Aujourd’hui, dans l’opinion, nous avons trois catégories de citoyens. Chacun avec des certitudes hautement proclamées, et des doutes qu’on hésite à s’avouer soi-même.
Les plus visibles, ceux qui se sont proclamés "patriotes". Ils disent aimer le pays plus que Yennenga, plus que Diaba Lompo, plus que Tiefo Amoro, plus que Djimbi Ouattara, et bien d’autres figures historiques. Ces gens n’hésitent pas à mordre.
La deuxième, c’est paradoxalement les "patriotes" qui leur ont trouvé une dénomination, les "apatrides". L’intention infâmante n’est pas cachée. Il s’agit de vomir ceux qui ne partagent pas toujours les ardeurs des auto-proclamés "patriotes".
Entre "patriotes" et "apatrides", on a la troisième catégorie. C’est la grande masse silencieuse, qui observe tout ça. Les choses ne sont pas simples non plus pour cette troisième catégorie. Parce que "patriotes" et "apatrides" regardent ces gens comme des "traîtres" ou des traîtres possibles.
Dans tout ce charivari, on n’est pas délicat sur le choix des mots. Voilà l’exploit que nous avons réussi avec brio en 12 petits mois. Le pire, c’est qu’il se trouve des Burkinabè pour en tirer fierté. On accable quotidiennement sa sœur ou son frère, et on est content. Satisfait dans toutes les largeurs.
Personnellement, je suis peut-être naïf, mais je n’arrive vraiment pas à me figurer un Burkinabé qui voudrait la décadence du pays de ses ancêtres. Chaque fois, j’essaie de faire attention. Je ne prétends pas que ça marche toujours, mais j’essaie. Ce n’est pas parce que je ne partage pas la lecture de quelqu’un, que je peux me permettre de le catégoriser. Car il sera toujours facile de s’asseoir et de décréter qu’on a raison, et que les autres ont tort.
Ce qui est sûr et certain, béton et caillou, c’est que demain va arriver. Que comptons-nous faire de ce pays demain ? Car nul n’a le pouvoir de tendre la main et d’arrêter la marche des événements. La vie politique aussi suivra son cours, sans nous demander notre avis. Qui connaissait Damiba il y a deux ans ? Qui connaissait le Capitaine Traoré il y a 13 mois ?
Chacun se réunit avec lui-même, réfléchit, et tire les conclusions qui lui semblent convenir.
Je vous souhaite une bonne journée à tous.

Sayouba Traoré
Journaliste, Ecrivain