Les opposants centrafricains tablent sur une jurisprudence de la Cour suprême qui s’est déjà prononcée sur le caractère intangible de certaines dispositions de la loi fondamentale, dont celles relatives au nombre de mandats du président de la République.

Le Bloc républicain pour la défense de la Constitution (BRDC), une coalition regroupant les principaux partis de l’opposition centrafricaine, a déposé, le mercredi 31 août, un recours devant la Cour constitutionnelle pour contester un projet de modification de la Constitution censé permettre au président Faustin-Archange Touadéra (photo) de briguer un troisième mandat.

A travers ce recours, l’opposition attaque le décret présidentiel daté du vendredi 26 août, portant création d’un comité de rédaction d’une nouvelle Constitution. Elle mise notamment sur une jurisprudence de la Cour suprême, qui a déjà estimé que certaines dispositions de la Constitution de 2016 ne pouvaient être révisées.

« La Cour constitutionnelle, à une autre occasion, a très clairement réaffirmé le caractère intangible des verrous constitutionnels, notamment sur les mandats du président, les critères d’éligibilité, et a rendu un avis défavorable. Donc, en nous fondant sur cette jurisprudence, évidemment, nous pensons que la Cour constitutionnelle ne peut pas se dédire aux yeux du peuple centrafricain et aux yeux du monde entier », a déclaré à RFI l’avocat Crépin Mboli-Goumba, président du Parti africain pour une transformation radicale et l’intégration des Etats (PATRIE) et l’un des rédacteurs de la requête déposée auprès de la plus haute instance judiciaire centrafricaine.

« Il n’y a nulle part dans la Constitution de notre pays une disposition permettant au président de la République d’organiser un référendum dont l’objectif serait la disparition pure et simple de la Constitution. Toute initiative donc doit être évaluée et comprise au regard de la Constitution du 30 mars 2016 », a-t-il ajouté.

Le président centrafricain tente d’imposer une révision de la Constitution pour faire sauter le verrou du plafond de deux mandats présidentiels qui l’empêche d’en briguer un troisième en 2025. Le Mouvement Cœurs Unis (MCU), son parti politique, avait déjà tenté en mars d’introduire cette révision lors d’un « dialogue républicain » excluant la rébellion et boycotté par l’essentiel de l’opposition avant d’être contraint d’y renoncer, en raison de la forte résistance de l’opposition et de la société civile.

Les promoteurs de la réforme constitutionnelle pressent le chef de l’Etat de la faire adopter par référendum. Le samedi 6 août, plus d’un millier de manifestants s’étaient rassemblés à Bangui, la capitale centrafricaine, exigeant la tenue d’un référendum pour modifier la Constitution.

M.Touadéra avait été réélu en décembre 2020 avec 53,16% des voix à l’issue d’un scrutin controversé durant lequel le taux de participation s’est limité à 32,25%, en raison du climat d’insécurité qui régnait dans le pays.

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