La baisse du nombre de femmes tuées par leur conjoint ou ex-conjoint est qualifiée par le garde des sceaux, Eric Dupond-Moretti, de « modeste mais [porteuse] d’espoir ».

Des résultats « encore trop modestes », mais « porteurs d’espoir » : le ministre de la justice, Eric Dupond-Moretti, a annoncé mardi 2 février que 90 femmes avaient été tuées par leurs conjoints ou ex-conjoints en 2020, un chiffre en très forte baisse par rapport aux 146 féminicides recensés par le gouvernement en 2019.

Le chiffre pour 2020 est le plus bas depuis que le gouvernement a commencé à recenser les féminicides, en 2006, mais les associations s’accordent à dire qu’il est encore trop tôt pour y voir une tendance durable.

Evaluer l’impact des mesures du Grenelle

En 2020, « 106 crimes ont été perpétrés et 90 victimes sont des femmes, a déclaré le garde des sceaux dans une vidéo postée sur Facebook. En 2019, 173 crimes ont été perpétrés et 146 femmes ont été victimes de ces crimes conjugaux ». « Bien sûr que chaque homicide, que chaque violence, est un échec avec les conséquences humaines dramatiques que l’on imagine, un échec pour notre société toute entière, c’est un échec pour le ministère de la justice », a-t-il insisté. Stade ultime des violences subies par plus de 200 000 femmes par an, les féminicides avaient connu une forte hausse en 2019 (25 de plus que l’année précédente).

Signe que ce fléau est devenu majeur dans la société, le ministère de la justice a demandé pour la première fois l’an passé des « remontées systématiques d’informations » aux parquets généraux pour chaque homicide conjugal, afin d’avoir « un suivi plus précis » de ces meurtres et « évaluer l’impact des mesures du Grenelle ».

Après une forte mobilisation associative, un Grenelle pour lutter contre les violences conjugales avaient abouti à la fin de 2019 à une quarantaine de mesures, parmi lesquelles le déploiement de bracelets anti-rapprochement pour les conjoints ou ex-conjoints violents ou des « retours d’expérience » entre professionnels concernés après chaque féminicide.

En 2020, « beaucoup de dispositifs ont été mis en place ou ont connu une accélération », a plaidé la chancellerie, évoquant les bracelets (17 prononcés dont 8 actifs au 18 janvier) ou le téléphone grand danger (1 200 distribués à la fin de 2020). Les associations en attendent davantage, demandant par exemple que la mesure qui permet de réquisitionner les armes à feu d’un conjoint violent dès la première plainte soit réellement appliquée. Les meurtres par arme à feu représentant près d’un tiers des féminicides.

Nombreuses violences conjugales pendant les confinements

L’épidémie due au coronavirus et ses périodes de confinement ont aussi mis en lumière l’importance des violences subies par les femmes et les enfants à leur domicile, faisant bondir les signalements de ces faits. Pendant le confinement, « il y a eu un discours politique fort contre les violences intrafamiliales, les forces de l’ordre se déplaçaient systématiquement et les dossiers passaient en priorité dans les tribunaux », évoque Anne-Cécile Mailfert, présidente de la Fondation des femmes, qui estime que ces mesures provisoires ont permis de « sauver des vies ».

Il est « trop tôt pour acter une tendance à la baisse car ça peut remonter l’année prochaine », a réagi la cofondatrice de #Noustoutes Caroline De Haas, qui rappelle qu’avec « encore près de 100 mortes, on ne peut pas se satisfaire ».

Le Monde avec AFP