner la propagation de la pandémie. Ces restrictions ont à leur tour entraîné des annulations de vols, qui obligent les compagnies aériennes à rembourser les billets déjà achetés et leur font essuyer des pertes de recettes. S’y ajoute le fait que les compagnies doivent continuer à assurer le service de leur dette et à faire face à leurs dépenses de fonctionnement.

La contribution significative du transport aérien au PIB national et à la création d’emplois est une autre raison pour laquelle les États africains devraient apporter un soutien financier aux compagnies aériennes. D’autant que le transport aérien a un rôle essentiel à jouer dans le redressement des économies après la pandémie.

De son côté, la Commission de l’Union africaine défend la création d’un fonds de 25 milliards $ pour soutenir les plans de relance, en faveur de l’industrie aéronautique africaine.

Si les États du continent ont fourni des aides budgétaires pour faire face aux conséquences économiques et sociales de la pandémie en général, la plupart d’entre eux n’ont pas apporté de soutien direct à leurs compagnies aériennes.

En général, ils n’ont même pas évoqué leur intention de soutenir les compagnies aériennes. Outre l’Afrique du Sud et les Seychelles, les quelques exceptions incluent le Sénégal, qui a annoncé un plan d’aide de 128 millions $ pour son secteur du tourisme et du transport aérien. Ainsi que la Côte d’Ivoire, qui a renoncé à sa taxe touristique pour les passagers en transit.

« Pour obtenir un soutien financier direct de la part des pouvoirs publics et amener ceux-ci à participer à la mobilisation des ressources auprès des institutions financières, les principaux acteurs du secteur se doivent de mener une campagne de sensibilisation diligente et constante. »

Le rôle d’Afreximbank

D’autant que contrairement à ce qui se passe en Afrique, les États d’autres régions du monde ont mis en place des mesures d’aide.

De leur côté, les institutions de financement du développement, en Afrique et ailleurs, participent au financement des compagnies aériennes africaines. Sur le continent, la BAD (Banque africaine de développement), Afreximbank et la Banque de commerce et de développement ont financé l’expansion et la modernisation des compagnies aériennes, notamment l’achat d’avions par Ethiopian Airlines, Kenyan Airways, Air Côte d’Ivoire et RwandAir.

Il semble donc logique que les compagnies aériennes africaines se tournent vers ces banques pour explorer les moyens de résoudre leurs problèmes de liquidité. Afreximbank, par exemple, propose des transactions telles que des avances de fonds directes, des prêts à terme et des lignes de crédit, un refinancement des crédits, des garanties et des swaps de taux d’intérêt et de monnaies. « Il est tentant de se tourner vers les institutions de financement du développement, en particulier parce que certaines d’entre elles ont créé des fonds pour financer les plans de survie et de redressement », souligne le rapport. Selon qui « il incombe donc aux États et aux compagnies aériennes d’optimiser leur utilisation de ces facilités ».

Pour cela, ils doivent être informés de l’existence de ces fonds et des procédures à suivre pour y accéder. La BAD et Afreximbank ont créé des fonds pour faire face à l’impact de la pandémie sur les secteurs vitaux des économies du continent, dont celui de l’aviation. La facilité de riposte de la BAD atteint 10 milliards $.

Bien que ces programmes soient généralement intersectoriels et principalement destinés aux États, il est important de plaider auprès de ceux-ci pour qu’ils allouent au secteur de l’aviation une part des ressources obtenues des différentes institutions. « Ce plaidoyer est d’autant plus indiqué que les États n’ont pas nécessairement utilisé les fonds reçus pour soutenir l’industrie aéronautique. »

Enfin, au-delà des aides financières, « l’idée de consolider le secteur aérien africain mérite également un examen approfondi », reconnaît le rapport édité par la CEA.

Le Magazine de l’Afrique