Devant les neuf membres du constitutionnel, le Lieutenant-colonel Paul Henri Damiba a prêté serment ce matin 16 février 2022 en récitant la formule consacrée suivante : "Je jure devant le peuple burkinabè et sur mon honneur de préserver, de respecter,
de faire respecter et de défendre la Constitution, l’acte fondamental et les lois ; de tout
mettre en œuvre pour garantir la justice à tous les habitants du Burkina Faso".
Il a ensuite remis la déclaration de ses biens au président par intérim du Conseil constitutionnel.
C’est donc fait. Paul Henri Damiba est désormais le président du Faso, chef de l’Etat, chef suprême des armées du Burkina. Peu après sa prestation de serment, il a prononcé son premier discours que nous publions en intégralité. Pour l’histoire !

Monsieur le Doyen des membres du Conseil Constitutionnel
Honorables invités
Amis du Burkina Faso
Chers compatriotes

Avant tout propos, je vous prie de bien vouloir vous tenir debout
pour qu’ensemble, nous observions une minute de silence à la
mémoire de toutes celles et tous ceux, civils et militaires, qui ont
payé le prix du sang dans la guerre que mène notre pays contre le
terrorisme.

Je vous remercie

Par le fait de cette épreuve que nous traversons depuis déjà
plusieurs années, nombre de nos concitoyens se battent encore
quotidiennement pour retrouver leur dignité physique ou mentale.
Je leur témoigne toute ma solidarité et tout mon soutien.
J’ai également une pensée pour les éléments des Forces de Défense
et de Sécurité et les Volontaires pour la défense de la Patrie qui,
malgré des conditions parfois difficiles, tiennent fermement et font
face à l’adversité avec courage.

Distinguées personnalités

En cet instant solennel, j’ai une pensée profonde pour le peuple
Burkinabè qui souffre dignement des affres du terrorisme depuis
plus de six ans. Le vent d’espoir suscité par l’avènement du MPSR
témoigne à souhait du désarroi dans lequel vit ce vaillant peuple qui
ne demande qu’à retrouver la paix et la quiétude pour envisager son
avenir avec sérénité.
Fort heureusement, notre pays n’a jamais été aussi fort que dans la
tempête et les vents contraires. C’est pourquoi, ces moments
difficiles doivent constituer pour nous, peuple Burkinabè, un
marchepied pour nous élever vers de meilleurs horizons.
Pour y arriver, il nous faut prendre collectivement conscience des
efforts et des sacrifices à consentir.

Mes chers compatriotes

L’œuvre de refondation portée par le MPSR ne s’inscrit pas dans une
logique révolutionnaire. Elle est plutôt un projet de transformation
positive profonde qui consiste à revenir aux fondamentaux.
Retrouver nos valeurs et les replacer au centre de toutes nos actions, voici ce qui me semble être la base.
Loin des grandes théories élitistes, il s’agit d’intégrer, dans nos
comportements de tous les jours, quelles que soit nos origines, notre
métier, nos responsabilités ou notre réalité sociale, la valeur
d’intégrité dont notre pays porte le nom.
Personne ne pourra accomplir ces changements à notre place. Et le
MPSR, s’il porte ce projet de refondation, n’en est que la locomotive.
Il faut en effet que l’ensemble des wagons puissent se mettre en
branle pour faire de cette refondation une réalité.
Le MPSR pour sa part, assumera le rôle historique qui est le sien
dans la droite ligne de sa vision.
La restauration de l’intégrité de notre territoire, priorité absolue,
passera par une réorganisation de l’ensemble des forces
combattantes, afin de les rendre complémentaires et inter-
opérables pour un maillage efficient du territoire national. Ce
chantier, déjà engagé à travers la création du Commandement des
Opérations du Théâtre National (COTN), implique la nécessité de
redynamiser la connexion entre la fonction renseignement et les
opérations sur le terrain. Cela permettra de mieux soutenir notre
choix stratégique d’orienter résolument notre action vers l’offensive contre tous les groupes armés qui resteront dans une logique de répandre la violence de façon aveugle au sein de nos communautés.
De toute évidence il faudra également rendre le soutien logistique
plus flexible pour mieux l’adapter à la nature de la menace.
Tout cela, combiné à tous les réajustements qui s’opèrent
actuellement au sein de nos forces, permettra sans doute
d’améliorer la situation. Mais pour véritablement et définitivement
prendre le dessus sur l’ennemi, il faudra, pour l’amour que nous
portons pour notre pays, se révolter et se convaincre qu’en tant que
Nation nous avons plus que ce qu’il faut pour gagner cette guerre.

Militaires
Paramilitaires
Volontaires pour la Défense de la Patrie

Nous qui sommes en première ligne de ce combat, il nous faut donner
à nos populations des raisons d’espérer ; il nous faut leur insuffler
notre rage de vaincre ; il nous faut leur donner l’envie de s’engager
à nos côtés et de nous soutenir de toutes leurs forces.
Surtout. Surtout, il nous faut redonner à ces milliers de personnes
déplacées internes le droit de rêver. Nous avons le devoir de leur rendre le droit de retourner chez eux, de cultiver leurs terres, de
nourrir leurs familles et de créer un avenir pour leurs enfants.
Avec de l’engagement, de la détermination et de la cohésion, nous
pouvons y arriver. Et nous devons y arriver

Concitoyennes
Concitoyens

Au-delà de la priorité sécuritaire, la transformation que les
Burkinabè appellent de tous leurs vœux doit également s’opérer au
sein de l’administration et dans la gestion de la chose publique. C’est
pourquoi nous allons procéder à une dépolitisation systématique,
méthodique et progressive de l’administration publique. Seules
doivent prévaloir les compétences techniques et la probité.
De même, la lutte contre la corruption, véritable serpent de mer
dans notre pays depuis plusieurs décennies, doit prendre une nouvelle dynamique .
L’administration publique que nous voulons
mettre en place doit constituer en elle-même, par son mode de
fonctionnement et par les valeurs morales des premiers
responsables, un outil qui dissuade.
Dans le même sens, la justice et les structures de lutte contre la
corruption auront un rôle crucial à jouer. Il faudra en effet que les
dossiers de crimes économiques, trop longtemps restés dans les
tiroirs, soient examinés au plus vite pour assainir les bases de la
nouvelle administration.
Ceux qui, par mauvaise volonté ou pour des raisons malsaines,
tenteront de faire obstruction au processus, assumeront les
conséquences de leurs actes. Ce serait en effet se tromper
gravement que de considérer la volonté du MPSR d’inclure tous les
acteurs dans le processus en cours, comme une faiblesse. Aucun
individu, aussi important soit-il ne peut s’arroger le droit de prendre
en otage notre peuple.
Pour les acteurs politiques, la période de transition qui s’annonce ne
doit en aucun cas être considérée comme une pause ou une trêve à
l’issue de laquelle reprendraient les calculs purement électoralistes
et les guéguerres de chapelles aux fins d’intérêts égoïstes. Bien au
contraire, cette période doit être une opportunité d’introspection, de
remise en cause et de questionnement. C’est le seul moyen de tirer
leçon des échecs pour proposer aux Burkinabè des projets à la
hauteur des leurs attentes

Mesdames, Messieurs
Amis du Burkina Faso

En ces moments difficiles, notre pays n’a pas été abandonné par ses
partenaires. C’est l’occasion pour moi de remercier la communauté
internationale pour tous les efforts consentis pour accompagner le
Burkina Faso. Je voudrais également saluer la présence à cette
cérémonie des représentants des organisations sous régionales,
régionales et internationales.
Dans la logique de sa tradition d’ouverture, le Burkina Faso réitère
sa disponibilité à travailler en toute souveraineté avec tous les
partenaires dans le respect mutuel.
Nous avons pris l’engagement de faire en sorte que le processus en
cours dans notre pays soit le plus inclusif possible afin de prendre
en compte les aspirations profondes de notre peuple. C’est dans
cette dynamique qu’a été installée la commission technique
d’élaboration de projets de textes et de l’agenda de la Transition, qui
a déjà commencé ses travaux et qui devrait indiquer le chemin à
suivre pour un retour à un ordre constitutionnel accepté de tous, et
prenant en compte nos contraintes sécuritaires, nos réalités et les
aspirations de notre peuple.

Mesdames, Messieurs

Les semaines et mois à venir seront décisifs pour l’avenir de notre
Nation. J’adresse aux Burkinabè de l’intérieur et de la diaspora un
message de confiance. J’ai la conviction qu’il n’y a pas de fatalité dès
lors que nous mettons toutes nos forces ensemble. J’ai la conviction
que les ressources pour restaurer notre intégrité se trouvent en
nous-mêmes. J’ai la conviction que nous avons en chacun d’entre
nous la force de taire nos différences et de nous réconcilier avec
nous-mêmes.
Le monde nous regarde. Tant de fois nous l’avons agréablement
surpris. Tâchons de le faire une fois encore.
En ce qui me concerne, je mesure la charge et la gravité des
responsabilités qui me reviennent. Je connais les enjeux et je sais
les attentes. Dans l’esprit des aspirations de notre peuple, je
m’engage à gouverner par l’exemple et dans la sobriété, loin du faste
des temps de paix.

Le succès, seule issue envisageable à mon sens, ne sera pas le mien
mais celui du peuple Burkinabè tout entier.
Retroussons donc nos manches et osons inventer le prospère
Burkina de paix et de justice dont nous rêvons.

Vive le Burkina Faso
Je vous remercie

Kaceto.net