Retard incompréhensible dans la publication des résultats des concours de la fonction publique session 2022, disparition d’ordinateurs, difficultés rencontrées par les candidats lors des inscriptions en ligne, cafouillage dans le déroulement des épreuves en double flux, etc.
Depuis des semaines, la toile s’est enflammée sur l’organisation des concours avec parfois des supputations sur une possible manipulation des résultats.
Hier 15 novembre, le ministre d’Etat, ministre de la Fonction publique, du travail et de la protection sociale, Bassolma Bazié était face à la presse nationale pour éclairer l’opinion nationale et rassurer les candidats quant à la crédibilité du déroulement des épreuves et des résultats en cours de validation.

C’est un fait inhabituel pour ne pas être souligné : attendus pour 10 heures, le ministre d’Etat, ministre de la Fonction publique, du travail et de la protection sociale, Bassolma Bazié et ses collaborateurs se sont installés devant les journalistes qui avaient investi les bancs de l’Amphi A de l’Ecole nationale d’administration et de la magistrature (ENAM) très exactement à 9h56mn. Il faut dire que l’objet de la conférence de presse qu’il devait animer est d’une importance pour des millions de Burkinabè : le bilan à mi-parcours de l’organisation des concours de la fonction publique, session 2022. Dans un pays où la fonction publique demeure le principal employeur, le retard accusé dans la publication des résultats de cette année suscite des interrogations, voire des inquiétudes pour ceux qui espèrent décrocher un emploi stable et entamer leur insertion socio-professionnelle.
Pour la session 2022, le gouvernement a autorisé le 11 mai 2022, le recrutement de 5293 postes en concours professionnels et 6069 postes en concours directs. Nouvelles technologies de l’information et la communication aidant, les inscriptions aux différents concours, la composition et la correction des épreuves se font en partie en ligne depuis 2019 sur une plateforme créée et gérée par un prestataire. Non sans difficultés.
Déjà, le début des inscriptions a accusé un retard de deux (2) mois et huit (8) jours, un retard qui s’explique par le fait que le prestataire assurait la maintenance de la plateforme. Puis, il a fallu de longues négociations qui ont aussi duré deux mois entre le gouvernement et le prestataire sur le montant de la prestation. De 1 500 000 000 F CFA au départ, les deux parties sont finalement tombées d’accord pour 390 000 000 F CFA contre 595 000 000 F CFA en 2019 et 377 000 000 F CFA en 2021.
Selon le ministre d’Etat, du 20 juillet au 11 août 2022, il a été enregistré 2415753 candidatures contre 1 385853 en 2021, soit une augmentation de 74,31%. Beaucoup de candidats, on s’en souvient, avaient rencontré des difficultés pour enregistrer leur inscription en dépit des améliorations apportées sur la plateforme. Afin de s’assurer du bon déroulement de l’organisation des concours, le ministère a sollicité et obtenu de la Commission électorale nationale indépendante (CENI), un soutien en ordinateurs, ce qui a fait passer le parc informatique dédié aux concours de 350 à 1050 ordinateurs.
Le 29 août, le premier ministre Albert Ouédraogo donnait, sous les flashs des photographes, le top départ des compositions en ligne pour les 40 567 candidats enregistrés dont 24401 ont composé en ligne pour 144 concours professionnels.
Quant aux concours directs, seulement dix (10) sur 92 concours ont été administrés en ligne. Six (6) résultats de ces concours sont déjà publiés.
Selon toujours le ministère, sur les 82 autres concours directs, 78 ont porté sur des Questions à choix multiples (QCM) et 4 à épreuves classiques uniquement dans la capitale.

Afin de désengorger Ouagadougou, le scannage des copies a été organisé dans les douze (12) chefs-lieux de régions. A la date du 15 novembre, les résultats de 73 concours directs à épreuves QCM, 4 à épreuves classiques et 14 concours professionnels déconcentrés pour le compte du ministre de la Santé humaine et animale ainsi que de l’Education nationale sont en attente.
Il reste également la correction électronique de 4 examens professionnels du ministère de la Santé et 2 examens professionnels du ministère de l’Education nationale.
Suivant le chronogramme initial, tous les résultats devaient être disponibles à ce jour et les admis devaient avoir déjà intégré les écoles de formation. Ce qui n’est, hélas pas le cas. Un fâcheux retard qui résulte à nouveau d’un « problème technique soulevé par le prestataire ».
Pas du tout satisfait, le ministère de la Fonction publique a déposé une plainte le 11 novembre 2022 auprès du procureur du Faso non seulement sur la perte de 11 ordinateurs portables, mais aussi pour faire le bilan humain, matériel, financier et organisationnel des concours, l’audit de la plateforme e-concours. Il souhaite aussi une réflexion sur la réappropriation de la plateforme par les techniciens burkinabè vivant au Burkina, sachant que le prestataire actuel, Moïse Wendkouni Konvolbo est un compatriote, de la diaspora installé au Japon.
Bassolma Bazié qui était accompagné par son secrétaire général, son directeur de cabinet, de l’ingénieur informaticien maison a tenu à rassurer les candidats : la perte des ordinateurs n’a aucun impact sur la crédibilité des résultats car ils ne contiennent que des données des années antérieures et au plus tard le 30 novembre, tous les résultats des concours seront disponibles.
Sur les allégations de fraudes lors des compositions en double flux, le Dircab attend des preuves que des candidats ont communiqué entre eux. Il précise également que les résultats publiés font l’objet d’un contrôle minutieux, jusque dans les écoles de formation afin de s’assurer que les diplômes et autres pièces produits par les candidats sont authentiques.
Bassolma Bazié s’est attardé sur sa décision de suspendre les mesures nouvelles, car pour lui, elles sont une source d’injustice contraire à l’article 1 de la constitution qui garantit l’égalité des Burkinabè en droits et devoirs. « Par ce canal, on a vu des ministres qui ont fait embaucher dans la fonction publique leur épouse, nièces, neveux ou oncles », a révélé le directeur de cabinet Mohamed Savadogo. Par ce canal, renchérit Bassolma Bazié, des retraités produisaient de faux papiers et se faisaient payer plus que ce qu’ils gagnaient quand ils étaient dans la vie active. Des pratiques qui limitent les chances des jeunes diplômés d’accéder à un emploi dans la fonction publique et qui, par désespoir, s’enrôlement dans les rangs des groupes terroristes. "Qui n’est pas la nièce de Bassolma ? Qui n’est pas le neveu de Bassolma ? Ceux qui disent qu’ils ont des bras longs, ils auront maintenant des bras courts", a averti le ministre d’Etat.

Dominique Koné
Kaceto.net