Le mot « apprentissage » est un mot qui a le vent en poupe. Il en est régulièrement question dans les titres de presse. Wikipédia définit l’apprentissage comme « un ensemble de mécanismes menant à l’acquisition de savoir-faire, de savoirs et de connaissances. » L’acteur central de l’apprentissage est appelé « apprenant » ou « apprenti ». Le mot « apprentissage » est souvent opposé au mot « enseignement » dont le but est de dispenser/transmettre des connaissances et savoirs. L’acteur central de l’enseignement étant l’enseignant (instituteur, professeur des écoles, collèges et lycées, assistant, maître-assistant, maître de conférences, professeur des universités).
Dans cet article, je ne rentrerai pas dans le fond des débats conceptuels, théoriques et même idéologiques passionnants autour de ce mot « attracteur sémantique » qui a fait et continue de faire couler beaucoup d’encre. Je vais juste me contenter de vous livrer ce que l’intelligence collective inscrite dans l’économie des titres pertinents de la presse francophone en ligne couvrant deux décennies (2003-2021) permet d’en dire.

La cartographie du champ sémantique du mot « apprentissage » (singulier et pluriel), issue de l’analyse des titres pertinents, donne à distinguer très clairement deux clusters sémantiques (univers de sens) reliés.

Un cluster sémantique dénotant l’univers de l’apprentissage en contexte et à visée scolaire et universitaire (voir cluster « vert » sur la cartographie). Cet univers sémantique est marqué par des références sémantiques telles : enseignement/éducation, école/université, élèves, étudiants, enfants, enseignant (générique), programmes, classe, cours, contexte pédagogique et didactique, méthode, théorie, évaluation, lecture, (apprentissage) des langues/langages, résolution de problème, (apprentissage)coopératif, pensée, réflexion, cognition, processus, cerveau, mémoire, psychologie, etc. ;

Un cluster sémantique dénotant l’univers de l’apprentissage en contexte et à visée professionnels (voir cluster « violet » sur la cartographie). Cet univers est essentiellement structurés par des références telles : jeune/jeunesse, apprenti, formation, formation professionnelle, alternance, emploi/travail/métier, embauche et insertion professionnelle, avenir professionnel, diplôme professionnel (CAP notamment), dispositifs (contrat de travail, contrat d’apprentissage et autres contrats et conventions), acteurs institutionnels (entreprise, chambre de commerce, centre de formation des apprenti (CFA), centre des métiers de l’artisanat (CMA), région, ministère du travail, salon…), employeurs, économie, réforme/changement de l’apprentissage, financement, aide, etc.

La cartographie sémantique, si elle permet, non pas vraiment une photographie à l’instant « T », mais une sorte de vue synthétique, elle a le défaut de ne pas montrer les dynamiques dans le temps. Nous venons de le voir, l’attracteur sémantique nommé « apprentissage » articule deux principaux univers de sens : l’univers d’apprentissage en contexte et à visée scolaire et universitaire et l’univers d’apprentissage en contexte et à visée professionnels. Dans la mesure où le corpus significatif et pertinent de titres analysé couvre deux décennies (2003-2022), il peut être intéressant de regarder comment ces deux univers ont évolué en termes de visibilité au fil du temps.

Le graphique ci-après montre très clairement qu’au cours de la dernière décennie (2013-2022) l’évocation du mot « apprentissage » dans les titres de publications francophones en ligne a été nettement plus associée à la mise en scène de l’univers d’apprentissage en contexte et à visée professionnels qu’à l’univers d’apprentissage en contexte et à visée scolaire et universitaire. (N.B. : les deux univers ont été reconstitués sous forme de deux indicateurs regroupant les références sémantiques structurantes spécifiques à chacun d’eux).

Ce basculement qui marque un intérêt de plus en plus poussé pour les apprentissages professionnels n’est pas sans lien avec un changement de représentations sociales en cours. Longtemps dénigré, souvent mal considéré, l’apprentissage professionnel s’avère aujourd’hui comme un des maillons forts de l’économie de demain. Parce qu’il est résolument tourné vers le monde du travail et des métiers, l’apprentissage professionnel est vu comme une voie royale garantissant l’emploi et l’insertion professionnelle. En France, le coup d’accélérateur donné ces deux dernières années à l’apprentissage professionnel commence à produire des résultats significatifs. Les Allemands, dans ce domaine, ont pris beaucoup d’avance depuis longtemps et leur modèle de formation en alternance est regardé comme le plus performant à l’échelle européenne. Mais en France comme en Allemagne, l’expérience montre le rôle central que doivent jouer les entreprises, les employeurs, les dispositifs d’aide et d’accompagnements à la formation professionnelle et l’engagement financier de l’Etat dans la réussite de l’apprentissage professionnel. A bons entendeurs/décideurs, salut !

Ousmane SAWADOGO, Consultant Text Analytics & Analyse sémantique
Kaceto.net