A l’occasion de la commémoration du 75è anniversaire de la Déclaration universelle des droits de l’homme (DUDH), la Commission nationale des droits humains (CNDH) s’est inquiétée dans un communiqué des atteintes aux libertés individuelles et collectives induites par l’application du décret n°2023-0475/PRES-TRANS/PM/MDNAC/MATDS/MJDHRI du 19 avril 2023 portant mobilisation générale et mise en garde dont l’article 8 énonce que « les droits et libertés individuels et collectifs garantis par les lois et les règlements, peuvent, dans certains cas, être restreints ou limités conformément à la loi ».
De même, elle se dit préoccupée "par la suspension des activités des partis politiques par le communiqué n°03 du 30 septembre 2023 du Mouvement patriotique pour la sauvegarde et la restauration II", lequel viole l’article 13 de la constitution qui dispose que les partis politiques "concourent à l’animation de la vie politique, à l’information et à l’éducation du peuple ainsi qu’à l’expression du suffrage. Ils mènent librement leurs activités dans le respect des lois "
Le 10 décembre 2023, la communauté internationale a commémoré le 75 ème anniversaire de la Déclaration universelle des droits de l’homme (DUDH) sous le thème « Dignité, liberté et justice pour tous ».
En effet, la dignité, la liberté et la justice constituent les piliers fondamentaux de la DUDH auxquels la Commission nationale des droits humains (CNDH) réaffirme son attachement, comme valeurs et principes cardinaux de la vie en société.
Au Burkina Faso, la liberté et la dignité sont mises à rude épreuve par les attaques terroristes depuis 2015. Ces attaques terroristes bafouent la dignité des populations, en les poussant au déplacement interne, en tuant sans distinction des civils et militaires, femmes et enfants. Ces populations en déplacement vivent souvent dans des conditions de précarité attentatoires à leur dignité.
La CNDH est attentive aux multiples efforts déployés par le Gouvernement pour lutter âprement contre les groupes terroristes, reconquérir le territoire et protéger les populations. Toutefois, certaines des initiatives mises en œuvre dans ce cadre restreignent les libertés individuelles et collectives. C’est le cas notamment du décret n°2023-0475/PRES-TRANS/PM/MDNAC/MATDS/MJDHRI du 19 avril 2023 portant mobilisation générale et mise en garde dont l’article 8 énonce que « les droits et libertés individuels et collectifs garantis par les lois et les règlements, peuvent, dans certains cas, être restreints ou limités conformément à la loi ».
Plusieurs autres dispositions de ce décret sont ambigües et pourraient être sources de menaces pour les libertés ; c’est le cas entre autres, de la fourchette d’âge de personnes pouvant être réquisitionnées, la qualité des personnes pouvant dûment signer des actes de réquisitions, le manque d’éléments objectifs pouvant justifier la nécessité d’une réquisition.
De même, la Commission reste préoccupée par la suspension des activités des partis politiques par le communiqué n°03 du 30 septembre 2023 du Mouvement patriotique pour la sauvegarde et la restauration II. Cette préoccupation tient au fait que ce soit un communiqué qui suspende une disposition constitutionnelle (l’article 13) qui dispose que les partis politiques « concourent à l’animation de la vie politique, à l’information et à l’éducation du peuple ainsi qu’à l’expression du suffrage. Ils mènent librement leurs activités dans le respect des lois ».
Un communiqué par définition a une valeur infra constitutionnelle et ne saurait restreindre des libertés garanties par la loi fondamentale.
Au moment où la communauté internationale plaide pour la « Dignité, liberté et justice pour tous », la CNDH encourage l’État du Burkina Faso à davantage intégrer la dimension droits humains dans ses initiatives de reconquête du territoire. Cela est possible et la CNDH encourage les actions de formation des forces de défense et de sécurité ainsi que des volontaires pour la défense de la patrie sur les thématiques de droits humains et de droit international humanitaire.
Pour garantir la dignité, la liberté et la justice pour tous dans ce contexte de défis sécuritaire, la CNDH invite le gouvernement à clarifier davantage le décret portant mobilisation générale, à le mettre en œuvre dans l’esprit d’édification d’un État de droit et d’une société pluraliste de progrès, débarrassée de tout préjugé conformément à la Constitution et aux prescriptions de la Déclaration universelle des droits de l’homme et des nombreux instruments internationaux de promotion et de protection des droits humains.
Fait à Ouagadougou, le 27 décembre 2023
Pour la Commission,
La Présidente
Gonta Henriette Alida DA
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