Le 20 avril 2023, le village de Karma, dans le département de Barga, province du Yatenga, a fait l’objet d’une violente agression meurtrière. Selon des sources concordantes, des hommes armés vêtus de l’uniforme de l’Armée burkinabè ont attaqué le village et causé la mort de plusieurs personnes. Selon diverses sources et aux premières heures de ce massacre, le nombre de victimes s’estimait à au moins 130 personnes.
Le dimanche 23 avril, le procureur du Faso, près le tribunal de grande instance de Ouahigouya, dans un communiqué faisait état de ce qu’« une soixantaine de personnes auraient été tuées par des personnes arborant des tenues de nos forces armées nationales ». Le procureur du Faso dit avoir été mis au courant par le commandant de la brigade de recherche de gendarmerie de Ouahigouya. Le procureur informait par ailleurs l’opinion qu’il a donné des instructions pour enquêter et interpeller toutes les personnes qui sont impliquées dans « ces faits dont la gravité est avérée » précise-t-il.
Une semaine après les faits, le Balai citoyen constate avec grand regret et une profonde tristesse que le drame de Karma reste une affaire énigmatique.
Le communiqué du procureur qui d’ailleurs ne comporte ni cachet, ni signature, ni références, ne se substitue pas à la responsabilité de l’Exécutif qui emporte la plus grande responsabilité morale.
Pareil drame national, indépendamment de l’action judiciaire qui incombe naturellement aux autorités de la chaine pénale, doit mettre en avant l’Exécutif qui doit répondre de sa responsabilité morale et régalienne de protéger les populations et de faire régner le droit et la justice en toutes circonstances.
Depuis ce jeudi noir du 21 avril, les Burkinabè sont sous le choc et ploient sous le poids de questionnements par rapport à ces évènements d’une gravité presque sans précédent et en réponse à l’indignation généralisée, le gouvernement a opposé l’évitement et un silence métallique.
Le communiqué du gouvernement arrivé finalement sur le tard ce 27 avril est encore plus révoltant. Les termes de ce communiqué sont tout simplement scandaleux. Le communiqué nous apprend que « le gouvernement est particulièrement préoccupé par des informations faisant état de tueries le 21 avril 2023… ». Par cette phrase, le gouvernement laisse entendre qu’il n’est pas sûr de l’effectivité des tueries. Le Gouvernement n’aurait donc pas ses propres sources pour être affirmatif sur les évènements de Karma, en dépit du communiqué du procureur sur la base du rapport du commandant de la gendarmerie.
Incrédule, le gouvernement persiste en parlant des morts au conditionnel : « Ces hommes auraient ainsi massacré et pillé les biens de paisibles habitants du village de Karma et blessé plusieurs autres pris en charge dans des formations sanitaires ». Quel sens et quel intérêt le gouvernement donne-t-il à l’emploi du conditionnel en parlant des morts et des blessés ? Quid du nombre de victimes ? Alors que le procureur avait avancé une soixantaine de morts et que les ressortissants et la presse parle d’au moins 130 morts, le gouvernement n’a pas trouvé mieux à dire que de parler de « dizaines de personnes ». Là où on s’attend à ce que le gouvernement avec autorité et responsabilité situe le Burkinabè sur le bilan de cette attaque, le gouvernement a choisi, sans plus de précisions, des termes qui minimise le bilan tout en restant dans le flou.
𝐂𝐞 𝐜𝐨𝐦𝐦𝐮𝐧𝐢𝐪𝐮𝐞́ 𝐞𝐬𝐭 𝐡𝐨𝐧𝐭𝐞𝐮𝐬𝐞𝐦𝐞𝐧𝐭 𝐞𝐧 𝐝𝐞𝐜̧𝐚̀ 𝐝𝐞 𝐜𝐞 𝐪𝐮’𝐨𝐧 𝐩𝐞𝐮𝐭 𝐚𝐭𝐭𝐞𝐧𝐝𝐫𝐞 𝐝’𝐮𝐧 𝐠𝐨𝐮𝐯𝐞𝐫𝐧𝐞𝐦𝐞𝐧𝐭 𝐚̀ 𝐥’𝐨𝐜𝐜𝐚𝐬𝐢𝐨𝐧 𝐝’𝐮𝐧 𝐩𝐚𝐫𝐞𝐢𝐥 𝐝𝐫𝐚𝐦𝐞.
Pendant ce temps, et fort heureusement donc, les témoignages ne cessent de s’accumuler dans le sens d’éclairer l’opinion sur les circonstances et les présumés auteurs de ces actes criminels. Ces témoignages émanent de ressortissants de la localité, des victimes rescapées et parents de victimes, lesquels témoignages sont faits à visages découverts. Des ressortissants et des rescapés ont rendu des témoignages écrits et assumés, en affichant leur identité complète (noms, prénoms et contacts téléphoniques) pour faire preuve de leur bonne foi. En voici un extrait d’une déclaration de rescapés et ressortissants du village : « Dans la matinée du jeudi 20 avril 2023, précisément autour de 7h30mns, notre village a été encerclé par des hommes armés venus en grand nombre et habillés en tenues militaires burkinabè. Ils étaient sur des motos, dans des véhicules (pik up et blindés) et on pouvait également apercevoir un char de combat. Certains villageois, heureux de voir « nos soldats », sont sortis de leurs concessions pour les accueillir. Malheureusement cette joie sera écourtée lorsque les premiers coups de feu retentirent, occasionnant également les premières victimes ».
Toujours selon la même déclaration qui n’a pas reçu de démenti ni d’autres ressortissants ni d’une autorité, les assaillants reprochent à ces populations le fait que « tous les villages voisins aient déguerpis » pendant qu’eux « sont toujours installés ».
Le village de Karma serait « un passoir pour les groupes armés » selon « ces soldats ». Que dire d’autres après ces mots que de s’en remettre aux autorités nationales pour faire toute la lumière sur ce drame. C’est tout le sens de la présente interpellation de notre mouvement.
Tout en présentant nos sincères condoléances et profonde compassion au village de Karma et à toutes les victimes et parents de victimes, le Balai citoyen s’indigne particulièrement du silence inexplicable du Président de la Transition et de son gouvernement sur ces évènements de Karma qui, au-delà du drame, jettent de sérieuses suspicions et un discrédit sur nos forces de défense et de sécurité.
Au nom de l’intérêt de nos forces de défense et de sécurité et dans l’intérêt supérieur de la Nation, le Balai citoyen lance un appel au procureur du Faso, au Capitaine Ibrahim Traoré, Président de la Transition, Chef de l’Etat, Chef suprême des armées, à tout mettre en œuvre, chacun en ce qui le concerne, pour faire la lumière avec la plus grande diligence sur la tragédie de Karma et rendre justice aux Burkinabè victimes de ce massacre.
𝐋𝐚 𝐯𝐢𝐜𝐭𝐨𝐢𝐫𝐞 𝐬𝐮𝐫 𝐥𝐞 𝐭𝐞𝐫𝐫𝐨𝐫𝐢𝐬𝐦𝐞 𝐩𝐚𝐬𝐬𝐞 𝐩𝐚𝐫 𝐥𝐚 𝐣𝐮𝐬𝐭𝐢𝐜𝐞. 𝐃𝐞𝐩𝐮𝐢𝐬 𝐡𝐮𝐢𝐭 𝐚𝐧𝐬, 𝐥’𝐢𝐧𝐣𝐮𝐬𝐭𝐢𝐜𝐞 𝐨𝐮 𝐬𝐢𝐦𝐩𝐥𝐞𝐦𝐞𝐧𝐭 𝐥𝐞 𝐬𝐞𝐧𝐭𝐢𝐦𝐞𝐧𝐭 𝐝’𝐢𝐧𝐣𝐮𝐬𝐭𝐢𝐜𝐞 𝐚 𝐞́𝐭𝐞́ 𝐥𝐞 𝐭𝐞𝐫𝐫𝐞𝐚𝐮 𝐪𝐮𝐢 𝐚 𝐟𝐞𝐫𝐭𝐢𝐥𝐢𝐬𝐞́ 𝐥𝐞 𝐭𝐞𝐫𝐫𝐨𝐫𝐢𝐬𝐦𝐞. 𝐋𝐞 𝐜𝐡𝐚𝐧𝐠𝐞𝐦𝐞𝐧𝐭 𝐝𝐞 𝐜𝐚𝐩𝐞 𝐯𝐨𝐮𝐥𝐮 𝐩𝐚𝐫 𝐥𝐚 𝐓𝐫𝐚𝐧𝐬𝐢𝐭𝐢𝐨𝐧 𝐝𝐮 𝐌𝐏𝐒𝐑 𝐬𝐨𝐮𝐬 𝐥’𝐞́𝐠𝐢𝐝𝐞 𝐝𝐮 𝐂𝐚𝐩𝐢𝐭𝐚𝐢𝐧𝐞 𝐈𝐛𝐫𝐚𝐡𝐢𝐦 𝐓𝐫𝐚𝐨𝐫𝐞́, 𝐬’𝐢𝐥 𝐝𝐨𝐢𝐭 𝐧𝐨𝐮𝐬 𝐜𝐨𝐧𝐝𝐮𝐢𝐫𝐞 𝐯𝐞𝐫𝐬 𝐥𝐚 𝐯𝐢𝐜𝐭𝐨𝐢𝐫𝐞 𝐬𝐮𝐫 𝐥𝐞 𝐭𝐞𝐫𝐫𝐨𝐫𝐢𝐬𝐦𝐞, 𝐝𝐨𝐢𝐭 𝐚𝐛𝐬𝐨𝐥𝐮𝐦𝐞𝐧𝐭 𝐩𝐫𝐞𝐧𝐝𝐫𝐞 𝐞𝐧 𝐜𝐨𝐦𝐩𝐭𝐞 𝐥𝐚 𝐝𝐢𝐦𝐞𝐧𝐬𝐢𝐨𝐧 𝐣𝐮𝐬𝐭𝐢𝐜𝐞. 𝐋𝐞 𝐜𝐚𝐬 𝐊𝐚𝐫𝐦𝐚 𝐞𝐬𝐭 𝐮𝐧𝐞 𝐞́𝐩𝐫𝐞𝐮𝐯𝐞, 𝐮𝐧 𝐭𝐞𝐬𝐭 𝐞𝐭 𝐮𝐧 𝐝𝐞́𝐟𝐢 𝐥𝐚𝐧𝐜𝐞́ 𝐚̀ 𝐥𝐚 𝐓𝐫𝐚𝐧𝐬𝐢𝐭𝐢𝐨𝐧 𝐞𝐭 𝐚̀ 𝐬𝐞𝐬 𝐩𝐫𝐞𝐦𝐢𝐞𝐫𝐬 𝐝𝐢𝐫𝐢𝐠𝐞𝐚𝐧𝐭𝐬.
Le Balai citoyen lance un appel aux organisations de la société civile, en particulier celles de défense des droits de l’Homme, aux médias et aux journalistes, aux institutions républicaines à se mobiliser, à exiger et à veiller à ce que Karma ne reste pas un cas de plus d’impunité et de déni de justice dans notre pays très éprouvé par les affres du terrorisme.
Au moment où nous nous apprêtions à rendre publique cette déclaration, nous apprenons l’attaque terroriste contre nos Forces armées dans le détachement de Ougarou, région de l’Est. Selon le communiqué de l’Etat major général des armées, cette attaque a coûté la vie à 33 de nos soldats.
Le Balai citoyen très affligé par ce nouveau drame présente ses condoléances aux familles des victimes, aux forces armées nationales et à la Nation entière. Le Balai citoyen réitère ses encouragements et sa solidarité avec nos Forces combattantes, Forces armées, forces de sécurité et volontaires pour la défense de la Patrie, tous engagés pour la défense de la Patrie.
Notre nombre est notre force !
Ensemble, on n’est jamais seul !

Pour le Balai Citoyen,
La Coordination Nationale.