A l’appel d’un collectif d’organisations de la société civile, de nombreux Burinabè ont rallié la place de la nation où s’est tenu le samedi 1er juillet un meeting de soutien à la Transition, aux FDS ainsi qu’aux VDP. Une occasion pour les organisateurs d’appeler à l’élaboration d’une nouvelle constitution qui nous ressemble et à des réformes institutionnelles à même de renforcer la démocratie burkinabè
Les oreilles du président français Emmanuel Macron ont dû siffler fort dans l’après-midi du samedi 1er juillet 2023. Pareil pour son homologue nigérien Mohamed Bazoum. Ils ont été la cible de vives invectives lors du meeting organisé le 1er juillet à la place de la Nation à Ouagadougou, par la Coordination nationale des organisations de la société civile (CNOSC). Oh, ce n’était pas la mobilisation des grands jours, mais ceux qui avaient répondu à l’appel du CNOSC semblaient bien en phase avec les objectifs du meeting : apporter un soutien à la Transition et au capitaine Ibrahim Traoré, aux Forces de défense et de sécurité et aux Volontaires pour la défense de la patrie (VDP), dire oui à la relecture de la constitution, à un développement endogène, non à la politique française au Burkina, non à la Communauté économique des Etats d’Afrique de l’Ouest (CEDEAO), à l’Union africaine (UA) et à la politique occidentale.
Prenant la parole, le porte-parole du CNOSC, Ghislain Dabiré a déclaré que « la légitimité du capitaine Ibrahim Traoré et de son gouvernement tire sa source du peuple burkinabè parce que nous nous reconnaissons dans leurs prises de décision et celles-ci répondent aux aspirations profondes de notre peuple ».
Il a invité la jeunesse et l’ensemble des Burkinabè à rester en alerte maximum jusqu’à la victoire finale car, dit-il, « c’est maintenant que l’adversité commence ». En vue d’élaborer une nouvelle constitution, il a appelé à une large consultation des couches socio-professionnelles burkinabè et à corriger les incongruités qui se trouvent dans la constitution actuelle, notamment, la haute cour de justice et la non-prise en compte de la justice traditionnelle dans la gestion des différends entre Burkinabè.
Le bal des discours est ouvert. Les premiers à monter sur le podium sont les représentants des autorités coutumières. Au nom des valeurs ancestrales qu’elles incarnent, une vingtaine de bonnets rouges ont clamé, par la voix du Wedang Naba, leur soutien total et entier à la Transition ainsi qu’à la nouvelle constitution qui doit refléter les réalités socio-culturelles du Burkina. Puis, cèdent la place aux représentants de la communauté musulmane. Le message est pratiquement le même que les prédécesseurs, le bonheur d’avoir été entendus par Allah en plus !
Car, on a-t-on appris, les musulmans ont sacrifié des bœufs et fait des incantations sur le coran pour supplier le Tout-puissant de soulager la souffrance du peuple burkinabè. « Dieu nous a entendus puisque Ibrahim Traoré est venu », a déclaré un des quatre orateurs musulmans. Mieux, a-t-il poursuivi, « IB a eu des équipements, il a des hommes et aujourd’hui, on s’en fout de la CEDEAO, de l’Union africaine et de l’Union européenne ». Avec un rare talent de généalogiste, un autre renchérit : « IB est honoré même parmi ses ennemis, n’en parlons de chez ses amis ! ».
Les deux MC qui animent le meeting appellent les représentants des catholiques et des protestants à prendre la parole. Malgré leurs relances, personne ne monte sur le podium. Visiblement embarrassés, ils annoncent le musicien Jean Zoé, le temps que ces derniers se préparent.
Ton tube à succès depuis 2015, « Ton nina poukamé », autrement dit, « nos yeux sont ouverts », électrise le public. Quand le musicien quitte la scène, point de catholiques et de protestants pour le succéder.
Mais la liste des orateurs est encore longue. Des camarades sont venus de l’étranger, notamment de la Guinée, du Mali et de la France, pour soutenir le combat des Burkinabè contre l’impérialisme.
Il est temps de les écouter. C’est l’homme du Métro qui ouvre la séquence des « messages amis de l’étranger ». Son terrain de combat, c’est dans le métro parisien où, face à des usagers du transport urbain parfois médusés, il pourfend la françafrique, ces relations incestueuses qu’entretiennent les hommes politiques français avec ceux d’Afrique francophones. Très en verve, il s’en est pris à l’ONU et « ses faux rapports sur les massacres qui visent à diviser les peuples d’Afrique ».
On passe la parole à son camarade, Mwa Zulu, lui aussi venu de la France. Beaucoup l’ont découvert dans une vidéo devenue virale sur les réseaux sociaux dans laquelle, en compagnie d’autres camarades, il s’était rendu au Musée des arts premiers du Quai Branly à Paris, pour dit-il, « récupérer les biens culturels qui avaient été volés à mon peuple sous la colonisation ». Après avoir dénoncé la Mission de l’organisation des Nations unies pour la stabilisation en RD Congo (Monusco) ainsi que la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations unies pour la stabilisation du Mali (Minusma), il a demandé la dissolution pure et simple de l’ONU et la rupture avec l’ordre impérialiste.
« Je suis fier de célébrer les funérailles de la Minusma et de LCI sur la terre de Thomas Sankara », a lancé d’entrée, Ben le Cerveau, un des leaders de la société civile malienne et grand soutien à la Transition conduite par le colonel Assimi Goïta. Venu apporter « le salut fraternel du peuple malien aux frères burkinabè », il a rappelé que la nouvelle constitution malienne a été adoptée et qu’il « faut faire pareil au Burkina afin de renforcer notre souveraineté » et faire face « aux organisations criminelles, sataniques qui veulent nous asservir ». Pour lui, la Transition burkinanè n’a pas commencé le 30 septembre 2022, mais le 15 octobre 1987 et s’est terminée avec l’arrivée de Ibrahim Traoré. On est dans la révolution ». C’est la « Ibmania qu’il faut instaurer au Burkina », conseille-t-il car poursuit-il « on a besoin de IB et de Goïta dans nos palais ».
Puis, il a repris le slogan que Thomas Sankara, alors premier ministre, avait lancé sur la même place le 26 mars 1986 : « Quand le peuple se met debout, l’impérialisme tremble ».
A 85 ans et toujours alerte, « Maman Rama » est heureuse « de voir que son rêve d’une Afrique libérée par les Africains se réalise sur la terre de Thomas Sankara ».
L’après-midi est largement entamée et la fraicheur que la pluie matinale avait apportée s’est dissipée. Le mercure est monté et la fatigue se lit sur les visages. On commence à ranger les pancartes et à plier les banderoles. En attendant la prochaine sortie.
Dominique Koné
Kaceto.net
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