Nouvelle articulation dans le Sahel, accords entre le Burkina et la France en matière de défense et de sécurité, soutien dans le secteur de l’éducation en situation d’urgence, arrivée de Wagner au Mali, piste d’atterrissage clandestine au Burkina, etc. En fin de mission, le Général français Laurent Michon fait le point de sa mission à la tête de l’opération Barkhane.

En fin de mission à la tête de l’opération militaire Barkhane dans le Sahel, le Général français Laurent Michon a entrepris une tournée d’adieux qui l’a conduit en Mauritanie, au Sénégal, au Mali et au Niger. La dernière étape de cette tournée l’a conduit à Ouagadougou, où il co-animé avec l’ambassadeur Luc Hallade, une conférence hier 21 juillet dans l’enceinte de la résidence de l’ambassadeur.
Face aux journalistes, c’est un Général qui regagne la mère patrie avec le sentiment du devoir bien accompli. Il a rappelé la mission principale assignée à l’opération Barkhane déployée à partir du Mali depuis août 2014 : apporter le soutien militaire des armées françaises aux pays du Sahel en proie aux attaques terroristes : Mali, Niger, Mauritanie, Burkina.
Selon le Général, la coopération entre les militaires français et leurs frères d’armes, les Forces armées maliennes (FAMA), s’est bien déroulée avant que ne s’installe une brouille politique entre les deux Etats, « une fuite en avant du pouvoir de Bamako » selon lui, laquelle a conduit au départ de l’armée française et à un redimensionnement de Barkhane à partir du Niger. Des sites emblématiques comme Kidal, Tombouctou, Tessalit ont donc été libérés. La force européenne Takuba a emboité le pas depuis juillet et d’ici la fin septembre, le retrait devrait être total dans un climat cordial avec les FAMA. « Barkhane, c’est 4000 containers et 2500 hommes à démobiliser et ça prend un peu de temps », a indiqué le Général avant de préciser que le reploiement au Niger ne saurait en aucun cas être une duplication de ce qui existait car, même si l’objectif demeure le même, les équipements devraient changer profondément. Barkhane devrait d’ailleurs changer de nom dans les mois à venir pour prendre en compte le volume plus important du volet soutien au développement et la formation des militaires nigériens.
Au Mali, comme au Niger, le principe qui guide le partenariat entre les deux armées demeure identique : les combats au sol seront menés sous le commandement d’un Général nigérien et ici comme ailleurs, l’intervention française se fait à la demande des pays. « Nous sommes un soutien, mais jamais à la place de nos partenaires », a précisé le Général Michon.

S’agissant de la coopération avec le Burkina, il a indiqué que l’armée française assure la formation des forces spéciales burkinabè à Kamboinsin et a apporté un démenti sur les contreparties des interventions françaises aux côtés du Burkina. « Il n’y a pas de factures de Barkhane adressées aux autorités en cas d’interventions de l’armée française. Ça coûte cher mais c’est le contribuable français qui supporte les frais aussi bien au Niger qu’au Burkina », a soutenu le Général, ajoutant que « notre vœu, c’est la stabilité sans le Sahel sans califat ». L’ambassadeur Hallade renchérit : La France n’a pas d’intérêts cachés et n’est pas dans l’exploitation de la principale richesse du Burkina qui est l’or ; dans le coton, à peine ». Au sujet des accords militaires signés par les deux pays, l’ambassadeur a indiqué qu’il existe un accord de coopération qui date depuis 1962, puis et un arrangement technique sur une collaboration dans le domaine aérien.
La main sur le cœur, le Général jure que le départ de Barkhane n’a pas de lien avec l’arrivée du groupe russe Wagner, pour lequel, il a une piètre estime. Pour lui, les éléments du groupe Wagner ne sont que « des prédateurs qui ont mis la main sur trois mines d’or, qui exécutent des prisonniers et se livrent à une campagne de désinformation contre la France en inventant de faux charniers, avec le soutien de panafricanistes qui touchent plus que moi de Moscou ».
Il est offusqué que des gens insinuent que la France pourrait être de connivence avec les groupes terroristes, voire qu’elle leur fournit des armes. « Les équipements dont disposent les terroristes sont ceux qui ont été abandonnés par les militaires des armées nationales » a-t-il révélé.

Le face à face avec la presse a été l’occasion pour lui de dénoncer « les fantasmes » entretenus par certains sur les immenses moyens dont disposerait son pays et qu’il refuserait de les mettre au service des pays africains, alors que « dans notre hangar, il y a 5 ou 7 avions chasseurs et 5 ou 7 drones ». D’où la nécessité d’associer les actions de développement aux opérations militaires, sachant que la guerre ne peut être gagnée qu’en prenant en compte ses multiples dimensions. D’où le soutien de la France, via l’AFD au système éducatif en situation d’urgence par la réhabilitation d’écoles détruites par les attaques terroristes, le financement de projets visant à remettre dans le cycle normal des élèves qui avaient quitté l’école et l’appui au partenariat mondial de l’éducation au profit de 600 000 élèves et professeurs.
Interrogé sur le nombre d’interventions que l’armée française a faites à la demande du Burkina, le Général a refusé de répondre à cette question, renvoyant son auteur vers le chef d’Etat-major des armées burkinabè.
Sur l’existence d’une piste d’atterrissage dans le nord du Burkina qui servirait à ravitailler les terroristes, le Général Laurent Michon comme l’ambassadeur Hallade assurent n’en n’avoir jamais entendu parler.

Joachim Vokouma
Kaceto.net